Actualités : Les anciens PADHUE dans le système de soins français - le point au 1er janvier 2025 à partir des données du CNOM

Publié le 30 juin 2025 à 13:24
Article paru dans la revue « INPH / Le Mag de l’INPH » / INPH N°31

Les PADHUE (Praticiens à diplôme hors Union européenne) représentent un réel enjeu pour l'organisation du système de santé. Ils sont recrutés par les hôpitaux publics pour pallier le manque de personnel médical, mais ils ont souvent peu de reconnaissance, malgré leur contribution essentielle. On les évoque aussi comme une solution aux « déserts médicaux ».

Le numerus clausus instauré dès 1971 a eu pour conséquence, bien prévisible, de créer une pénurie de médecins. Pour pallier celle-ci, des réformes successives ont été réalisées pour permettre aux établissements publics de santé de recruter des praticiens à diplôme hors Union Européenne (dits « PADHUE »), et leur permette une voie d'accès au plein exercice. Cependant, la crainte d'un sureffectif de ces médecins a conduit, au cours des années 1990, à l'instauration de mesures pour tenter d'en réguler le nombre et s'assurer de leurs compétences.

Entre 1999 et 2019, l'État tente de mettre ­ n au système de dérogation permanente visant à maintenir en fonction des médecins qui n'ont pas régularisé leur situation tout en posant le principe d'une interdiction faite aux établissements de recruter de nouveaux praticiens.

Un régime spéci­fique est également mis en place en 2006, modifié en 2012, puis prolongé en 2016, pour résorber la situation des praticiens en exercice sur le territoire depuis plusieurs années. En dépit de ces mesures, des PADHUE continueront à être recrutés en dehors de tout cadre réglementaire.

La loi « OTSS » de 2019 introduira un énième dispositif dérogatoire pour régulariser et contrôler les compétences des praticiens (environ 3 500 praticiens se sont inscrits dans cette procédure).

À l'issue, seule la procédure d'autorisation d'exercice devrait demeurer.

Dernièrement, un décret du 19 décembre 2024 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels est venue ajuster la précédente loi en introduisant un dispositif d'attestation d'exercice provisoire de 13 mois, renouvelable une fois, pour les PADHUE s'engageant à passer les EVC (statut PACT : Praticien Associé Contractuel Temporaire).

Le rapport du CNOM du 1er janvier 2025, livre les données chiffrées sur le devenir des anciens PADHUE qui sont inscrits à l'Ordre des médecins (et uniquement les inscrits, donc ce n'est pas une étude démographique des médecins actuellement stagiaires ou en cours de validation de cursus dans les hôpitaux), notamment sur les diplômes et nationalités d'origine, les spécialités, les modes d'exercice et les territoires d'exercice de ces médecins.

Au 1er janvier 2025, 19 154 médecins anciens PADHUE étaient inscrits au Tableau de l'Ordre des Médecins, exerçant ou non une activité, contre 7 963 en 2010 soit une augmentation de 141 % sur la période (+ 11 191 médecins) ou encore une multiplication par 2,4 des effectifs sur cette période de 15 ans.

Si l'on considère les anciens PADHUE inscrits au Tableau de l'Ordre des médecins depuis 1962, 3/4 des effectifs ainsi inscrits au Tableau pour la première fois (primo-inscrits) l'ont été après 2002.

Répartition catégorielle des anciens PADHUE

Parmi les médecins anciens PADHUE inscrits, près de 93 % sont actifs (N=17 778). Les actifs sont décomposés en trois populations distinctes : les actifs réguliers, les intermittents et les retraités actifs.

Les actifs réguliers quant à eux représentent 83.4 % des actifs (N= 15 972).

Les autres parts sont réparties pour 6.1 % comme médecins exerçant une activité intermittente (N= 1166) et 3.3 % comme médecins retraités actifs (N=640).

Origine géographique

Algérie (38,8 %), Tunisie (15,1  %), Syrie (8,6 %), Maroc (7,4 %), Liban (4 %) pour les 5 premiers pays et en rajoutant Egypte, Lybie, Palestine cela représente 75, 1 % des actifs PADHUE qui viennent de la méditerranée.

Tout le reste de l'Afrique (avec en tête le Bénin avec seulement 1,2 %) représente 10,5 % des actifs PADHUE.

Madagascar 3,6 %.

L'ensemble des pays d'Amérique du Sud 3,1 %.

En‑ n Fédération de Russie (2,3 %) plus Bélarus (0,2 %) représentent 2,5 %... pour 0,9 % l'Ukraine.

Répartition géographique par région et par département des inscrits au Tableau des anciens PADHUE :

Si l'on s'intéresse à la répartition des médecins actifs, leur proportion est la plus importante en Île-de-France puisqu'ils sont 38.3 % à y être inscrits suivi, respectivement en seconde et troisième positon, des Hauts-de France (8.8 %) et Auvergne-RhôneAlpes (8.6 %).

À l'échelle départementale, la proportion de ces PADHUE parmi les actifs par département est très contrastée d'un département à l'autre. Aussi, alors que dans le Doubs cette proportion n'est que de 2 %, ou de 1,7 % en Loire Atlantique elle est, par exemple, de 29 % en Eure et Loir, et même de 30,6 % dans le Val d'Oise.

Répartition par spécialités

Les 10 spécialités ayant la proportion de PADHUE la plus élevée par rapport aux médecins actifs de la même qualification sont, dans l'ordre décroissant, les spécialités suivantes :

GÉRIATRIE 33,6 %

(rang de choix 41e sur 44 à l'EDN des étudiants à diplôme français)

Onco-hématologie 19,3 %

Chirurgie viscérale

Et digestive 18,1 %

Néphrologie 17,7 %

Neurochirurgie 14,1 %

Oncologie médicale 13,9 %

Chirurgie infantile 13,8 %

Pneumologie 13,2 %

Gynécologie Obstetrique 12,7 %

Pédiatrie 12,7 %

Pour rappel le rang de choix des internes français au classement des EDN : 1- Chir plastique 2- Dermato 3- Ophtalmo 4- Cardiologie 5- Anesthésie-Réa 6- Chir maxillo-faciale 7-  ORL 8- Neurochir 9- Maladies Infectieuses 10- Chir ortho-traumato.

Les spécialités avec les proportions de PADHUE les moins importantes :

Chirurgie Orale 0,9 %

Médecine Vasculaire 2,4 %

Gynécologie Médicale 2,9 %

Allergologie 2,9 %

Chirurgie Plastique 3 %

Dermatologie 3,3 %

et Médecine Générale seulement 3,5 % !!! sauf dans les départements dit de « désert médical ».

Modes d'exercice

Une activité surtout salariée et majoritairement hospitalière, probablement liée au mode de recrutement et de validation du diplôme. Parmi ces actifs anciens PADHUE, 61 % sont salariés, 23 % exercent comme libéraux, 16 % ayant un exercice mixte libéral et salarié.
Parmi les salariés, 84 % sont hospitaliers publics.
À titre de comparaison, parmi l'ensemble des actifs, 43 % sont libéraux, 11 % sont mixtes et 47 % sont salariés dont 30 % sont hospitaliers publics.

Démographie par sexe et âge des PADHUE en activité régulière

Au 1er janvier 2025, sur les 15 972 anciens PADHUE en activité régulière enregistrés à l'Ordre des médecins français, 36,9  % sont des femmes et 63,1 % des hommes.

Ces médecins sont en moyenne âgés de 52,4 ans, 13,5  % d'entre eux ont moins de 40 ans et 31,7 % sont âgés de 60 ans ou plus.

En comparaison au total des inscrits à l'Ordre, nous observons une répartition par sexe sensiblement différente avec à présent une proportion de femmes légèrement supérieure à celle des hommes de 52,6  %. Effectivement, au 1er janvier 2025, ce sont 105 767 femmes et 95 472 hommes qui sont inscrits comme médecins en activité régulière. En ce qui concerne l'âge moyen des médecins en activité régulière, celui-ci est de 47,9 ans. La proportion des médecins de moins de 40 ans est de 32,3 % et celle des médecins de 60 ans et plus est de 22,3 %.

Approche territoriale des anciens PADHUE

La lecture comparée des cartes de densités départementales des actifs réguliers et de celle de la proportion des anciens PADHUE parmi l'ensemble des actifs réguliers met en évidence le fait que les départements les moins densément peuplés sont ceux où la proportion des anciens PADHUE parmi les actifs réguliers est la plus importante.

Top 5 des départements ayant la part contributive (en %) de médecins généralistes anciens PADHUE à la densité départementale en activité régulière la plus importante : Aisne 15,8 %, Eure et Loir 15,9 %, Indre 14,8 %, Orne 16,0 %, Val-d'Oise 15,8 %.

Top 5 des départements ayant la part contributive (en %) des médecins de spécialités médicales anciens PADHUE à la densité départementale en activité régulière la plus importante : Aisne 46,5 %, Eure 45,9  %, Eure et Loir 47,6  %, Orne 45,0 %, Val-d'Oise 47,4 %.

Pour les spécialistes chirurgicaux, on observe également que les départements les moins densément dotés sont ceux qui ont la proportion d'anciens PADHUE la plus importante comme les départements autour du Bassin parisien, ceux situés au Sud de la région Centre-Val de Loire, le nord du Grand Est et de la Bourgogne-Franche Comté.

En conclusion, les anciens PADHUE

Des « Invisibles » qui participent au service public des hôpitaux. Une présence cruciale dans les « déserts médicaux ». Un pro‑ l diversifié mais majoritairement masculin et d'âge mûr. Des diplômes en provenance à 75 % du bassin méditerranéen. Salariat prédominant, mais le libéral gagne du terrain. Un rôle majeur en gériatrie : un médecin sur trois ! L'intégration des anciens PADHUE en France est néanmoins un modèle de réussite, malgré les dé‑ s administratifs et culturels. Leurs parcours témoignent de résilience et de détermination, enrichissant le paysage médical français de compétences diversifiées et complémentaires.

Un grand merci à nos collègues PADHUE !!!

Dr Eric OZIOL
Délégué général adjoint INPH
Secrétaire Général du SYNDIF

Dr Slim BRAMLI
Secrétaire général INPH
Vice-président de la FPS

Publié le 1751282696000