
Dates clés
1943 : Première modélisation mathématique de l'IA.
1955 : Invention du terme « intelligence artificielle ».
L'intelligence artificielle est au coeur des discussions depuis plus de 50 ans, mais elle a connu une histoire mouvementée. Après un début prometteur, on s'est rapidement heurté aux limites technologiques et aux défis sous-estimés. Ce n'est que dans les années 1990 que l'IA a connu un renouveau grâce au Machine Learning (apprentissage automatique), une méthode permettant aux algorithmes d'apprendre à partir de données. Le Deep Learning, une sous-catégorie du Machine Learning, utilise des réseaux de neurones artificiels pour résoudre des problèmes complexes.

What is le Deep Learning ?
Pour illustrer, imaginons un boulanger qui souhaiterait prédire le temps de cuisson idéal de son pain en fonction du poids de la pâte à pain. Il enregistre le poids et le temps de cuisson pour chaque fournée, puis trace une courbe (avec une pente et une origine) qui relie ces deux variables. Ainsi, si pour un poids de pâte à pain au hasard il saura estimer son temps de cuisson grâce à cette fonction. De manière similaire, un ordinateur peut apprendre à prédire le temps de cuisson en analysant ces exemples. Ce principe simple à 2 variables devient plus puissant lorsque l'on augmente le nombre de variables, et c'est là que les réseaux de neurones entrent en jeu pour résoudre des problèmes plus complexes, comme c'est le cas par exemple de la reconnaissance d'images.
1 neurone artificiel supérieure ou égale Plusieurs couches de neurones supérieure ou égale Réseau de neurone profond.
Un neurone artificiel avec 3 entrées X1, 2 et 3 avec un coefficient chacune (un poids). Si la somme obtenue est supérieure à un certain seuil le neurone va envoyer 1 en sortie, sinon il enverra un 0. Les poids et les seuils sont les variables que nous allons utiliser afin de moduler notre réseau.
Pour les relations très compliquées, on empile des neurones artificiels. Ces réseaux de neurones sont très polyvalents.
Modèle boite noire : Une fois que l'algorithme a identifié la relation optimale entre les neurones, à la suite de la phase d'entraînement, il produit une fonction mathématique complexe, souvent difficile à interpréter.
Un réseau de neurones fonctionne en imitant l'efficacité synaptique des neurones du cerveau humain. Un neurone artificiel reçoit des entrées X pondérées et génère une sortie Y en fonction d'un seuil. Pour des tâches complexes, comme la reconnaissance d'images, on empile plusieurs couches de neurones, créant des "réseaux profonds". Puis il faudra entraîner le réseau en lui donnant des exemples d'image afin qu'il établisse une fonction reliant les neurones du réseau. Il pourra par la suite utiliser cette fonction pour reconnaître une nouvelle image. Plus les réseaux ont de couches, plus ils deviennent puissants, mais aussi plus difficiles à entraîner.
Portrait de Yann LeCun
Ce Français, est un pionnier dans le domaine de l'intelligence artificielle. Dès les années 1990, il a commencé à utiliser des méthodes novatrices, alors que la communauté scientifique restait sceptique et s'orientait vers d'autres axes de recherche.
Pendant près de deux décennies, seuls quelques passionnés dans le monde s'intéressaient au Deep Learning. C'est en 2012, que son histoire pris un tournant décisif. Lors du "Large Scale Visual Recognition Challenge", une compétition annuelle de reconnaissance d'images, son algorithme de Deep Learning nommé "SuperVision" a remporté une victoire écrasante, surprenant tout le monde. Dès l'année suivante, la majorité des participants se sont tournés vers l'utilisation du Deep Learning. Suite à cette avancée, Yann LeCun est devenu une figure incontournable du domaine et a été nommé directeur du laboratoire d'intelligence artificielle de Facebook.
Applications médicales
L'IA révolutionne progressivement le milieu médical, avec des applications variées qui couvrent de nombreuses spécialités. Voici un aperçu des usages ou des développements en cours :
Chirurgie assistée par IA
Les robots chirurgicaux (4), comme ceux contrôlés à distance par un chirurgien, permettent des interventions précises et rapides, et une réduction des complications post-opératoires, notamment des infections. Toutefois, ces robots ne sont pas encore autonomes pour la prise de décisions chirurgicales. Pour cela, une IA capable d'analyser et d'interpréter des vidéos en temps réel pour guider les gestes du robot serait nécessaire.

À l'inverse, le CyberKnife, un robot autonome en radiothérapie, illustre l'efficacité d'une IA programmée pour traiter des tumeurs avec une précision remarquable.
Dermatologie : Diagnostic automatisé pour combler le manque de médecins
Face au manque de dermatologues et aux besoins croissants de santé publique, l'IA offre des solutions prometteuses (2). Depuis 2016, un algorithme développé par une équipe de Stanford (1) a démontré sa capacité à identifier des lésions cutanées malignes sur des images, avec une performance supérieure à celle de 21 dermatologues experts.
Ces avancées permettent d'améliorer le dépistage précoce et d'étendre l'accès aux diagnostics dans des zones sous-dotées.
Radiomique et immunothérapie
Dans le domaine de l'oncologie, des études comme celle menée à Gustave Roussy (3) montrent qu'à partir des textures radiographiques (radiomique), une IA peut prédire la sensibilité d'une tumeur à l'immunothérapie.
Big Data et santé publique
L'IA s'appuie sur le Big Data pour établir des corrélations entre maladies et facteurs de risque, permettant ainsi de mieux cibler les actions de prévention et de dépistage. Par exemple, elle peut indiquer dans quels quartiers il serait pertinent d'organiser des campagnes de dépistage en fonction des données sur les risques sanitaires locaux.
IA en psychiatrie et psychologie
Les chatbots, dont le premier représentant, nommé Eliza, fut développé en 1966 par Joseph Weizenbaum, commencent à jouer un rôle dans l'accompagnement des patients. Une étude américaine a montré que ces chatbots répondaient parfois aux besoins des patients de manière plus satisfaisante que les médecins.
Des algorithmes développés par Facebook permettent également de détecter des comportements suicidaires à partir des publications des utilisateurs, déclenchant la proposition de hotlines par exemple.
IA et radiologie
L'IA excelle dans des tâches de perception, comme l'analyse d'images médicales. Elle peut prédire la probabilité de guérison sur plusieurs années, voire anticiper des risques de décès à partir de scanners normaux (8, 9). Il existe également, des algorithmes capables d'analyser des mammographies (5) pour détecter des anomalies.
Enjeux éthiques et humains
Si l'IA apporte des résultats impressionnants, elle soulève aussi des questions éthiques.
Il est facile de valider une intervention chirurgicale, mais plus complexe de s'assurer de la pertinence des prédictions à long terme. Ces prédictions, posent la question de la façon d'adapter les soins, alors que ces anticipations ne peuvent pas toujours être vérifiées ou validées par des connaissances humaines actuelles.
Pour illustrer un second problème éthique, Google a fondé le projet Nightingale (6, 7), un partenariat avec le réseau de cliniques américaines Ascension, qui a suscité la controverse. Il s'agissait de recueillir des millions de données patients sans leur consentement explicite, poussant Google à suspendre le projet.
Pour aller plus loin
L'intégration de l'intelligence artificielle dans le secteur médical soulève des questions cruciales : estce que le temps libéré par l'IA va permettre aux médecins de trouver le temps de parler plus, d'informer et de rassurer les malades ?
En déléguant certaines tâches administratives et analytiques à l'IA, les professionnels de santé gagneraient un temps précieux, ce qui est essentiel dans un contexte où certaines maladies évoluent rapidement. Finalement, l'objectif est de créer un équilibre où l'IA soutient les médecins, leur permettant de se concentrer sur ce qui compte vraiment : le soin et l'accompagnement des patients.
Si vous voulez en savoir plus, vous pouvez regarder les cours de Yann LeCun pour le Collège de France
https://www.college-de-france.fr/fr/agenda/lecture/deep-learning/apprentissagenon-supervise
Lien vers la conférence TEDx de Fei-Fei Li, co-directrice du Stanford Vision and Learning Lab, ImageNet https://www.ted.com/talks/fei_fei_li_how_we_re_teaching_computers_to_understand_pictures?subtitle=en&lng=fr&geo=fr
Par Sarah WITMEYER

Références
1. Esteva Andre, Kuprel Brett, Novoa Roberto A., Ko Justin, Swetter Susan M., Blau Helen M., and Thrun Sebastian, « Dermatologist-level classification of skin cancer with deep neural networks. », Nature, 542(7639):115, 2017.
2. Benoît Duchemann. Intelligence artificielle et santé publique: normes, savoirs et appropriations. Médecine humaine et pathologie. Université Paris Cité, 2021. Français. NNT : 2021UNIP7163 tel-03882010.
3. Radiomics to assess tumor infiltrating CD8 T-cells and response to anti-PD-1/PD-L1 immunotherapy in cancer patients: an imaging biomarker multi-cohort study, Lancet Oncology, DOI : 10.1016/S1470-2045(18)30413-3.
4. Autonomous robotic laparoscopic surgery for intestinal anastomosis. January 2022 Science Robotics 7(62), DOI:10.1126/ scirobotics.abj2908.
5. https://www.thema-radiologie.fr/actualites/3660/l-ia-montre-ses-qualites-pour-la-lecture-des-mammographies-dedepistage.html
6. https://cloud-computing.developpez.com/actu/284043/Le-Projet-Nightingale-de-Google-recueille-des-donneespersonnelles- sur-la-sante-de-millions-d-Americains-dans-21-Etats-sans-meme-que-les-patients-n-en-soient-informes-dapres- un-rapport/#:~:text=L'initiative%20s'inscrit%20dans,été%20informés%20de%20l'effort.
7. https://www.nightingale-triage.eu 8. https://www.thema-radiologie.fr/actualites/3614/pneumonie-non-iatrogene-un-modele-de-deep-learning-pour-predire-lerisque- de-deces.html
9. https://life2vecai.com
10. Using sequences of life-events to predict human lives, December 2023, Nature Computational Science, 4(1):1-14,DOI:10.1038/s43588-023-00573-5.

