Cumul emploi retraite ou comment continuer à exercer son activité médicale

Publié le 01 Sep 2022 à 16:09

UNE SOLUTION POUR LE PRATICIEN HOSPITALIER À LA RETRAITE ?

Le médecin à la retraite peut continuer à exercer après son âge légal d’accès à la retraite. Il a alors la possibilité de cumuler ses revenus de retraité et les revenus d’une activité libérale ou salariée.

Nous présentons ci-dessous le dispositif cumul emploi retraite qui permet d’exercer en salarié dans un établissement de soins public ou privé. Le médecin a alors une activité salariée dans une structure publique ou privée avec un contrat d’exercice le liant à cette structure (CDD ou CDI).

Ce dispositif issu du décret n° 2005-207 du 1er mars 2005, est accessible aux médecins retraités ayant eu un exercice libéral, mais aussi aux médecins hospitaliers, praticiens hospitaliers notamment. Dans cet article, nous ne parlerons que des praticiens hospitaliers désirant prolonger dans un cadre salarié.
Le  cumul emploi retraite  des médecins  hospitaliers est donc autorisé par le décret n° 2005- 207 du 1er mars 2005. L’activité se prolonge alors au-delà de la limite d’âge. Par exemple, à partir de 67 ans et demi pour les médecins nés en 1954 et ayant acquis leur droit à la retraite. La durée de l’exercice supplémentaire était, à la base, restreinte à 3 années, un certifi cat délivré par un médecin agréé validant l’aptitude du praticien.

Après avoir liquidé leur droit à la retraite, les médecins peuvent alors rejoindre leur nouvelle structure de soins dans le cadre d’un cumul emploi retraite. Ils doivent alors être recrutés ou maintenus sous le statut de praticien contractuel.

En octobre 2017, le cumul emploi-retraite ne concernait environ que 2 300 médecins hospitaliers. Jusqu’à maintenant, ces professionnels semblaient en eff et lui préférer un autre dispositif : celui de la surcote. Selon l’Ircantec, plus de 15 000 retraités ont ainsi bénéfi cié d’une majoration de leur pension complémentaire entre 2010 et 2017 (soit plus de 6 sur 10).

Mais ce constat a évolué, les règles du cumul emploi-retraite ayant fait l’objet de diff érents assouplissements :
- En 2009, avec le déplafonnement de ce dispositif ;
- En 2016, avec la possibilité pour les praticiens hospitaliers de travailler après la retraite jusqu’à 72 ans (contre 67 ans jusqu’alors).
- En 2017, le cumul emploi-retraite était surtout plébiscité par les hommes. Il était exercé essentiellement à temps partiel pendant une durée de 3 ans environ.

Ainsi, progressivement, le cumul emploi retraite a permis d’off rir une réponse à des enjeux personnels mais aussi de santé publique.

On vient de le voir, ce cumul emploi-retraite attire une large catégorie de médecins, spécialistes, généralistes et hospitaliers.
De ce dispositif existant qui semblait répondre à certaines attentes des professionnels de santé, le gouvernement a décidé d’en revoir et redéfi nir les contours. Il souhaite ainsi en faire un outil à part entière de son plan de lutte contre le manque de personnels de santé.

Un tel cumul correspond donc à une demande croissante de la part des médecins, mais aussi des établissements. Il s’agit le plus souvent d’un appoint fi nancier pour le praticien hospitalier, mais ne permettant que rarement de dépasser les revenus qu’il avait en période active.

Il est intéressant à ce propos de consulter les off res d’emploi proposées par les établissements MCO, en particulier de Maternité, pour voir le nombre croissant d’établissements faisant appel à des médecins intérimaires pour satisfaire au manque de spécialistes dans ces établissements publics et privés (Adecco Médical, Prodie Santé…).

Les jeunes retraités praticiens hospitaliers attirent, de fait, davantage les agences de recrutement  ; leur pratique récente en hôpital rassure sur leur compétence. Leurs connaissances demeurent d’actualité et les opportunités abondent.
Les cabinets de recrutement spécialisés dans le médical sont très attirés par ces profi ls professionnels et notamment en spécialité. Ils sauront donner aux candidats intéressés tous les éléments chiff rés pour leur projet de remplacement et les orienteront rapidement.

Pour ces raisons, ces jeunes retraités, guidés par la passion du métier, et également soucieux de maintenir leur niveau de vie, plébiscitent ce mode d’exercice en cumul emploi retraite qui, en pratique, ne va qu’en croissant.

Nous avons l’habitude de lire les off res de remplacement des confrères partant en congés (annonces historiquement très appréciées du site du SYNGOF par exemple, avec une rubrique « remplacements » toujours très active).

Depuis plusieurs années et plus particulièrement en ce moment, actualité oblige, des propositions émanant de cabinets de recrutement médicaux spécialisés sont proposées sur des sites internet spécialisés dans l’intérim médical. Ces cabinets, très professionnels et très effi cients, sont régulièrement sollicités par les hôpitaux et les cliniques et, naturellement, par les médecins très demandeurs. Ils sont régulièrement consultés par les PH candidats aux remplacements.

Devant ces offres de plus en plus nombreuses, corollaire inquiétant du manque crucial de praticiens pratiquant l’obstétrique, les obstétriciens en retraite sont de plus en plus attirés par cette modalité d’exercice.

On estime actuellement qu’un praticien sur deux continue à exercer après l’âge légal de la retraite et souvent dans ce cadre, et cela devrait concerner, d’après la CNOM, plus de 30 000 médecins d’ici 2025. Les motivations sont variées, mais pas seulement fi nancières. L’exercice reste le plus souvent à temps partiel, plus en adéquation avec l’âge des candidats. En obstétrique, l’interrogation des confrères confi rme cette tendance. Un médecin obstétricien, jeune retraité, pourra assurer, sous forme de missions, une à deux gardes par mois, associées s’il le désire à des consultations. La souplesse du système permettant de multiples combinaisons.

Les établissements demandeurs sont maintenant habitués à proposer des contrats en CDD de 1 jour ou 2, à leurs médecins intérimaires habituels. Cela correspond très bien à l’exercice de certains médecins qui désirent continuer à exercer une spécialité qu’ils apprécient. Ils prolongent ainsi leur activité tout en continuant à se former par FMC, en exerçant à leur rythme.

Se maintenir actif physiquement et mentalement, comme l’exige la profession, correspond bien à l’exigence d’un métier ou les connaissances doivent être mises à jour. Dans ce sens, le texte de loi sur le cumul emploi retraite, même s’il s’est assoupli, s’est simplifi é et demande cependant à ce que les durées d’exercices soient contractualisées entre établissements et praticiens remplaçants  ; les missions médicales sont limitées dans le temps, et associées à des visites médicales régulières auprès d’un médecin hospitalier.

Il est maintenant acquis que les revenus d’un médecin retraité restent modestes, compris entre 2000 et 3000 euros en moyenne selon les carrières, et conduisent ainsi à bousculer le cadre d’exercice.
Le manque de médecins et le contexte d’infl ation expliquent en grande partie l’engouement pour le mode d’exercice en cumul emploi retraite.

La nécessité fi nancière motive donc souvent cette action. Toutefois, les relevés de la CARMF Caisse Autonome des Retraites des Médecins de France, révèlent que l’amour du métier reste prégnant. En eff et, la majorité des praticiens allongeant leur exercice, ne sont pas concernés par les pensions modestes.

Il est alors naturel dans ce contexte que cette convergence entre besoins en professionnels de santé et intérêts des jeunes retraités à travailler, conduise à une augmentation des contrats signés.
Ce n’est pas, nous le savons, la solution idéale. Tous n’auront pas les ressources physiques ou mentales à prolonger au-delà de 40 années d’exercice sachant que ce métier est éprouvant, et bien sûr souvent contraint par les risques médico-légaux.

Notre exercice, Mutatis mutandis, s’adapte au gré des événements et des changements sociologiques. Le cumul emploi retraite est un outil nous permettant de continuer à pratiquer. À nous, praticiens hospitaliers, de nous adapter et en retraite aussi ; nous en avons lentement pris l’habitude…

Loi RIST et Intérim

Stéphanie RIST a été élue députée de la 1ère circonscription du Loiret sous l’étiquette En Marche ! en juin 2017. Et, actuellement, son nom est notamment associé aux dispositions réglementaires adoptées concernant l’intérim médical dans les hôpitaux, qu’elle argumente sur son blog :

« La Loi promulguée le 26 avril 2021 traduit le volet non fi nancier du Ségur de la santé, (elle) rénove la gouvernance des hôpitaux, permet de déployer le service d’accès aux soins (SAS), augmente le champ de compétence des sages-femmes et simplifi e les coopérations entre professionnels de santé.
On en parle en ce moment en raison de son article 33 sur l’intérim médical. En eff et, cet article oblige les directeurs d’établissements hospitaliers à respecter le plafond de l’intérim médical fi xé à 1170 € pour 24h.
En raison de la pénurie de médecins dans certaines spécialités telles que l’anesthésie-réanimation ou les urgences, les intérimaires peuvent pratiquer des tarifs allant jusqu’à 3000 €/24h, ce qui entraîne d’énormes surcoûts d’argent public pour les établissements et, surtout, déséquilibre les services hospitaliers puisque certains médecins quittent l’hôpital pour ce mode d’exercice beaucoup plus lucratif.
Dans les territoires les plus fragilisés par la faiblesse de la démographie médicale ainsi que par la crise sanitaire, les directeurs d’établissements craignent une fermeture de certains services si les médecins intérimaires refusent le contrôle des tarifs imposés par la Loi. Pour cette raison, le Gouvernement a proposé de retarder la mise en œuvre de la loi pour d’une part, faire une cartographie des établissements les plus sensibles et d’autre part, attendre la mise en place de la  prime de solidarité territoriale qui va permettre aux médecins hospitaliers d’être davantage payés que les intérimaires quand ils iront travailler dans d’autres établissements de leur territoire au-delà de leurs obligations de service. L’objet de cette Loi n’est pas d’interdire l’intérim médical quand il est indispensable pour assurer la continuité du service public hospitalier. Il s’agit seulement d’en limiter les dérives et de le rendre exceptionnel afin qu’il ne devienne pas le mode d’exercice prépondérant de la médecine hospitalière. 
Au-delà du sujet de l’intérim médical, il me semble nécessaire de réinterroger le mode de fi nancement des professionnels de santé dans notre pays.
Pouvons-nous accepter des rémunérations allant de 1 à 10 pour un même métier ?
Pouvons-nous accepter de rembourser 25 € la consultation du médecin généraliste ?
Pouvons-nous continuer à tolérer ces dérives de l’intérim médical ? 
Notre sécurité sociale est la base de la cohésion de notre société, l’hôpital public fait partie de ce pacte républicain. Posons alors les bonnes questions pour les préserver ! ».

Source : stephanierist.fr

À travers ce texte, nous voyons que les aff aires médicales des hôpitaux publics sont maintenant confrontées à des tensions quotidiennes en matière de personnel médical et de difficiles problématiques concernant le recrutement des praticiens hospitaliers intérimaires. 

L’application des textes réglementaires n’est pas chose aisée et devient de plus en plus ardue avec la raréfaction de certaines spécialités. Parfois les directives prises au niveau national ne sont pas applicables au niveau local en raison de la nécessité de recruter en urgence, notamment en cet été 2022.

Dr Jacques FAIDHERBE

Article paru dans la revue “Syndicat National des Gynécologues Obstétriciens de France” / SYNGOF n°02

Publié le 1662041347000