Actualités : Cas clinique - Lymphome de Hodgkin chez une adolescente de 14 ans

Publié le 30 juil. 2025 à 17:15
Article paru dans la revue « SFJRO / le mag » / SFJRO N°7

Jeune fille de 14 ans, originaire du Maroc, scolarisée en 4e, sportive, sans antécédents notables en dehors d'une amygdalectomie en 2023 et d'anciennes bronchiolites.

En mars 2024, elle présente des sueurs nocturnes, une fièvre prolongée, une asthénie marquée et une perte de poids de 13 kg en trois mois. Rapidement en mai, une dyspnée d'effort s'installe.

La famille consulte aux urgences au Maroc, suspicion initiale de tuberculose puis réalisation d'une radiographie pulmonaire et d'un scanner retrouvant une masse médiastinale antérieure.

Une biopsie de la masse a été réalisée au Maroc avec un résultat anatomopathologique en faveur d'un lymphome de Hodgkin.

La famille décide alors de revenir en France pour la poursuite de la prise en charge.

Le bilan a été réactualisé à leur arrivée avec un scanner cervical et thoraco-abdomino-pelvien ainsi qu'un TEP scanner réalisés en juin 2024 retrouvant des masses ganglionnaires nécrotiques médiastinales antérieures associées à des adénopathies sus-diaphragmatiques (cervicale et médiastinale). Il s'y associait une hépatomégalie discrètement hétérogène mais non spécifique.

L'atteinte tumorale était responsable d'une compression du tronc  veineux brachiocéphalique gauche avec doute sur une thrombose dans sa portion terminale.

Les examens ont été complétés par une échographie Doppler confirmant la thrombose de la veine jugulaire interne gauche, étendue sur environ 2 cm.

La relecture de l'anatomopathologie a retrouvé un aspect compatible avec un Lymphome de Hodgkin de type classique CD30+, CD15+, CD20-, EBER-.

Figure 1 : Images scanner et TEP scanner coupes axiales au diagnostic datant de juin 2024.

L'imagerie a été également relue en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) avec la confirmation d'une infiltration de la plèvre médiastinale qui se prolonge par une infiltration de la plèvre postérieure ce qui classait la maladie en stade IIBbE.

La patiente a été donc traitée selon le protocole EURONET PHL C2 groupe TL3.

Elle a reçu 2 cures d'OEPA à partir de fin juin 2024. Le bilan de réévaluation à 2 cures a retrouvé une très bonne réponse partielle (supérieur à 35 %) sur le scanner ainsi qu'une réponse métabolique partielle sur le TEP scanner : fixation résiduelle au niveau du médiastin antérieur, l'atteinte pleurale a totalement régressé. (Score Deauville 4).

La chimiothérapie a donc été poursuivie comme prévu avec deux cures de DECOPDAC-21 et un nouveau bilan d'évaluation à 4 cures pour discuter l'indication ou non à une radiothérapie.

Figure 2 : Images TEP scanner de ré évaluation avant la radiothérapie datant de novembre 2024.

La nouvelle évaluation (TEP et scanner) au décours des quatre cures avait montré une poursuite de la très bonne réponse partielle sur le scanner avec tout de même la persistance d'une fixation résiduelle Deauville 4 au niveau du médiastin entourant une zone de nécrose.

Le dossier a été de nouveau rediscuté en RCP et la décision était de compléter par une radiothérapie protocolaire sur les lésions résiduelles à la dose de 28.8 Gy en 16 fractions de 1,8 Gy. Un nouveau TEP scanner a été réalisée en novembre 2024 avant de débuter la radiothérapie confirmant toujours cette fixation significative dans la loge médiastinale antérieure gauche, Deauville 4, d'allure tumorale.

Dans le but de minimiser au maximum les doses reçus par les organes à risquer (OAR) et donc les effets secondaires à long terme, la radiothérapie a été réalisée en inspiration bloquée aux protons. Le tableau 1 résume les doses reçues par les principaux organes à risques.

La Protonthérapie s'est terminée en janvier 2025 avec une excellente tolérance. Notre petite patiente est actuellement en cours de surveillance et en rémission complète de sa maladie.

Commentaires

La maladie de Hodgkin touche principalement les adolescents et jeunes adultes, avec une incidence faible chez l'enfant.

Avant les années 80, les traitements mis en place combinaient chimiothérapie intensive et radiothérapie étendue. Les taux de survie globale et de survie sans récidive étaient spectaculaires, en particulier dans les petits stades (supérieur à 90 %), mais les séquelles tardives étaient responsables d'une morbidité et une mortalité jugées inacceptables particulièrement dans la population pédiatrique.  En effet, plus de 50 % de la mortalité des enfants atteints d'une maladie de Hodgkin était liée aux séquelles tardives des traitements. Depuis, les stratégies pédiatriques visent à réduire la toxicité tout en maintenant de bons taux de survie. La réponse précoce à la chimiothérapie est un facteur pronostique clé, guidant cette désescalade thérapeutique.

Figure 3 : Planification de la radiothérapie aux Protons (coupes sagittale et coronale).

La radiothérapie si elle est indiquée a également largement évolué dans le temps avec une réduction des volumes irradiées et l'utilisation de techniques permettant de réduire au maximum les doses reçues par les organes à risque et donc les toxicités à long terme.

Références

1. Marie Emilie Dourthe et al., «  Recommandations de la SFCE pour la prise en charge du lymphome de Hodgkin nodulaire à prédominance lymphocytaire de l'enfant et de l'adolescent », Bulletin du Cancer 110, no 9 (1 septembre 2023): 968‑77, https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2023.03.006.

2. Mallorie B. Heneghan et al., «  The pediatric approach to Hodgkin lymphoma  », Hodgkin Lymphoma 61, no 4 (1 août 2024): 245‑52, https://doi.org/10.1053/j.seminhematol.2024.05.003.

3. Kevin C. Oeffinger et al., «  Impact of Risk-Adapted Therapy for Pediatric Hodgkin Lymphoma on Risk of LongTerm Morbidity: A Report From the Childhood Cancer Survivor Study  », Journal of Clinical Oncology 39, no 20 (10 juillet 2021): 2266‑75, https://doi.org/10.1200/JCO.20.01186.{\\i{}Journal of Clinical Oncology} 39, n\\super o\\nosupersub{} 20 (10 juillet 2021.

Dr Noura SELLAMI
Institut Gustave-Roussy – Villejuif

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