Beaucoup de patients rapportent une allergie lors d'un examen d'imagerie médicale avec utilisation d'un produit de contraste ou bien une allergie à « l'iode ». Les demandes d'examen radiologique demandent systématiquement ce type d'antécédent avec proposition de protocoles de « préparation » à base d'anti-histaminiques. Ainsi, la présence d'un médecin est toujours obligatoire en service d'imagerie lors de la réalisation d'examens dits « injectés ».
Mais qu'en est-il vraiment ? Peut-on être allergique aux produits de contraste ? Comment réagir face à un antécédent d'allergie ?
Les jeunes gériatres se sont penchés pour vous sur la question…
Mise au point
« Êtes-vous allergique à l'iode ? »
C'est la question à oublier !
L'iode est un élément chimique indispensable à la vie et au métabolisme. Il participe notamment à la synthèse des hormones thyroïdiennes. On le trouve également dans des produits alimentaires du quotidien comme le sel de table (iodé). Personne n'a jamais fait de réaction allergique au sel !
Il n'y a aucune relation directe avec une allergie aux produits de la mer (un allergène étant une protéine), ni avec la povidone iodée (l'allergène étant la povidone).
Il en sera de même pour les produits de contraste utilisés en imagerie médicale. Ce ne sont pas l'iode ou le gadolinium qui sont allergènes mais les ligands protéiques associés.
Définitions
Types de produits de contraste
Il existe deux types de produits de contrastes utilisés pour les examens radiologiques :
• Produits de contraste iodés (PCI), utilisés pour le scanner. L'iode a une forte opacité aux rayons X, ce qui les arrête et donne une hyperdensité (comme l'os) sur le scanner.
• Produits de contraste à base de gadolinium (PCG).
Types d'allergies
Tous les produits de contraste peuvent être à l'origine de réactions mineures ou parfois graves (choc anaphylactique) [1].
Il est tout d'abord nécessaire de différencier :
• Une réaction urticarienne par histamino-libération non spécifique (pouvant survenir pour n'importe quel produit) : elle est liée à la dégranulation des mastocytes et basophiles lors de l'injection de produit de contraste à forte osmolarité avec une injection rapide.
• Les allergies vraies, appelées aussi « réactions d'hypersensibilité immédiate », sont souvent imprévisibles et rares mais peuvent survenir immédiatement après l'injection. Ce sont des réactions d'hypersensibilité IgE-médiée d'apparition immédiate ou retardée. Elles peuvent se manifester par une urticaire, un œdème, une crise d'asthme, voire une réaction anaphylactique dans l'heure qui suit l'injection.
Une réaction allergique ne doit donc pas être confondue avec une réaction urticarienne non spécifique.
Prévalence
Les réactions allergiques vraies sont rares [2]. La prévalence de l'anaphylaxie est évaluée entre 0,01 % à 0,2 % des réactions pour les PCI et entre 0,07 % à 2,4 % pour les PCG. Des valeurs plus élevées étaient observées auparavant, dans les années 1980, en raison de l'utilisation de produits à forte osmolarité. Les produits actuellement utilisés sont des PCI à faible osmolarité comme l'iohexol et l'iodixanol.
Selon une étude multicentrique prospective nationale du Comité interdisciplinaire de recherche et de travail sur les agents de contraste en imagerie sur 245 cas d'hypersensibilité répertoriés en 5 ans, 20 % des 209 sujets réagissant aux produits de contraste iodés avaient une allergie immédiate, ainsi que les 27,8 % des 36 personnes réactives au gadolinium [3].
Le CIRTACI met à la disposition des médecins des fiches de recommandations sur les injections de produits de contrastes iodés et de gadolinium (allergies, posologie et mode d'emploi selon les indications, effets secondaires, etc.) [4].
Diagnostic
Pour poser le diagnostic de réaction allergique aux produits de contrastes, il est nécessaire de s'appuyer sur plusieurs arguments :
Interrogatoire/clinique : type de réaction, déroulement, chronologie. Plus la réaction est sévère, plus l'origine allergique est à évoquer.
Produit utilisé.
Dosage de la tryptase au moment de la réaction cutanée.
En cas de suspicion de réaction allergique aux PCI ou PCG, il est nécessaire de réaliser des test cutanés allergologiques pour discuter une alternative au produit de contraste incriminé.
Il s'agit de prick-tests du produit pur et d'intra dermoréactions (IDR) à différentes concentrations, idéalement réalisés entre 6 semaines et 6 mois post-réaction.
Les tests sont à faire le plus rapidement possible pour ne pas se retrouver démuni en cas de nécessité d'un nouvel examen avec injection.
Toute réaction liée à l'injection de produit de contraste doit faire l'objet d'une déclaration en pharmacovigilance sur le site de l'ANSM.
L'ANSM propose d'ailleurs un guide de bonnes pratiques sur les PDC et le risque allergène [5].
Bibliographie
1. Société française de Radiologie, Comité Interdisciplinaire de Recherche et de Travail sur les Agents de Contraste en Imagerie. Produits de contraste et Allergie : Hypersensibilité de type immédiat. 2009;1.
2. Bansie RD, Karim AF, van Maaren MS, Hermans MA, van Daele PL, Gerth van Wijk R, et al. Assessment of immediate and non-immediate hypersensitivity contrast reactions by skin tests and provocation tests: A review. Int J Immunopathol Pharmacol. 31 mai 2021;35:20587384211015061.
3. Clement O, Dewachter P, Mouton-Faivre C, Nevoret C, Guilloux L, Bloch Morot E, et al. Immediate Hypersensitivity to Contrast Agents: The French 5-year CIRTACI Study. EClinicalMedicine. juill 2018;1:51-61.
4. Produits de contraste IODES /GADOLINIUM – Dernières recommandations [Internet]. SFR. [cité 10 janv 2025]. Disponible sur: https://www.radiologie.fr/pratiques-professionnelles/sfr-actu/produits-contraste-iodes-gadolinium-dernieres recommandations.
5. Produits de contraste et risques de réactions d'hypersensibilité immédiate : l'ANSM rappelle les précautions à prendre [Internet]. ANSM. [cité 10 janv 2025]. Disponible sur: https://ansm.sante.fr/actualites/produits-de-contraste et-risques-de-reactions-dhypersensibilite-immediate-lansm-rappelle-les-precautions-a-prendre.
Rédaction
Dr Rafaelle ROTH
CCA Hôpital Broca APHP (gériatrie)
Relecture
Dr Florian MARONNAT
PHC au CHRU de Brest (gériatrie)
