
Généralités
La scoliose est une déformation du rachis dans les 3 plans de l’espace, non réductible (HAS, 2008). Elle concerne environ 3 % des adolescents de 10 à 18 ans, avec une nette prédominance féminine (ratio environ 3:1). (Meng ZD, 2017). La scoliose débute généralement en période pré-pubertaire et évolue jusqu’à maturation osseuse. Elle est souvent évoquée par le médecin traitant ou le pédiatre qui lors de l’examen clinique, constate une asymétrie du tronc, ou gibbosité, qui est en réalité l’expression clinique de la rotation des vertèbres autour de leur axe vertical. Une scoliose est dite « idiopathique » si aucune étiologie neurologique, neuromusculaire, congénitale ou syndromique n’est retrouvée (Bodman, 2017). C’est le cas dans 80 % des cas environ. A ce jour, la physiopathologie reste mal connue, en revanche nous savons qu’il existe une forte part génétique. La scoliose idiopathique est par définition indolore, mais peut évoluer à l’âge adulte vers des lombalgies, mais aussi un syndrome restrictif et un aspect inesthétique, qui peut altérer la qualité de vie des patients.
Diagnostic
Le diagnostic de scoliose est radio-clinique. On mesure l’angle de la courbure sur une radiographie du rachis entier, de face, en charge, avec un bassin équilibré. Si la courbure mesurée par l’angle de Cobb, est inférieure à 10°, on appelle cela une « attitude scoliotique », au-delà, il s’agit d’une scoliose. (Dunn J, 2018) La consultation débute par un interrogatoire complet, à la recherche d’antécédents familiaux de scoliose, mais aussi de signes évocateurs de scoliose secondaire (prématurité, retard de croissance, douleurs, retard de développement, etc.). La date des premières règles et le stade pubertaire de Tanner doit également être recherché (pilosité, développement mammaire/testiculaire), en effet, il n’y a quasiment plus de croissance significative du rachis environ 18 à 24 mois après la survenue des premières règles. Ainsi, il est important de réaliser un dépistage durant la période pubertaire car c’est à ce moment-là que le risque d’évolutivité est le plus important du fait d’une forte croissance rachidienne.
L’examen clinique du patient commence par une mesure de la taille debout et assise afin d’évaluer la croissance du tronc. Puis le médecin observe la statique globale du patient dans le plan frontal, chez un sujet en position anatomique de référence, à la recherche d’une asymétrie des épaules, un décollement des omoplates, une asymétrie du pli de taille et un déséquilibre du bassin (signe d’une probable inégalité de longueur des membres inférieurs) qu’il va alors falloir compenser afin d’équilibrer le bassin pour ne pas biaiser l’examen. A l’aide d’un fil à plomb, il mesure ensuite la gîte frontale : le fil mis en C7 doit passer par le pli interfessier, dans ce cas la gîte frontale est dite « équilibrée », à l’inverse elle peut être déviée vers la droite ou vers la gauche.
Le médecin évalue ensuite l’équilibre du rachis dans le plan sagittal et mesure les « flèches »: distance entre le fils à plomb et les vertèbres C7, T9, L3 et S1. Cela permet de repérer un excès de cyphose cervicale, lordose lombaire ou même dans de très rare cas une inversion de courbure.
Puis le médecin recherche une gibbosité, signe pathognomonique de la scoliose : le patient se penche en avant, jambes tendues, bras pendants et le médecin observe alors le rachis en vue tangentielle.
L’examen clinique comporte également un examen neurologique, ostéoarticulaire et cutané à la recherche d’une cause secondaire. En effet la scoliose dite idiopathique, comme évoqué ci-dessus, est la plus fréquente, mais cela reste un diagnostic d’élimination.
La radiographie
La radiographie permet de visualiser la rotation vertébrale, mesurer l’angle de Cobb, évaluer le stade de maturation osseuse grâce à l’indice de Risser et également d’éliminer une dystrophie rachidienne de croissance. L’angle de Cobb se mesure en traçant une parallèle au sommet de la vertèbre supérieure la plus inclinée et une parallèle à la base de la vertèbre inférieure la plus inclinée, l’angle formé par l’intersection des deux perpendiculaires à ces 2 parallèles est l’angle de Cobb.
Le test de Risser permet d’apprécier le degré de maturité osseuse au niveau des os des crêtes iliaques. En effet, le cartilage s’ossifie progressivement au cours de la croissance, de dehors en dedans. L’ossification commence à apparaître vers l’âge de 13 ans. Lorsqu’il se soude complètement à la crête, cela veut dire que la croissance est terminée et on ne pourra alors plus agir sur les déviations de la colonne vertébrale avec un corset.
Prise en charge
L’enjeu de la prise en charge est d’empêcher au maximum l’évolution de la scoliose. En effet, une scoliose une fois installée, est irréductible.
Il existe 3 principaux axes de traitement selon la SOSORT (The International Scientific Society on Scoliosis Orthopedic and Rehabilitation Treatment) (Meng ZD, 2017) : simple surveillance, port d’un corset ou traitement chirurgical, selon la sévérité de la scoliose :
- Surveillance radio-clinique tous les 6 mois si :
Scoliose < 20°.
Entre 20 et 25° si absence de critère d’évolutivité.
- Traitement orthopédique par corset :
Scoliose de plus de 25° ou si présence de critère d’évolutivité.
Scoliose de 40-50° : selon le type de courbure et le stade de maturité osseuse.
- Traitement chirurgical : il permet de réduire et de fixer la déformation dans les trois plans de l’espace, par instrumentation.
Scoliose de 40-50° : selon le type de courbure et le stade de maturité osseuse, après échec du traitement orthopédique.
Scoliose de plus de 50° : à discuter au cas par cas si chirurgie d’emblée ou traitement orthopédique en première intention.
Une scoliose est dite évolutive, si l’angle de Cobb s’est majoré de 5° entre de 2 radiographies à 6 mois (ou moins) d’intervalle. (HAS, 2008).
L’évolutivité d’une scoliose peut être estimée à l’aide de l’âge, l’indice de Risser et la croissance du rachis en cm/an, selon le diagramme de Duval Beaupère : A toutes ces mesures, s’ajoute l’apprentissage de règles hygiéno-diététiques du rachis, qui reste fondamental.
La kinésithérapie est aussi souvent associée au traitement orthopédique et chirurgical. Elle consiste à entretenir les amplitudes articulaires vertébrales et costo-vertébrales, renforcer les muscles érecteurs du rachis, entretenir la fonction respiratoire et travailler la statique vertébrale. Enfin, il n’existe aucune contre-indication au sport !
Suivi
En période de croissance, un suivi tous les 4 à 6 mois est recommandé afin de surveiller l’évolution et réévaluer périodiquement le projet thérapeutique, ses objectifs, évaluer la tolérance, l’observance du traitement orthopédique et le réadapter/renouveler si nécessaire. Ce suivi comporte une consultation avec réalisation d’un examen clinique complet, mesure de la taille et du poids, une radiographie de contrôle tous les 6 mois est recommandée pour suivre l’évolution de la scoliose. Afin de limiter l’irradiation, il est fortement recommandé d’utiliser le système EOS.
Conclusion
La scoliose idiopathique est une pathologie très fréquente, dont le dépistage durant l’adolescence est primordial afin de limiter son évolution et son retentissement sur la vie quotidienne à l’âge adulte.
Chloé PACTEAU
Article paru dans la revue “Association des Jeunes en Médecine Physique et de Réadaptation” / AJMER n°02

