Zoom sur l’e-santé en chirurgie

Publié le 15 Nov 2022 à 14:18

 

Quand tu ouvres le logiciel de gestion optimisée de tes rendez-vous ou encore quand tu te questionnes sur la bonne sauvegarde des comptes rendus de tes patients, tu te frottes déjà à l’e-santé. La santé numérique fait référence aux services de santé fournis grâce à internet ou à des technologies numériques (Eysenbach G, 2001). L’e-santé est « l’utilisation des technologies de l’information et de la communication pour la santé » selon l’OMS. En 2018 a lieu le virage numérique avec Ma Santé 2022 (Pon, septembre 2018), la constitution du « Health Data Hub » (Cuggia P, 2018) et le bilan des interactions entre numérique et santé au regard notamment des inégalités de santé, des données de santé, de la responsabilité juridique et du secret médical (CCNE, 2018). Aujourd’hui la notion de e-santé regroupe :
• Les systèmes d’informations hospitaliers (SIH) ;
• Les logiciels d’aide à la prescription ;
• Le dossier médical patient, l’e-learning ;
• Le Big Data (l’ensemble des données numériques produites par l’utilisation des nouvelles technologies à des sfins personnelles ou professionnelles) ;
• L’Internet grand public et la TéléSanté (Télémédecine et Santé mobile).

La Covid, un véritable accélérateur de la révolution numérique

87 % des médecins utilisent des outils digitaux (contre 79 %) avant la crise de la Covid-19 et 80 % des soignants déclarent ne plus pouvoir se passer d’outils digitaux dans leur pratique quotidienne (Baromètre réalisé par 360 medics en janvier 2021 sur 2400 personnels soignants). L’e-santé est en plein boom dans le monde entier (764 levées de fonds et 21,5 milliards de dollars en 2020 (StartUp Health). Aujourd’hui en France, on compte plus de 200 start-ups et entreprises de la e-santé en France. « Seules 5 % d’entre elles sont fondées par des médecins » (Digital Pharma Lab 2021).

Le projet Too Good To Learn

L’idée innovante de ce projet ? Un échange d’expertises : une formation aux outils de l’innovation Tech et une participation active au développement de projets concrets à impact en échange de votre avis d’expert médical, incontournable pour les start-ups en santé numérique.

Rejoignez le groupe Facebook Les Internes de la Tech. Vous avez le choix de la mission ou du stage en immersion dans des entreprises innovantes.

360 médics sur le smartphone des gynéco

L’association des gynécologues obstétriciens en formation (AGOF) a mis en place une « in app » sur l’application mobile « 360 medics ». Cette appli regroupe :
• Les différents scores utilisés en obstétrique (VSM, Manning, Bishop, ...) ;
• Les codes de la sécurité sociale (codes CCAM) pour coter vos actes ;
• Les classifications des cancers et des myomes ;
• Des modèles de comptes-rendus opératoires types ;
• Les calculs biométriques personnalisés selon EPOPE ;
• Les recommandations pour la pratique clinique (RPC) du CNGOF classées par thèmes (sur leur site, elles sont classées par années). Cette application est personnalisable et évolutive car toute optimisation suggérée est prise en compte puis développée.

 Les Podc’AFUF

’Association des urologues en formation (AFUF) propose sur la toile des podcasts sur toutes les thématiques de l’urologie. Les épisodes sont disponibles sur deezer, spotify et apple. La publication est hebdomadaire avec entre deux et trois nouveaux épisodes chaque semaine. Le format est volontairement court (7 minutes) et pose des questions spécifiques pour concentrer l’information et ne pas perdre les auditeurs. Les podcasts sont réalisés par des experts de chaque domaine de l’urologie. Les thématiques sont aussi variées depuis le diagnostic ou le dépistage jusqu’au traitement des pathologies ainsi que le récapitulatif des derniers congrès, l’analyse de certaines publications internationales majeures ou des conseils de rédaction, et des thématiques dites environnementales (« Être une femme urologue », « L’installation en clinique privée », « Comment concilier la vie d’interne d’urologie et la parentalité »).

Il y a maintenant une centaine d’épisodes disponibles et il est prévu de poursuivre l’aventure pour de nombreux autres épisodes. Pour la réalisation des épisodes, nous avons été accompagnés par le studio « la Toile sur écoute » qui s’occupe de l’enregistrement et de la mise en ligne. Le succès a été franc avec plus de dizaines de milliers d’écoute sur les différents canaux.

La modélisation 3D et la réalité augmentée au service de la chirurgie pédiatrique

  • Kassir, T. Blanc, A. Lubet, G. La Barbera, E. Bonnot, A. Delmonte, I. Bloch, S. Sarnacki
  • L’imagerie médicale est un élément essentiel d’aide au diagnostic et à la décision thérapeutique. Alors que les radiologues ont souvent la faculté de se représenter en 3D les images en coupes fournies par le scanner et l’IRM, cette simulation cognitive est beaucoup plus difficile à réaliser pour le chirurgien qui est pourtant celui qui sera confronté à la réalité anatomique. Les progrès dans le traitement des images médicales permettent aujourd’hui de proposer des modèles 3D spécifiques du patient. Ces modèles 3D sont construits à partir des segmentations des images réalisées manuellement ou à l’aide de logiciels intégrant la reconnaissance automatique d’organes spécifiques (3D Slicer, Myrian Studio, ITK-SNAP...). Les techniques d’intelligence artificielle reposant sur un apprentissage par réseaux neuronaux profonds permettent aujourd’hui, lorsqu’elles sont appliquées au traitement d’images, d’obtenir une segmentation quasi-automatique. Ces modèles n’intègrent pas l’imagerie des nerfs dont la visualisation peut être très utile dans des localisations particulièrement complexes dont les lésions sont lourdes de conséquences fonctionnelles, comme le pelvis.

    Les maladies génétiques, développementales et oncologiques pédiatriques n’ont pas bénéficié de cette simulation avancée, de l’assistance informatique et de l’automatisation. Ceci est dommageable, car la population pédiatrique nécessite une attention particulière en raison de la spécificité des pathologies concernées (malformations et tumeurs) et de l’importance d’une chirurgie de précision chez des individus en croissance dont les séquelles auront un impact à très long terme.

    L’équipe multidisciplinaire IMAG2 (http://www.imag2.org/) sous la direction du Professeur Sabine Sarnacki et du Pr Isabelle Bloch au sein de l’Institut Hospitalo-Universitaire (IHU) Imagine, associe les compétences des chirurgiens du service de chirurgie pédiatrique viscérale et urologique de l’hôpital Necker-enfants malades, de radiologues pédiatres et de chercheurs en traitement d’images médicales du LTCI à Télécom Paris et du LIP6 à Sorbonne Université. L’équipe travaille sur la modélisation 3D du pelvis et des reins, à partir des images obtenues en IRM et/ou Scanner. Pour le pelvis, l’IRM a été choisie en raison de son caractère non irradiant, particulièrement souhaitable chez l’enfant et parce qu’elle offre des séquences spécifiques permettant d’obtenir une image fonctionnelle ou la visualisation spécifique * Jeanne Goulin, Pierre Meignan, Thomas Blanc, Alessandro Delmonte, Quoc Peyrot, et al. Introduction of 3D Modeling and Peripheral Nerve Tractography in the Management of Pelvic Tumors. 52th Congress of the International Society of Paediatric Oncology (SIOP), 2020, (virtual), France. de certaines structures. C’est le cas des séquences de diffusion (IRMd) qui permettent, à l’aide d’algorithmes de tractographie, de visualiser les fibres nerveuses et d’analyser ainsi leurs aspects pathologiques pouvant être liés à la désorganisation de leurs réseaux par des malformations ou par la chirurgie.

    Grâce à un protocole de recherche (n° 2015-A01705-44), une bibliothèque d’images issues de patients porteurs de tumeurs et malformations pelviennes et rénales a été constituée et des segmentations manuelles ont été réalisées pour tous ces patients. Cette approche a permis de développer des outils de segmentation basés sur l’intelligence artificielle permettant d’obtenir une modélisation 3D des os, de la vessie, du colon, de l’appareil génital, des vaisseaux, du plexus lombosacré et des reins de manière quasi automatique et donc compatible avec une utilisation en routine.

    L’équipe de chirurgie pédiatrique de l’hôpital Necker Enfants Malades développe un programme de chirurgie robotique assez unique en Europe, sous la responsabilité du Pr Thomas Blanc, avec aujourd’hui plus de 500 patients opérés. Les indications sont variées avec 1/3 d’urologie, 1/3 de chirurgie générale et digestive et 1/3 de résection tumorale. Cette équipe a pu tester la pertinence de cette représentation 3D spécifique du patient en pré-opératoire pour la préparation de la stratégie chirurgicale et en per-opératoire après intégration du modèle dans la console de visualisation du robot. L’évaluation a été globalement très positive*.

    Le laboratoire IMAG2 souhaite étendre la diffusion de son produit à d’autres indications chez l’adulte. Des collaborations sont en cours avec les radiologues et chirurgiens de l’endométriose où la technologie de tractographie nerveuse intégrée dans le modèle 3D pelvien pourrait être contributive.

    Enfin, à côté de l’apport de cette anatomie computationnelle à la chirurgie et de manière plus générale, à tous les actes interventionnels, c’est un outil de communication avec les patients et les familles, lisible et immédiatement compréhensible et de formation pour les médecins et chirurgiens.

    Exemple 1 : Imagerie d’un néphroblastome bilatéral en trois dimensions chez un garçon de 20 mois, obtenue à partir d’un Scanner biphasique de manière semi-automatique grâce à des procédures reposant sur l’intelligence artificielle.

    Exemple 2 : Imagerie d’un neurofibrome pelvien en trois dimensions intégrant l’imagerie des nerfs chez une fille de 10 ans, obtenue à partir d’une IRM 3 tesla de manière semi-automatique grâce à des procédures reposant sur l’intelligence artificielle. Le modèle 3D est intégré directement à la console du robot pour une chirurgie guidée par l’image.

    Thomas Gregory : le chirurgien augmenté en 3 dates

    Opérer avec un casque de réalité mixte vissé au crâne ? C’est la prouesse de Thomas Grégory, chef du service de chirurgie orthopédique & traumatologique à l’hôpital universitaire Avicenne AP-HP et Pr de chirurgie orthopédique et traumatologique à l’université Sorbonne Paris Nord. 1 Le 5 décembre 2017, Thomas Gregory réalise la première opération au monde assistée d ́un casque de réalité mixte. Celui-ci projette en temps réel les modélisations 3D du squelette de la patiente pour la pose d’une prothèse d’épaule. 2 Le 10 Février 2021, 15 chirurgiens orthopédiques, formés et accompagnés à la réalitémixte, ont mené des interventions assistées par HoloLens 2 dans 13 pays, avec un pilotage depuis l’hôpital Avicenne AP-HP par Thomas Gregory1. Equipés des lunettes HoloLens 2, les chirurgiens de chaque pays ont pu :
    • Visualiser en hologramme, manipuler et planifier le déroulement du programme opératoire ;
    • Partager, en temps réel, leur champ de vision avec leurs confrères à distance et bénéficier ainsi de leur expertise sur les différents cas cliniques ;
    • Former à distance leurs confrères en leur apportant un enrichissement aux pratiques chirurgicales.

    3 À 45 ans, Thomas Gregory a reçu les honneurs de l’Ordre national du mérite pour ses travaux sur la chirurgie augmentée en mai 2021. Thomas Gregory dirige aussi Moveo, un centre d’IA en chirurgie au sein de LaMSN de l’université Sorbonne Paris Nord. Moveo procède au traitement des grandes masses de données chirurgicales collectées à partir des Hololens pour nourrir en fl ux les algorithmes d’IA et proposer ainsi des recommandations en temps réel aux chirurgiens afin de sécuriser leurs interventions.

    Article paru dans la revue “ Les Jeunes Chirurgiens” / CNJC n°1

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