Actualités : Un DUMG dans la tourmente…

Publié le 07 Feb 2025 à 15:19
Article paru dans la revue « ISNAR - L'antidote . » / L'ANTIDOTE N°41


Allô maman ? Mon DUMG démissionne !

Tours, 24 Janvier 2024, tous·tes les internes de Médecine Générale de
Région Centre-Val-de-Loire (CVL) reçoivent un mail du Département
Universitaire de Médecine Générale (DUMG).
Tous·tes ?

Oui, tous·tes.
Mais que nous dit ce mail ?

“Chers étudiants, Le 3 septembre 2023, nous alertions vos représentants sur nos capacités limitées d'encadrement des étudiants en formation de médecine générale dans la Région Centre-Val de Loire [...] Aujourd'hui, nous n'avons toujours pas obtenu les moyens dédiés à la médecine générale. [...] En conséquence, le bureau du DUMG a décidé de dissoudre la commission de coordination locale du DES de médecine générale”.

Mais comment en sommes-nous arrivé·es là ?

Remontons le temps…

Au début de l'été 2023, le DUMG alertait l'Agence Régionale. de Santé (ARS) qu'au vu de l'augmentation du nombre d'internes sur les dernières années, iels n'étaient pas certain·es de pouvoir fournir un stage femme-enfant à tous·tes les internes de la promotion ECNi 2022 et qu'iels ne pourraient pas continuer à former correctement les internes si notre nombre continuait à augmenter ainsi. La Pr DIBAO-DINA, Coordonnatrice régionale du DUMG, nous apprenait alors qu'en plus de la 4e année à préparer pour la promotion ECNnf 2023, le DUMG perdait cette année deux enseignants, n'avait pas accès à suffisamment de  salles pour fournir des enseignements de qualité et se voyait en incapacité de faire passer les thèses à tous·tes leurs internes en temps utile.

Leur demande officielle auprès de l'ARS : ne surtout pas augmenter le nombre d'internes pour la promotion ECNnf 2023 au-delà de 120, signataires d'un Contrat d'Engagement de Service Public (CESP) inclues.

En juin 2024, suite à la réunion de l'Observatoire National de la Démographie des Professions de Santé (ONDPS), nous apprenions que cette demande n'avait pas été entendue et que la région Centre serait pourvue de 142 internes de Médecine Générale, soit une vingtaine de postes en Médecine Générale de plus.

En Ile-de-France, l'homologue de la Professeure DIBAO-DINA rencontrait la même problématique. Un courrier adressé aux internes les avertissait de la situation et décourageait ces dernier·ères de choisir ces subdivisions si leur classement était supérieur à 110e, car il n'y avait aucune certitude sur la possibilité de suivre leur maquette de stage, le nombre de places par stage étant trop limité. Vous vous en rappelez peut-être ??? Ça avait fait pas mal de bruit dans la presse à ce moment-là !

Le DUMG a ensuite saisi la Direction Générale de l'Offre de Soins (DGOS) afin de comprendre pourquoi leurs retours sur les capacités de formations des internes n'avaient pas été écoutés. La réponse de la DGOS ?

L'ARS Centre-Val de Loire ne leur aurait jamais fait part des difficultés de formation dans la région.
Dans le même temps, des tensions grandissaient avec l'ARS qui reprochait au DUMG “de jouer contre le territoire”. En effet, ces dernier·ères seraient responsables d'un mauvais maillage territorial des terrains de stage ambulatoire dans la région à l'issue des choix de stage pour l'été 2023. La Professeure DIBAO-DINA nous rappelle que les ouvertures de postes d'un stage sont discutées en commissions et validées par l'ARS. Le Syndicat des Internes de Centre-Val de Loire (SICVL) et le DUMG n'ayant qu'un rôle de conseil dans ces commissions. Le DUMG, qui propose les stages ambulatoires en fonction du nombre de Maîtres de Stage Universitaires (MSU) disponibles dans chaque département, ne comprend donc pas ce reproche, d'autant plus que devant les difficultés à recruter de nouveaux·elles MSU, iels cherchent à ouvrir le plus de postes possible.

En décembre 2023, la directrice de la Coordination locale du DES de Médecine Générale, la Docteure Cécile Renoux, bien que manquant de MSU, aurait refusé l'intégration de nouveaux·elles MSU formé·es suite à la loi dite Valletoux de janvier 2023.
Était-ce une réelle volonté de “jouer contre le territoire” comme lui a reproché la DGOS ?Rappelons que les internes ne sont pas une variable d'ajustement… Bien sûr…

Cette décision a été prise devant le constat que ces MSU s'étaient formé·es sans prendre connaissance de la Charte des MSU de Médecine Générale signée par l'ISNAR-IMG, le Collège National des Généralistes Enseignants (CNGE) et la Conférence des Doyens des facultés de Médecine. C'est devant l'incertitude de pouvoir assurer une formation de qualité aux nouvelles·aux internes et avec l'idée de ne mettre en danger ni les internes ni les patient·es que la directrice de la coordination local avait conseillé à ces MSU de se faire former par le CNGE avant de commencer à recevoir des internes.

La DGOS a alors insisté par mail pour que la loi soit appliquée sans prendre en compte les conseils du DUMG.

Nous insistons sur le mot “conseil” car encore une fois, la décision finale était du ressort du doyen de la faculté de Médecine et de l'ARS.
Devant l'absence de réponses concernant leurs problématiques sur l'incapacité de formation des internes, devant le manque de soutien de la faculté dans ce contexte, et devant la charge de la responsabilité des dernières difficultés relatées, le 24 janvier 2024, la commission de coordination locale du DES de Médecine Générale à annoncé sa dissolution.

… Tiens tiens… dissolution en janvier 2024, on est précurseur·euses à Tours…

Sans cette commission, c'est la validation des DES de tous·tes nos camarades tourangelles·aux qui était remise en question. Heureusement, le 13 juin 2024 se tenait la deuxième Journée Universitaire de Médecine Générale, où ce sujet fut abordé au cours d'une table ronde réunissant le Professeur ANGOULVANT (doyen nouvellement élu de la fac de médecine de Tours), Madame Clara DE BORD (Directrice Générale de l'ARS CVL), la Professeure DIBAO-DINA ainsi qu'un représentant des internes de la région en ma personne.

La Professeur DIBAO-DINA fit un exposé des besoins du DUMG sur le plan financier, logistique et humain avec par exemple la nécessité d'un équivalent temps plein supplémentaire à long terme pour assurer le secrétariat devant la forte affluence d'internes. Madame DE BORD trouvait “ridicule” cette dissolution et les demandes en lien. Cette dernière proposait un équivalent temps plein pour 3 ans en comptant sur des financements de la faculté par la suite.

Le Professeur ANGOULVANT s'est engagé à trouver les salles nécessaires à la bonne tenue des enseignements et à monter un groupe de travail pour répondre à la problématique du nombre trop important de thèses à faire passer.

Pour ma part, je rappellais l'inquiétude de mes camarades qui, dans ce contexte, n'étaient pas certaines de valider leurs DES, remettant en cause leurs projets d'avenir et d'installation à court terme et donc d'accès aux soins sur le territoire.

Après les discussions de cette journée et le compromis ainsi trouvé le 16 septembre 2024, la coordination locale du DES de Médecine Générale s'est reformée.
Ouf… on a eu chaud les Tourangelles·aux !

Encore une belle illustration que, selon les besoins, nous, les internes, sommes considéré·es comme des variables d'ajustement du système de soin pour pallier le désinvestissement financier dans le secteur de la santé.

Publié le 1738937941000