Actualités : Quizz ECG : palpitations et dyspnée chez un patient de 17 ans

Publié le 24 mai 2022 à 11:22

Quel(s) diagnostic(s) évoquez-vous ?

Interprétation

  • On observe une tachycardie régulière à QRS fins, non sinusale : on s’oriente donc vers une tachycardie supra-ventriculaire.
  • On peut visualiser des ondes P négatives dans les dérivations inférieures, avec une relation atrioventriculaire 1:1 et un intervalle RP’ long. Ces ondes P sont négatives dans les dérivations inférieures et peuvent ainsi correspondre à une activation rétrograde de l’oreillette ou à une activité atriale naissant de la partie basse de l’oreillette.

Trois diagnostics peuvent donc être évoqués :
1) Une tachycardie réentrante orthodromique utilisant une voie accessoire à conduction rétrograde lente (descente par la voie nodohisienne et remontée par une voie accessoire à conduction lente expliquant l’intervalle RP’ long).
2) Une tachycardie par réentrée nodale atypique « Fast–Slow » (descente par la voie rapide et réentrée par la voie lente du NAV ce qui explique le délai RP > PR).
3) Une tachycardie atriale naissant de la partie basse de l’oreillette.

Il s’agissait dans ce cas d’une tachycardie orthodromique utilisant une voie accessoire à conduction rétrograde lente et décrementielle appelée tachycardie jonctionnelle permanente réciproque (PJRT en anglais).

Focus : tachycardie jonctionnelle permanente réciproque

  • Diagnostic rare, plus fréquent proportionnellement chez les enfants (1 % des tachycardies supra-ventriculaires de l’enfant).
  • Il s’agit d’une tachycardie réciproque utilisant une voie accessoire qui ne conduit que de façon rétrograde (voie accessoire cachée), lente, et souvent décrémentielle.
  • Dans la majorité des cas, cette voie accessoire est située à la partie postéro-septale de l’anneau tricuspide, à proximité de l’ostium du sinus coronaire.
  • Comme dans les autres tachycardies jonctionnelles, les manoeuvres vagales ou l’ATP peuvent interrompre la tachycardie en bloquant transitoirement la conduction dans le noeud atrio-ventriculaire, ou dans la voie accessoire. Toutefois, la PJRT a la particularité d’être souvent incessante, ce qui est lié aux propriétés décrementielles de la conduction rétrograde.
  • Le caractère permanent de cette tachycardie, souvent asymptomatique et évoluant à bas bruit chez les enfants, expose à un risque de tachycardiomyopathie.
  • Le contrôle du rythme est difficile sous anti-arythmique. L’ablation par radiofréquence est très efficace mais doit prendre en compte la proximité avec l’artère circonflexe en cas de localisation postéroseptale.

Notions de voie accessoire cachée / masquée
Une voie accessoire n’est pas toujours visible sur l’ECG de surface sous la forme d’une pré-excitation ventriculaire. Il existe alors deux possibilités :

  • La voie accessoire conduit uniquement de façon rétrograde : on parle alors de voie accessoire cachée.
  • La voie accessoire est perméable dans le sens antérograde mais la pré-excitation n’est pas ou peu visible sur l’ECG de surface. Dans ce cas, la réalisation de manoeuvres vagales tel qu’un massage sino-carotidien permet de « démasquer » la voie accessoire (en ralentissant la conduction dans le noeud atrio-ventriculaire). On parle alors de voie accessoire masquée.

Article paru dans la revue “Collèges des Cardiologues en Formation” / CCF N°4

Publié le 1653384123000