
Master 2
Le « Master 2 recherche » au sein de l'internat de médecine
La réalisation d'un master 2 recherche au sein de l'internat représente une première ouverture vers le monde de la recherche, partie inerrante et intriquée à la pratique de la médecine. Cette année peut se réaliser à partir du 4ème semestre de l'internat, bien qu'elle soit la plupart du temps réalisée en fin de cursus. Il existe une multitude de master 2 disponibles et accessibles aux internes, certains débutent en novembre, se greffant sur nos semestres. Le Master 2 peut se réaliser dans n'importe quelle faculté française.
Bourses
Avant d'envisager une inscription je vous invite à penser à votre financement. Plusieurs financements existent : celle de votre faculté (année recherche) et les bourses privées auxquelles vous pouvez prétendre en fonction du sujet de vos travaux. L'année recherche vous permet de garder votre statut étudiant au sein de votre faculté d'origine et de recevoir un salaire mensuel équivalent à la moyenne de ceux de 2ème et 3ème années d'internat soit une rémunération brut annuelle d'environ 25 000 €. Il est possible de prendre des gardes au sein du CHU d'origine.
Comment s'y inscrire ?
Pour prétendre à l'année recherche (ou autre bourse privée, la démarche étant similaire), un dossier est à monter avec votre futur responsable de projet de recherche. Ce dossier est disponible sur le site de votre faculté d'origine et est composé :
• D'une lettre de motivation, expliquant rapidement votre parcours et comment s'intègre le projet de recherche dans votre cursus ;
• D'un curriculum vitae ;
• De la description du projet de recherche proposé par votre encadrant ;
• De l'organigramme du laboratoire d'accueil ;
• Du curriculum vitae de votre encadrant ;
• D'une attestation de validation de Master 1 recherche.
Les dossiers d'année-recherche sont à déposer auprès de votre université d'origine souvent avant fin mai. La qualité du projet de recherche détermine l'attribution des années-recherche évaluée par une commission de sélection. Un nombre limite est déterminé tous les ans, indépendamment pour chaque ville.
Tous les candidats à l'année recherche devront solliciter une demande de mise en disponibilité auprès de la direction des affaires médicales de son CHU, effective qu'en cas d'obtention de cette année recherche. À savoir que cette disponibilité « pour des raisons de recherche » ne vous empêchera pas de prendre une disponibilité « pour convenance personnelle » par la suite.
Mon avis personnel sur le master 2
J'ai choisi un sujet de projet d'oncologie thoracique, ma formation de pneumologie étant à dominance oncologique, avec la réalisation de la FST. Mon envie de réaliser cette année a été le fruit de plusieurs motivations : découvrir le monde de la recherche et ne pas me fermer de porte pour plus tard, approcher au mieux le côté fondamental de l'oncologie thoracique afin d'être plus à l'aise sur les molécules déjà sur le marché et celles des essais cliniques ou en développement, afin de mieux comprendre leur fonction et, une année un peu césure au sein de cet internat. Faire un Master 2 ne vous engage en rien à la réalisation d'une thèse de recherche (seulement 20 % de ma promotion y prétend). En revanche, il est certain que pour l'obtention d'un clinicat, il est parfois judicieux d'avoir fait un master 2 en fonction des régions.
Voyez plutôt cette année comme une année où vous pouvez approfondir un sujet, cultiver une ouverture d'esprit et retrouver un rythme de vie plus souple que l'internat, qui ne vous engage en rien pour la suite.
Pour ma part j'ai réalisé le master 2 « Parcours innovation en santé » au sein de la faculté de Bordeaux. Mon année a été scindée en deux : une première partie de cours théorique divisée en deux « semestres » (novembre/décembre socle commun immunologie fondamentale puis janvier/février immuno-oncologie), et une deuxième partie au sein du laboratoire de recherche ImmunoConcEpT spécialisé en partie en recherche immuno-oncologie sous la supervision du Docteur Charlotte Domblides, MCU-PH en oncologie médicale. Voici une présentation vulgarisée de mon projet de recherche afi n de vous donner une idée de ce que nous faisons au sein d'un laboratoire de recherche. En amont de la réalisation des expérimentations, un travail de recherche bibliographique est à réaliser et tout au long de votre projet. Les résultats de nos recherches ne sont pas présentés ci-dessous par soucis de place.
Présentation d'un projet de recherche
Caractérisation des interactions entre cellules du microenvironnement tumoral et cellules tumorales, et impact sur l'échappement immunitaire dans le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC)
Le microenvironnement tumoral (MET) est un écosystème complexe composé de différentes cellules malignes, immunitaires et stromales (Figure 1).
Au sein des cellules pro-tumorales induites par l'immunosubversion (induction par les cellules tumorales de cellules pro-tumorales favorables à sa survie via des modifications du microenvironnement), on distingue les fibroblastes associés au cancer (CAF) (1), qui sont les cellules stromales les plus importantes du CBNPC, et les cellules immunitaires pro-tumorales notamment les lymphocytes T régulateurs (Treg) et cellules immunosuppressives dérivées des myéloïdes (MDSC) (2).

Figure 1 : Représentation schématique du microenvironnement tumoral. Fonctions immunosuppressives des cellules le composant. Crée à partir de Biorender.
Ces cellules jouent un rôle crucial dans l'établissement d'un environnement tumoral immunosuppressif. L'efficacité des immunothérapies a permis de mettre en lumière la cible thérapeutique que représente le MET. Par conséquent, une compréhension globale de la façon dont les cellules du MET sont impliquées dans l'immunité protectrice de la tumeur par rapport à son évasion immunitaire est nécessaire dans le CBNPC, où les traitements par immunothérapie occupent une place prépondérante dans l'arsenal thérapeutique et où la littérature reste limitée. Ainsi, nous émettons l'hypothèse que les MDSC, les Treg et les CAF pourraient contribuer à promouvoir la formation de cellules souches cancéreuses (CSC). Ce sont des cellules capables d'un auto-renouvellement et responsables de l'hétérogénéité tumorale participant ainsi à la résistance aux traitements actuels (3). De plus les MDSC et les Treg pourraient favoriser la génération de CAF aux propriétés pro-tumorales. Notre objectif est donc d'explorer les interactions entre MDSC, Treg et CAF, et cellules cancéreuses afin d'identifier des cibles thérapeutiques potentielles pour diminuer l'environnement immunosuppresseur et ainsi améliorer les réponses aux immunothérapies.
Objectif 1 : Impact des MDSC, Treg et CAF sur le caractère tumoral souche
Pour répondre à cet objectif, nous avons surtout exploité les techniques de cultures cellulaires, en isolant à partir de sang de donneur sain, nos cellules d'intérêts et en les différenciant avec des cytokines.
D'autres mécanismes impliqués dans l'induction du caractère souche (comme l'implication du TGFβ) ont été étudiés (non présentés ici). Des expériences similaires ont été réalisées après génération de Treg.

Figure 2 : Représentation schématique de la génération de HuMoSC (modèle in vitro MDSC). Après isolation des monocytes chez des donneurs sains et stimulation par IL-6 et GM-CSF, les HuMoSC sont mis en sphère en présence des Sk-Mes 1 (lignée de cancer du poumon). Crée à partir de Biorender.
Objectif 2 : Interactions entre MDSC, Treg et fibroblastes dans un modèle 2D
De la même manière nous avons différencié in vitro nos cellules d'intérêt à partir de donneur sain et réalisé cette fois-ci des cocultures entre cellules polarisées (immunosuppressives) et cellules non polarisées afin d'observer des interactions réciproques entre ces cellules. Leur phénotype était étudié en cytométrie en flux et leur fonction immunosuppressive par leur capacité à inhiber la prolifération de lymphocytes T activés stimulés in vitro.
Ci-dessous représentés (Figure 3), deux types de cellules immunosuppressives immunitaires (MDSC et Treg) mis en coculture avec des cellules non polarisées (fibroblastes) pour étudier leur capacité à induire ou non des CAF immunosuppressifs, appuyant sur les interactions réciproques du MET et leur rôle de créer un environnement propice au développement tumoral.

Figure 3 : Représentation schématique de la génération de Treg et de HuMoSC in vitro et mise en coculture avec des fibroblastes. Analyse de la polarisation de ces cellules en CAF sur un marqueur de différenciation de surface (CD10). Crée à partir de Biorender.
Objectif 3 : Interactions entre MDSC, Treg et fibroblastes dans un modèle 3D
Notre objectif étant de créer un modèle plus proche des conditions physiologiques et plus représentatif des interactions cellulaires réelles, nous avons cherché à optimiser un modèle 3D basé sur la technologie des capsules d'alginate. Le système de culture 3D est basé sur la technologie de l'encapsulation cellulaire, qui permet une croissance cellulaire au sein de microsphères d'alginate perméables et élastiques reproduisant plus fidèlement les conditions d'interaction entre les cellules immunitaires et le stroma.

Figure 4 : Capsules d'alginate avec au sein des LT stimulés à J0 de l'encapsulation (grossissement x 100).

Anne-Claire TOUBLANC
Interne de pneumologie au CHU de Bordeaux
Relecture
Dr Charlotte DOMBLIDES MCU-PH
oncologie médicale
CHU de Bordeaux
Bibliographie
1. Liao Z, Tan ZW, Zhu P, Tan NS. Cancer-associated fibroblasts in tumor microenvironment - Accomplices in tumor malignancy. Cell Immunol. sept 2019;343:103729.
2. Gabrilovich DI, Nagaraj S. Myeloid-derived suppressor cells as regulators of the immune system. Nat Rev Immunol. mars 2009;9(3):162-74.
3 Jordan CT, Guzman ML, Noble M. Cancer Stem Cells. N Engl J Med. 21 sept 2006;355(12):1253-61.
4. Janikashvili N, Trad M, Gautheron A, Samson M, Lamarthée B, Bonnefoy F, et al. Human monocyte-derived suppressor cells control graft-versus-host disease by inducing regulatory forkhead box protein 3-positive CD8+ T lymphocytes. J Allergy Clin Immunol. juin 2015;135(6):1614-1624.e4.
5. Cords L, Engler S, Haberecker M, Rüschoff JH, Moch H, De Souza N, et al. Cancer-associated fi broblast phenotypes are associated with patient outcome in non-small cell lung cancer. Cancer Cell. mars 2024;42(3):396-412.e5.

