Gisèle Apter, Laure Angladette, Anne-Sophie Pernel, Bertrand Welniarz, Fabienne Roos-Weil
Face à toutes les catastrophes annoncées et aux vagues si ce n’est tsunamis des urgences depuis que sévit la pandémie, comme pour l’hôpital dans son ensemble, la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent n’est pas épargnée. Les urgences de pédiatrie et parfois de psychiatrie d’adulte quand celles-ci, faute d’urgences en PEA, accueillent des mineurs, sont envahies de jeunes avec idéations suicidaires, passages à l’acte et crises clastiques. Comme si la pandémie avait été le révélateur, voire le détonateur, de la mise en évidence des troubles des générations montantes ?
Nos services sont saturés de manière tout à fait manifeste, sans même rentrer dans le débat de savoir si cela révèle de troubles psychiatriques et/ou des difficultés moins sévères. La SIP et les autres associations membres de la FFP ont fait le même constat. Trop d’enfants et d’adolescents sont malmenés, maltraités ou décédés depuis deux ans.
Demain nos organisations de soins continueront d’être mises à rude épreuve, ce d’autant que non seulement les médecins sont rares mais que parmi tous ceux avec lesquels nous travaillons, sans lesquels la notion d’équipe pluriprofessionnelle ne peut exister, il y a trop peu de nouveaux professionnels, trop peu sont présents à l’hôpital, dans les établissements de santé, quel que soit leur « genre ».
Nous sommes ingénieux, nous nous réorganisons, nous inventons, nous regroupons, nous dispatchons, nous sommes mobiles, nous continuons de poursuivre tout ce que le travail collégial offre et offrira pour le soin à venir. La SIP continue une activité scientifique en direction de toutes les options de la Psychiatrie. Désormais avec la nouvelle maquette, la psychiatrie de l’enfant est autonome en phase socle, à part égale avec la psychiatrie de l’adulte. Dans le OÙ EN EST LA PSYCHIATRIE DE L’ENFANT ET DE L’ADOLESCENT À CE JOUR ? QUI PEUT LE DIRE ? Gisèle Apter, Laure Angladette, Anne-Sophie Pernel, Bertrand Welniarz, Fabienne Roos-Weil cadre des journées du ministère, nous avons, avec les associations de la FFP strictement PEA (API, FDCMPP et SFPEADA), montré que la représentation dans le service public de la PEA est majeure et que la psychiatrie publique soutient ses deux composantes, la PA et la PEA.
L’activité internationale reprend timidement en présentiel, avec la participation aux colloques de la WPA, de l’EPA, et de l’APA et au national avec nos collègues de la SFPEADA.
Les besoins en PEA sont soulignés comme une urgence à ce jour dans de nombreux pays. Enfin, la maltraitance, la carence et la négligence, que depuis des années la SIP considère comme des priorités grâce au travail de Nicole Garret et d’Anne Sophie Pernel notamment, sont reconnues comme des problématiques majeures.
Nous ne sommes pas en reste non plus sur les pratiques, le manuel des pratiques intégratives, co-écrit par Maria Squillante, Nicole Garret, et Fabienne Roos-Weil est paru en février 2022. Il doit permettre de faire connaître la recherche formidable EPIGRAM, menée entre 2017 et 2019, avec l’objectif d’évaluer les effets des pratiques intégratives et dont les résultats sont progressivement publiés. Le manuel donnera lieu à des formations sur toute la France.
Il nous faut continuer de soutenir une réflexion sur l’organisation des soins demain car si chacun reconnaît aujourd’hui qu’un enfant sur 5 aurait des besoins de soins, on le voit bien, nous sommes limités dans nos possibilités ; la création des MDA, il y a plus de 20 ans maintenant, a bien montré la nécessité de prendre en compte l’adolescent comme une seule et unique personne autour de laquelle s’articuleraient les prises en charge somatiques et psychiques. Sauf que cela ne résout pas la problématique de soins psychiatriques indispensables en urgence comme au long cours, les hospitalisations comme les services urgences portes et les soins intensifs pour les troubles sévères (TCA mais aussi transition et Unités d’Hospitalisation Régionales) manquent cruellement. Pour les enfants plus jeunes, de même, pas d’urgences, trop peu voire aucun lit d’hospitalisation et encore trop peu d’organisations conjointes notamment avec la pédiatrie et les services de protection de l’enfance.
Pour la périnatalité, l’offre est là encore soulignée comme indispensable et prioritaire par les 1000 jours. Les moyens proposés sont 10 fois inférieurs aux besoins si l’on en croit l’analyse médico-économique de nos amis britanniques. Et pour le moment, seul le ou les parents est/sont véritablement l’objet d’attention, les enfants des personnes présentant des troubles psychiques sévères, déjà en souffrance et en besoin de plus de soins elles-mêmes ne sont quasiment jamais suivis a priori et très loin d’obtenir l’attention et les soins dont ils ont besoin.
Tant de besoins pourraient sembler décourageants. Ceci étant, cette période n’a jamais été autant matière à travaux d’épigénétique, à des avancées dans le fonctionnement cérébral des parturientes (cf. Conférence Parental Brain à St-Malo en mai de cette année).
La préoccupation pour les besoins fondamentaux de l’enfant, changement de paradigme depuis la Loi de 2016 de la protection de l’enfance, peine à se matérialiser dans les territoires.
À nous de maintenir la pression pour qu’à tous les niveaux, périnatal, petite et grande enfance, adolescence, nous puissions prendre soin de tous. Rien n’est jamais assez pour "nos" enfants, sans oublier ceux des familles les plus en difficultés sociales et économiques, comme c’est tristement trop souvent le cas.
Article paru dans la revue “Le Syndical des Psychiatres des Hôpitaux” / SPH n°21