
Et les PADHUE, parlons-en !
Il arrive régulièrement qu'un sujet nous semble trop important et complexe pour être traité au cours d'un seul Conseil d'Administration (CA) de l'ISNAR-IMG, nous organisons alors entre plusieurs CA des Commissions Éphémères (CE).

Des quoi !? Des réunions d'internes de Médecine Générale volontaires pour traiter du sujet, organisées par une membre du Bureau National. Ce groupe se réunit de façon périodique pour creuser le sujet puis proposer un document résumant les problématiques et les potentielles pistes d'évolutions : c'est ce qu'on appelle une contribution. Vous retrouverez par exemple sur notre site la Contribution sur les Violences Sexistes et Sexuelles, publiée en novembre 2021. Il existe de nombreux sujets qui attirent notre attention et que nous souhaitons vous partager. Par exemple, les PADHUE !
Cher lecteurs, chères lectrices, parlez-vous PADHUE ?
PADHUE, padhue, pas d'eux, pas d'ici mais qui sont-iels ? Des sigles pour parler d'elles et eux nous en avons beaucoup : FFI, PAA, SA, PA et cetera.
Mais qui sont ces PADHUE qui pratiquent parmi nous ? Ces médecins étranger ères présentes dans nos hôpitaux et qui bien souvent y sont essentielles. Les connaissons-nous vraiment ces Praticiennes À Diplôme Hors Union Européenne ?
C'est la question que s'est posée la CE “médecins étranger·ères” depuis mars 2024 après que le président de la République E. MACRON a promulgué la loi pour “contrôler l'immigration et favoriser l'intégration”. Cette loi durcit les conditions de vie des étrangers·ères sur le territoire français. Y compris celles de nos camarades médecins étranger·ères sans qui nos hôpitaux ne fonctionneraient pas. En compliquant leurs possibilités de regroupement familial ou en rendant plus précaire les statuts d'une partie d'entre eux. Nous nous sommes donc renseignées sur les statuts des médecins étranger·ères, leurs actualités, leurs revendications. Puis nous avons rencontré des médecins de l'Union Fédérale des Médecins Ingénieurs Cadres et Techniciens de la CGT (UFMICT-CGT) et contacté le syndicat pour l'Intégration Praticiens À Diplôme Étranger Contre la Crise (IPADECC)
Dans un contexte de fragilisation du système de santé, où les besoins de la population augmentent plus rapidement que les moyens, les médecins étranger·ères sont perçues comme une variable d'ajustement de plus pour le Gouvernement, permettant de limiter les manques en médecine hospitalière.

-Médecine et Société
Pour reprendre les chiffres publiés en 2021 par la Direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques (DREES) les postes de Faisant Fonction d'Interne (FFI) étaient de 12 % en 2019 contre 7 % en 2013. Sans les médecins étranger·ères, en 2023, c'est 2737 postes qui seraient non pourvus. Et cette proportion est encore augmentée en 2024 suite à la diminution du nombre d'internes issue des Épreuves Dématérialisées Nationales (EDN) 2023-2024.
Donc les PADHUE sont essentielles au maintien de notre système de santé aujourd'hui ! Ce rôle doit leur assurer des statuts solides, non ?
Avec la loi Valletoux adoptée en 2023 naît le statut de Praticienne Associée (PA) qui remplace les statuts de Stagiaires Associées (SA) (étudiantes étranger·ères en France pour une durée de 24 mois) et de Praticien·ne Attachée Associée (PAA) (statut pérenne équivalent à celui de Praticienne Hospitalier·ère (PH) française avec une rémunération moindre).
Avec cette loi adoptée en 2023, les contrats des PAA sont mis en extinction impliquant de nouveaux contrats en tant que FFI, avec une perte de salaire et une incertitude quant à la durée d'exercice possible. C'est le cas d'une PAA à Vannes, nous rapportait Éric TRON de l'UFMICT-CGT, qui apprit le non-renouvellement de son contrat par mail fin 2023.
Désormais pour obtenir le statut de PA, les médecins étranger·ères doivent passer un concours (les EVC) dont les places sont ouvertes selon les besoins estimés du système de soin et non selon les compétences des concurrentes.
Une fois les EVC passés, iels suivent un cursus de deux ans de formation pratique (le PCC) durant lesquels iels ont un statut de FFI. Tout cela pour enfin obtenir une autorisation ministérielle d'exercice. Entre la fin de leurs PCC et l'obtention de cette autorisation, le délai moyen est de 18 mois. Iels ne peuvent exercer qu'à condition d'avoir une autorisation temporaire délivrée par l'ARS pour une durée d'un an maximum.
Bien que Faisant Fonction d'Interne, ces dernier·ères ne sont alors pas des internes et nos statuts présentent quelques différences parmi lesquelles la rémunération inférieure, l'assurance Responsabilité Civile Professionnelle qui leur est payante et le temps de travail.
Si, pour une interne, nous le rappelons, “les obligations de service de l'interne [...] comprennent : en stage, huit demi-journées par semaine en moyenne sur le trimestre ; et, hors stage, deux demi-journées par semaine en moyenne sur le trimestre” ; concernant le statut de PA : “ Le service hebdomadaire des praticiens associés effectuant un parcours de consolidation de compétences est fixé à dix demi-journées”. Ainsi, si iels désirent se former comme leur statut le justifie, iels ne bénéficient pas de moment dédié pour le faire et doivent poser des congés pour se soustraire au service.

-Médecine et Société

Dans ce contexte, le 09 octobre dernier, l'IPADECC organisait un sit-in devant le ministère de la Santé. Que demandaient-iels donc ?
Simplement “la reconnaissance de leurs compétences pour continuer à soigner la population dans des conditions dignes et justes”.
Parmi les sept revendications que nous citons dans notre contribution, aucune n'est pécuniaire. Iels demandent une humanisation de leurs parcours (changement des modalités des EVC par un système plus humain, accompagnement administratif dans la gestion de leurs dossiers) et une pérennisation de leur statut avec un raccourcissement du délai de la délivrance d'autorisation d'exercer (12 mois contre les 18 en moyenne à ce jour).
Nous espérons vous avoir fait découvrir quelques particularités du parler PADHUE pour mieux comprendre nos collègues étranger·ères.
Si vous souhaitez approfondir ce sujet, nous vous redirigeons vers notre contribution disponible sur le site de l'ISNAR-IMG dans la rubrique “Contributions”.

Rédigé par Thomas
BOURGEOIS-FRATTA