Actualités : Médecine d’ailleurs : mission Madagascar

Publié le 10 mai 2022 à 15:21

Avril 2016. Lors d’une Assemblée Générale de l’association Pédiatres du Monde je rencontre Jean Jacques Dumesnil, médecin généraliste et fondateur de l’association Medicaero, qui fait appel à nous pour la prochaine mission de juinjuillet à Madagascar. 2 mois plus tard, me voilà embarquée dans une aventure hors du commun : expédition de 10 jours pour Tuléar, sud de Madagascar. Nous voilà une belle équipe de 6 médecins prêts à partir à l’aventure : Jean- Jacques, Isabelle (cardiopédiatre) avec son mari Christian (chirurgien orthopédiste), Denis (ophtalmologue), Ronald (dermatologue) et moi (petite interne de pédiatrie 6e semestre), chaleureusement accompagnés par notre reporter photographe Johan de l’organisme Aviation Sans Frontières, là pour immortaliser tous les moments forts, qu’ils soient difficiles ou joyeux.

C’est parti, direction Tuléar, sud de Madagascar. Nos 3 pilotes d’avions et amis : Thierry, Geörg et Anthony, nous ont accueillis, bien motivés pour nous faire voler jusqu’aux villages d’Ampanihy où nous sommes restés 3 jours, Ejeda 2 jours et Fotadrevo 1 jour. 45 min de vol au lieu de 5h de route, puis un atterrissage en brousse où des dizaines d’enfants alignés tout excités nous ont accueillis, tout sourire.

Arrivée au CSB (Centre de Santé de Base) : Après une visite rapide des lieux, chaque médecin s’installait dans son box pour commencer les consultations. Nous travaillions en binôme avec des membres médicaux ou paramédicaux locaux, qui nous aidaient aussi comme traducteurs. Concernant la pédiatrie, j’ai pu constaté des pathologies et symptômes très variées : convulsions, diarrhées sanglantes, retard de croissance et myxoedème, en passant par toutes les pathologies pédiatriques générales de routine que nous pouvons voir en France métropolitaine (asthme, otites, pneumonies...).

J’ai vu énormément de pathologies infectieuses avec surtout des parasitoses digestives, dont certaines étaient suspectées et certaines diagnostiquées par un examen parasitologique des selles (tenia, tricocéphaloses, amibiases intestinales…) ; et urinaires (suspicions de bilharzioses devant hématurie et douleurs abdominales). J’ai pu également suspecté plusieurs tuberculoses et paludismes.

Nous avons, avec l’aide du dermatologue, pu constater des brûlures graves et étendues avec séquelles orthopédiques sévères, car les accidents sur feux servant à préparer les repas sont fréquents et la prise en charge urgente manque. La plus grande difficulté était comme à chaque mission le manque de moyen pour réaliser des explorations approfondies, même si les EPS étaient fréquemment effectués. Il est heureusement tout de même possible dans certains cas de les orienter vers les hôpitaux des grandes villes pour réaliser des imageries plus complexes qu’une simple radio.

Cela m’a permis de me recentrer sur l’aspect clinique de façon primordiale et systématique, même si j’avais finalement plus facilement accès aux avis spécialisés qu’au CHU (dont des échos coeur), étant donné notre équipe très diversifiée ! Sur le plan thérapeutique, nous pouvions donner certains médicaments sur place et sinon, je réalisais mes prescriptions sur un petit carnet apporté par les parents, expliquées par Anita, la sage-femme qui m’accompagnait.

J’ai été agréablement surprise par le statut vaccinal des petits enfants malgaches, qui sont même systématiquement vaccinés contre le rotavirus ! Le carnet de santé des nourrissons, lorsqu’il existait était bien tenu, et les enfants avaient dans l’ensemble plutôt un bon état d’hygiène global et bucco-dentaire. Les enfants nécessitant une hospitalisation ont pu être rapidement orientés vers le centre le plus proche.

Un jour où la météo n’était pas favorable, nous avons pu visiter l’hôpital italien de Andavadoaka fondé par l’association « Amici di Ampasilava », entretenu et animé par des étudiants italiens (infirmiers, médecins ou aide soignants) qui y passent 3 mois par an, et qui ont bien pris le temps de nous expliquer leur fonctionnement.

Fin d’une journée-type, après des « au revoir » nostalgiques avec une partie de l’équipe locale, nous regagnions nos avions pour rentrer à l’hôtel de Tuléar, selon l’humeur du pilote (toujours très bonne) en longeant la côte et admirant les plages désertiques de sable fin. Les soirées étaient rythmées par les délicieux repas typiques : brochettes de crevettes grillées, zébu et thon fumé, fruits et légumes croquants locaux, tout en observant le magnifique coucher de soleil du bord de la mer.

L’action de Medicaero ne s’arrête pas là. L’association a aussi une vocation de développement de longue durée et nous avons, par cette occasion, eu la chance de pouvoir rencontrer le secrétaire général du ministère de la Santé auquel nous avons expliqué les difficultés de terrain de ces villages enclavés, liées au manque de personnel médical et de structure puisqu’il n’y a ni eau ni électricité dans les centres où nous avons pu intervenir. Sa patience et son écoute ont été excellentes, et les démarches des prochaines missions semblent se concrétiser, avec notamment l’objectif d’ouverture de bloc opératoire à Ampanihy, et le travail en équipe avec des étudiants en médecine malgaches de Tuléar.

Un concentré de moments extraordinaires, de liens d’amitié avec la team, de sensations fortes en avion et de découverte du pays de manière différente d’un voyage touristique, qui restera bien ancré. J’en retire évidemment une expérience que je recommande à tous les internes de pédiatrie avec en prime une connaissance nouvelle de l’aéronautique et du pilotage ! Sur le plan médical, cette diversité de pathologies de terrain apporte à l’interne de pédiatrie non seulement une vision plus concrète de la médecine de brousse mais aussi une capacité d’adaptation à une pratique très différente.

Je n’ai plus qu’à vous souhaiter une excellente aventure ! :)

Kenza Zellali

Message de Jean Jacques Dumesnil, président de l’association MEDICAERO

Avec MEDICAERO, les futurs médecins malgaches vont oser pratiquer en brousse, aller à la rencontre des populations enclavées très nombreuses à Madagascar. Notre action va permettre :

  • De pratiquer les premières interventions chirurgicales ainsi qu’une veille médicale par des moyens souvent simples.
  • D’aider les pères de famille atteints de cécité précoce par cataracte, de retravailler afin de pouvoir nourrir leur famille.
  • De prévenir un futur accouchement difficile et d’assurer la survie de la mère et de son enfant au sein de la nombreuse fratrie dépendante.
  • De redonner une dignité aux mamans accouchées victimes de séquelles obstétricales.
  • De corriger les fentes labiales de l’enfant, les brides handicapantes des graves brûlures.
  • De traiter précocement les pieds-bots des enfants pour leur assurer la marche dont ils seraient inéluctablement privés.
  • De dépister et prendre en charge depuis la brousse les cardiopathies de l’enfant.
  • De transmettre au corps médical la confiance dans ses capacités à relever ces enjeux sanitaires urgents.

Vous consultez avec les étudiants en médecine Malgaches dans une grande confraternité. Ils sont garants de l’avenir de la mission MEDICAERO.

Vous redonnez l’espoir d’un lendemain et la stabilité des familles pour éviter leur naufrage, vous levez leur isolement, vous donnez force à leur avenir sur leurs propres terres.

Vous ne manquerez pas l’occasion d’agir rapidement au plus près de leurs besoins pour survivre et puis vivre.

Si ce projet innovant susceptible de se diffuser dans toute la grande île de Madagascar vous intéresse, n’hésitez pas à revenir vers nous ou diffuser notre message.

MEDICAERO réduit les distances, crée des liens et de l’espoir.

Article paru dans la revue “Association des Juniors en Pédiatrie” / AJP n°15

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