Actualités : La réceptivité endométriale chez les patientes atteintes d’endométriose

Publié le 21 oct. 2024 à 14:00
Article paru dans la revue « AIGM / Gynéco Med » / AIGM N°3

Endometrial receptivity in women with endometriosis
Annalisa Racca, Best Practice & Research Clinical Obstetrics & Gynaecology, novembre 2023

Mots-clés
Endometriosis, endometrial receptivity, implantation, infertility

L'endométriose est une maladie inflammatoire chronique souvent associée à l'infertilité. Elle se caractérise par la présence de tissu endométrial en dehors de l'utérus, entraînant une inflammation chronique. Les femmes atteintes d'endométriose représentent environ 15 % des patientes ayant recours à la fécondation in vitro (FIV). L'endométriose est associée à une altération de la folliculogénèse, l'ovulation, la fonction tubaire et la fécondation mais son impact sur la réceptivité endométriale reste débattu. Cette revue de la littérature a pour but de synthétiser les connaissances actuelles sur l'impact de l'endométriose sur la réceptivité endométriale.

1. La réceptivité endométriale

L'endomètre se modifie au cours du cycle sous l'effet des œstrogènes et de la progestérone.

Lorsque la progestérone atteint un certain seuil, l'endomètre se décidualise. Cela permet une réceptivité endométriale qui est essentielle à l'implantation embryonnaire. Par conséquent, les traitements d'aide médicale à la procréation (AMP) visent à synchroniser l'endomètre avec le transfert d'embryon (TE) pour maximiser les chances d'implantation.

Des tests de réceptivité endométriale (dont l'endometrial réceptive array, ERA) ont été développés mais ne sont pas intégrés dans la pratique courante devant des résultats contradictoires.

Seulement 5 % des échecs de traitement d'AMP seraient attribués à la réceptivité endométriale. Cela remet en question l'efficacité des traitements supplémentaires souvent proposés.

2. La réceptivité endométriale dans l'endométriose

Les études sont contradictoires quant à l'impact de l'endométriose sur la réceptivité endométriale (1) (2). Trois

études montrent un taux de naissance vivante équivalent chez les patientes atteintes d'endométriose par rapport aux patientes « témoins » non atteintes d'endométriose, tandis qu'une autre étude montre qu'il est diminué chez les patientes atteintes d'endométriose.

L'endométriose, notamment l'atteinte ovarienne, créerait un micro-environnement inflammatoire avec un impact négatif sur la folliculogénèse et la fécondation qui pourrait influencer l'évaluation de cette réceptivité endométriale.

3. Impact de l'endométriose sur l'endomètre

L'endométriose peut affecter l'endomètre de plusieurs manières. Des perturbations immunologiques, hormonales et moléculaires sont observées chez les femmes atteintes d'endométriose.

Sur le plan hormonal, l'endométriose entraîne une résistance à la progestérone et un excès d'estrogène. Cela empêche le frein de la prolifération endométriale oestrogéno-induite et donc sa décidualisation. Par conséquent, cela diminuerait la réceptivité endométriale. Cependant, l'augmentation des doses de progestérone n'a pas montré son efficacité (3).

Certains biomarqueurs moléculaires sont modifiés chez les patientes atteintes d'endométriose, sans que ces résultats ne soient concordants avec la clinique.

4. Quels sont les impacts des traitements hormonaux sur la réceptivité endométriale ?

L'un des principaux traitements de l'endométriose est le traitement hormonal mais il est contraceptif.

Les traitements prolongés d'agonistes de la GnRH avant une FIV chez les patientes atteintes d'endométriose n'ont pas montré leur efficacité. Les protocoles antagonistes avec déclenchement par agonistes de la GnRH donnent des résultats équivalents. Un transfert embryon (TE) différé après un traitement hormonal substitutif (THS) serait bénéfique à la réceptivité endométriale.

Un pré-traitement par Dienogest avant FIV montre des résultats contradictoires sur l'implantation.

5. Quel est l'impact de la chirurgie d'endométriose sur la réceptivité endométriale ?

L'excision des endométriomes aurait un impact positif sur la réceptivité endométriale (4).

Cela réduirait l'environnement inflammatoire causé par les endométriomes et restaurerait l'expression de gènes favorables à l'implantation endométriale.

Par ailleurs, la chirurgie d'endométriose profonde améliore le taux de grossesses chez les patientes atteintes d'endométrioses. Mais il existe peu de preuves de l'impact de cette chirurgie sur la réceptivité endométriale.

L'indication chirurgicale reste la prise en charge des douleurs mal tolérées.

Conclusion

L'endométriose modifie le tissu endométrial. Mais cela ne semble pas affecter de manière significative la qualité embryonnaire, l'euploïdie et le taux d'implantation dans le cadre d'une FIV. Des études plus larges sont nécessaires afin de déterminer l'impact réel de l'endométriose sur la réceptivité endométriale.

Les résultats des FIV chez les patientes atteintes d'endométriose sont comparables à ceux des patientes contrôle notamment dans les transferts d'embryons congelés après un THS.

Le traitement hormonal préalable et la résection d'endométriose avant un transfert d'embryon ne devraient pas être systématiquement recommandés.

Take Home Messages

• L'endométriose modifie l'endomètre sur le plan immunologique, hormonal et génétique sans réel impact majeur sur l'implantation.

• Un pré-traitement par agoniste de la GnRH ou par dienogest n'améliore pas l'implantation chez ces patientes.

• La chirurgie d'endométriose ne doit pas être systématique avant une FIV.

 

Marie-Anne ARMAND
Interne en gynécologie médicale en 4e semestre
Tours

 

Dr Pauline LANGLADE
Gynécologue médicale, médecin de la reproduction
Hôpital de Seclin

Références

1. Bishop LA, Gunn J, Jahandideh S, Devine K, Decherney AH, Hill MJ. Endometriosis does not impact live-birth rates in frozen embryo transfers of euploid blastocysts. Fertil Steril 2021 ;115(2):416–22. https://doi.org/10.1016/j. fertnstert.2020.07.050.

2. Zhou L, Wang L, Geng Q, Zhang H, Xu S, Diao L, et al. Endometriosis is associated with a lowered cumulative live birth rate : a retrospective matched cohort study including 3071 in vitro fertilization cycles. J Reprod Immunol 2022 ;151 :103631. https://doi.org/10.1016/j. jri.2022.103631.

3. Juarez-Barber E, Cozzolino M, Corachan A, Alecsandru D, Pellicer N, Pellicer A, et al. Adjustment of progestérone administration after endometrial transcriptomic analysis does not improve reproductive outcomes in women with adenomyosis. Reprod Biomed Online 2023 ;46(1):99–106. https://doi.org/ 10.1016/j.rbmo.2022.09.007.

4. Celik O, Celik E, Turkcuoglu I, Yilmaz E, Ulas M, Simsek Y, et al. Surgical removal of endometrioma decreases the NF-kB1 (p50/105) and NF-kB p65 (Rel A) expression in the eutopic endometrium during the implantation window. Reprod Sci 2013 ;20(7):762–70. https://doi. org/10.1177/1933719112466307.

Publié le 1729512014000