Actualités : L’imagerie antenatale, un enjeu majeur de formation

Publié le 14 mai 2022 à 08:18

La réforme du 3ème cycle des études médicales appliquée à l’imagerie obstétricale et fœtale

L’esprit de la réforme du 3ème cycle des études médicales pilotée par le Pr B. Schlemmer et mise en place depuis la rentrée universitaire 2017-2018 est de permettre à l’issue de la phase d’approfondissement, que les internes soient le plus polyvalent possible quel que soit le CHU dans lequel l’interne a fait sa spécialité. Par ailleurs, le décret du 25 novembre 2016 réformant le 3ème cycle des études médicales prévoit que chaque DES soit un diplôme nécessaire et suffisant à l’exercice de la spécialité, les Diplômes d’Université (DU ou DIU) ne devant plus servir à l’enseignement initial de la spécialité. Dans cette perspective, le Collège des Enseignants en Radiologie de France s’est mis en ordre de marche pour proposer à l’ensemble des internes inscrits en DES de radiologie et imagerie médicale un enseignement présentiel et en e-learning pour tous les modules radio-cliniques, dans un souci de qualité et d’équité. L’enseignement de l’imagerie prénatale s’inscrit logiquement dans cette réforme. La mise en application de la réforme concerne également l’imagerie anténatale, entérinée par l’arrêté du 20 avril 2018 fixant les recommandations de bonnes pratiques relatives aux modalités de réalisation des examens d’imagerie concourant au diagnostic prénatal et aux modalités de prise en charge des femmes enceintes et des couples lors de ces examens. Concernant la réalisation des échographies obstétricales et foetales, il est ainsi indiqué dans cet arrêté que pour « les médecins spécialistes en radiologie et imagerie médicales ayant acquis, dans le cadre de la mise en oeuvre du décret n°2016-1597 du 25 novembre 2016 réformant le 3ème cycle des études de médecine, les compétences dans le domaine de l’échographie en gynécologie-obstétrique au cours de leur formation initiale (formation intégrée dans la maquette du DES à compter de la rentrée universitaire 2017), remplissent les conditions pour réaliser des échographies obstétricales et foetales ». Par ailleurs, l’arrêté du 20 avril 2018 précise que « L’IRM et la TDM foetales sont réalisées sous la supervision et la responsabilité d’un médecin spécialiste en radiologie et imagerie médicale ».

Le dépistage et le diagnostic anténatals, enjeux de Santé Publique

Le nombre de naissances déclarées en France en 2016 était de 767 000 (données Insee) et malgré une baisse régulière depuis 3 ans, la France conserve le taux de fécondité le plus élevé de toute l’Union Européenne. Les grossesses en France sont suivies échographiquement, avec pour objectifs de diminuer la mortalité et la morbidité périnatales, de réduire la mortalité maternelle et de réduire les handicaps d’origine périnatale. Le nombre recommandé d’échographies au cours de la grossesse est de trois. En pratique, au cours de la dernière décennie, le nombre d’échographies complémentaires a nettement augmenté, la fréquence des grossesses ayant bénéficié de plus de 3 échographies étant passé de 48,5 % en 1995 à 74,7 % en 2016 (Blondel et al., Trends in perinatal health, 2017).

Les échographies obstétricales et foetales sont réalisées majoritairement en secteur libéral (les 2/3 environ), essentiellement par des gynécologues obstétriciens, des radiologues et des sages-femmes. Concernant la réalisation des IRM et des TDM foetales, elles sont majoritairement réalisées en secteur hospitalier, par des radiologues. Les centres offrant les équipements d’imagerie lourds sont pour la plupart adossés à un Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic Prénatal (CPDPN), mais quelques CPDPN majoritairement dans les DOM, ne bénéficient pas localement de l’expertise de radiologues spécialisés en imagerie anténatale et doivent externaliser au mieux dans l’interrégion la réalisation des IRM et TDM foetales. Ceci est en partie lié au fait que le nombre des radiologues réalisant des examens d’imagerie anténatale est en baisse actuellement. Il existe néanmoins un vrai renouvellement des praticiens en exercice, les formateurs en échographie obstétricale et foetale sont jeunes, leur âge étant inférieur à 50 ans pour 70 % d'entre eux (Enquête de la Société Française d’Imagerie Pédiatrique et Prénatale).

Maquette d’enseignement d’imagerie obstétricale et fœtale

Pour répondre aux besoins accrus en compétences et expertise en imagerie anténatale, l’enseignement de l’échographie, de la TDM et de l’IRM obstétricales et foetales (voir article « Yes You Can ») devait s’intégrer à la boite à outils dont doit disposer tout interne au sortir des 4 premières années du DES, à l’image de ce qui se fait au Québec (voir article « Ressemblances et Différences de l’enseignement de l’imagerie prénatale au Canada et en France »). La première étape pour le CERF a consisté à réviser l’ensemble des objectifs d’enseignement de l’imagerie anténatale (http://cerf.radiologie.fr/sites/ cerf.radiologie.fr/files/Enseignement/pdf/6- radiop%C3%A9diatrie.pdf ).

Pour remplir ces objectifs, la seconde étape a consisté à mettre en place un enseignement théorique et pratique de l’imagerie obstétricale et foetale destiné aux internes. La maquette d’enseignement de l’imagerie anténatale suit le parcours d’un interne en phases d’approfondissement et de consolidation (Figure 1). A la fin de la phase d’approfondissement, un interne de radiologie doit connaître les principes et les résultats normaux de l’échographie de dépistage aux 1er, 2ème et 3ème trimestres de la grossesse. Il doit également connaître les indications de réalisation d’une IRM obstétricale et foetale et les séquences nécessaires à son interprétation. A la fin de la phase de consolidation, l’interne ayant choisi de s’orienter en imagerie obstétricale et foetale doit être en mesure de réaliser une échographie de dépistage aux 1er, 2ème et 3ème trimestres de la grossesse, connaître les indications et les conditions de réalisation d’une TDM et d’une IRM foetales ainsi que les gammes diagnostiques des principales malformations foetales.


Figure 1 : Maquette d’enseignement de l’imagerie obstétricale et foetale au cours du DES de radiologie et imagerie médicale.

Formation pratique et lieux de stage

Le CERF, la SFR et la SFIPP ont procédé par sondages au recensement des lieux de stages potentiels pour l’échographie obstétricale et foetale (45 formateurs recensés actuellement) et pour la réalisation des IRM foetales (Figure 2). Tous les centres formateurs sont adossés à un CPDPN.


Figure 2 : Lieux de réalisation des IRM foetales en métropole en 2017 avec un focus sur l'Ile-de-France en médaillon (52 centres)

Formation et validation théorique et pratique

Comme pour les autres modules radiocliniques, la formation théorique est basée sur un enseignement présentiel et en e-learning. Les cours sont dispensés par des radiologues, universitaires et non universitaires, reconnus pour leur expertise et leur pédagogie. Le programme est basé pour la partie échographique sur le référentiel du CERF et les recommandations nationales pour la pratique de l’échographie obstétricale et foetale. Pour l’enseignement de l’imagerie obstétricale et foetale par TDM et IRM, le programme est également basé sur le référentiel ainsi que sur de toutes récentes recommandations internationales. La mise en place d’un enseignement de l’imagerie obstétricale et foetale en formation initiale au cours du DES est nécessairement assortie d’une validation pratique et théorique. Pour la partie théorique, elle sera réalisée au cours des épreuves formatives en phase d’approfondissement puis de consolidation. Pour la partie pratique, elle consistera en une évaluation des compétences en échographie de dépistage anténatal à la fin de la phase de consolidation. Une épreuve sur simulateur échographique doit également être envisagée.

Conclusion

A la fin de la phase d’approfondissement, l’interne du DES d’Imagerie Médicale et Radiodiagnostic qui souhaite s’engager dans un cursus d’imagerie obstétricale et foetale orientera sa phase de consolidation et son post-internat dans un service spécialisé en imagerie périnatale. Ainsi, un interne ayant validé la spécialité « imagerie obstétricale et foetale » sera capable de réaliser une échographie de datation, aura les compétences pour réaliser une échographie du premier trimestre de la grossesse et pourra valider ses compétences pour l’échographie du premier trimestre auprès d’un organisme d’accréditation. Il saura également réaliser une échographie de dépistage du 2e et du 3e trimestre de la grossesse, prendre en charge et orienter une patiente présentant des complications obstétricales, connaîtra les gammes diagnostiques des principales malformations foetales ainsi que les indications et les protocoles de réalisation d’une IRM et d’une TDM foetales.

Article paru dans la revue “Union Nationale des Internes et Jeunes Radiologues” / UNIR N°32

Publié le 1652509095000