Interview des parents : que pensent-ils ?

Publié le 09 May 2022 à 08:04

Ils râlent, ils ne comprennent jamais rien, ne sont jamais d’accord, s’inquiètent de rien, s’inquiètent de tout. Mais finalement que pensent-ils ? Qui ? Les parents bien sûr ! Pour la première fois en pédiatrie, et particulièrement à l’AJP, on a décidé de s’intéresser aux parents. 

Avec une interview à chaque numéro, la Lettre de l’AJP interroge des parents pour avoir leur vision des enfants, des maladies courantes et de nous ! Pour cette première, l’AJP se concentre particulièrement sur un sujet débordant : La gastro-entérite aiguë. Si banale, si simple, si connue et archi-connue ? Pas si sûr...

La Lettre de l’AJP : Tout d’abord présentez vous ?
Mme L. : Maman d’Augustin et de Thimotée, 32 ans, en congé parental. Je travaille dans le web, mon mari est ingénieur. 

AJP : Comment se manifeste une gastro-entérite aiguë (GEA) pour vous ?
Mme L. : Pour l’avoir vu à l’hôpital, chaque cas est différent. Pour Augustin cela se traduit par des selles liquides et il boit parfaitement bien avec de l’Adiaril®. Tout se passe très bien, sauf au niveau des selles : c’est de l’eau. Et moins il y a de selles, plus il y a de l’eau, plus je m’inquiète. Quand il est malade, il a systématiquement 40°. La dernière gastro, il a fait 40° de fièvre pendant 1 semaine, sans baisser véritablement. Il a baissé quand on l’a mis sous antibiotiques à l’hôpital, sous amoxicilline. 

AJP : Quelles sont les causes de la GEA ?
Mme L. : Très honnêtement je ne sais pas, si ce n’est qu’en collectivité, il y a des enfants porteurs de virus qui ne se voit pas. Dans les crèches, il n’y a pas une hygiène extraordinaire et il faut peut-être qu’elles refusent les enfants avec la gastro. Quand mes enfants ont la gastro, je ne les mets pas en collectivité parce que pour certains enfants fragiles, cela peut être dramatique. Les causes, j’en sais rien. Je pense qu’il faut une hygiène, un « protocole » plus important. 

AJP : Justement comment peut-on prévenir la GEA ?
Mme L. : Pour la petite histoire, 2 mois après une première hospitalisation d’Augustin pour une gastro, nous étions partis au ski avec d’autres parents dont un de leurs enfants avait la gastro. Moi immédiatement, branles bas de combat, j’achète des lingettes pour nettoyer le mobilier (boutons et poignets de porte), la solution hydro- alcoolique pour chacun et surtout je mets l’enfant malade en quarantaine. Lavage de mains également en évitant le contact avec l’enfant malade mais aussi son entourage, potentiellement porteur. Ceci nous a permis d’éviter la gastro.
Et lors de la nouvelle hospitalisation, je prenais soin également de nettoyer le mobilier ce qui n’était pas forcément fait. 

AJP : Lors d’une GEA, qu’est ce qui vous gêne sur le plan pratique ?
Mme L. : Tout est question d’organisation et cela peut faire partie de l’éducation des enfants surtout quand ils sont petits. Thimottée, 3 ans, sait que lorsqu’il y a une maladie, on se lave les mains (un bidon de SHA est à disposition) et je mets en « quarantaine » l’enfant malade. 

AJP : Qu’est ce que vous redoutez ou craignez dans la GEA ?
Mme L. : La rapidité. Cela peut aller très vite.
Augustin à 7 mois, cela a été très vite : je serais arrivée 3 heures après, c’était fini. Il était déshydraté, craquelé. En fait, on ne s’en aperçoit pas et en tant que parents, on n’est pas compétent.

AJP : Quels signes vous inquiètent ?
Mme L. : Mon curseur, c’est mon mari. Ce sont les cris/couinements qui l’interpellent, il y a 7 mois, c’était ça qui nous a conduit à l’hôpital. A la dernière gastro, c’est encore mon mari qui était là. Ce n’est pas évident pour une gastro, ils ne sont pas forcément plus faibles tout de suite. Il y a la fièvre, mais ça ne me fait pas forcément bouger. C’est surtout le physique de l’enfant : il est « craquelé », de plus en plus « marbré ». C’est aussi les selles, les vomissements (mais le mien ne vomit pas), la perte d’appétit et ils sont « chuin-chuin ». 

AJP : Pour vous, quel est LE traitement de la GEA ?
Mme L. : (NDLR : hésitation/réflexion) 

AJP : Si vous hésitez, c’est qu’on a mal fait notre travail...
Mme L. : (rire) Je ne peux pas vous dire...
C’est surtout le fait d’arrêter les selles qui est important. Et on a beau donner le traitement du médecin, cela ne s’arrêtait pas.

AJP : Alors justement, quel est l’objectif du traitement ? Qu’est ce que les pédiatres visent ?
Mme L. : Arrêter la déshydratation. Pour d’autres parents, c’est peut-être arrêter les vomissements ou autres mais pour mon enfant c’est ça, et c’est fulgurant. 

AJP : Savez vous à quoi correspond les sachets de SRO ? Quand le donnet- on ?
Mme L. : L’adiaril® je l’ai donné, rien à faire, c’est contre les selles liquides. Si le médecin nous dit que c’est une gastro, il nous donne de l’adiaril® avec de la levure. 

AJP : Augustin, 16 mois désormais, a été hospitalisé du fait de la déshydratation liée à la GEA. Souvent les pédiatres banalisent peut-être les maladies courantes aux urgences...
Mme L. : Tant mieux, il vaut mieux car les parents peuvent être stressés.

AJP : ...Et qu’est-ce qui a pu vous marquer ou choquer aux urgences ?
Mme L. : Peut-être il y a un manque de place, mais c’est nous faire rentrer au bout de 24 heures pour revenir après. Ce n’est pas « choquant » mais c’est prendre un risque inutile. Ma mère travaille à l’hôpital, je sais combien ça coûte, qu’il faut 3 jours d’hospitalisation pour que ce soit rentable. Très bien, alors dites que c’est grave et faites 3 jours d’hospitalisation. C’est du business, ça c’est choquant ! C’est trop « business ». Justement un des parents d’enfant hospitalisé était américain : Il était fou. Il disait qu’on aurait jamais vu ça aux USA. Alors ça coûte plus cher, mais ne vaut-il mieux pas que ça coûte plus cher ? C’est la santé quand même !

AJP : Lors de l’hospitalisation, qu’est-ce qui a été le plus dur pour vous ?
Mme L. : En même temps vous demandez ça à une maman qui n’est pas stressée... Non j’ai trouvé le service super, vraiment... Pour chercher quelque chose... la médecine n’est pas une science exacte et vous avez beau avoir fait 10 ans d’étude vous ne pouvez pas mettre des mots sur chaque chose, mais le plus dur c’est de ne pas savoir, de ne pas comprendre : Augustin a fait 40°, une gastro puis une éruption cutanée intense, on posait des questions et on n’avait pas de réponses. « Oui c’est une virose », mais c’est-à-dire ? Ne pas savoir peut être embêtant car je pense à mon autre enfant, aux gens que l’on va côtoyer. Mais j’avais été très contente du service, il y a un lit pour les parents, c’était top. 

AJP : Qu’est ce que vous attendez de l’équipe soignante à l’hôpital ?
Mme L. : Ce qui a manqué c’est un pro, un médecin avec une réelle expérience. A un moment, on a voulu vraiment parler à quelqu’un qui a de l’expérience et on n’en a pas eu. Et c’est important qu’il y ait un chef de service qui passe, qui voit les parents, qui explique, ça rassurerait un petit peu quand même.

Et messages aux médecins : Notez sur le carnet de santé ! Et aussi il n’y a pas eu de visite de contrôle après l’hospitalisation, c’est dommage... 

AJP : Justement, nous représentons les internes de pédiatrie. Est-ce que vous avez rencontré des internes ?
Dans quelles circonstances ?
Quel est leurs rôles ?
Mme L. : Ils ont un trop grand rôle. Je ne sais pas si c’est eux qui prennent ce rôle ou qu’on leur donne mais ils sont énormément responsabilisés alors qu’en fait ce ne sont que des internes. Et c’est vrai quand on leur pose des questions, ils disent « je ne sais pas » ou « je vais voir », cela fait bizarre. Vous êtes mis sur le devant de la scène, seuls, trop rapidement. Seuls parce que... Les raisons sont toujours les mêmes : pas assez de monde, business, manque de personnel, trop de malades d’un coup. C’est à la fois bien pour vous, vous êtes face au vrai boulot mais trop rapidement. En tout cas vous devriez être un peu plus épaulés. 

AJP : Qu’est-ce qu’un interne selon vous ?
Mme L. : Ce n’est pas un médecin, c’est encore un étudiant. Ce n’est pas rassurant. Leur rôle ? Seconder, être le bras droit du médecin. Former un binôme cela serait super : Voir les deux, ensemble, au moins une fois par jour.

Benjamin Bueno

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Article paru dans la revue “Association des Juniors en Pédiatrie” / AJP n°07

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