Hallucinations et syndrome confusionnel

Publié le 17 May 2022 à 13:08


LIÉS À UN TRAITEMENT PAR METRONIDAZOLE

Présentation du cas
Mme A., âgée de 93 ans, a été prise en charge aux urgences suite à la survenue d’une diarrhée aiguë, de type cholériforme.

Dans ses principaux antécédents, on relève une hypertension artérielle, une tachycardie supraventriculaire ; une hypothyroïdie, une anémie non explorée, un syndrome anxio-dépressif.

Son traitement habituel comprend :
FLUOXETINE 20 mg : 1/2 cp le soir ;
LEVOTHYROX 75 mcg : 1 le matin ;
RYTHMODAN 250 LP : 1/2 cp le matin ;
FUROSEMIDE 20 mg : 1 le matin ;
RAMIPRIL 2,5 mg : 1 le matin ;
OMEPRAZOLE 20 mg : 1 le soir ;
DAFALGAN 1 g : 3 fois/jour.

La patiente est autonome pour les actes de la vie quotidienne, avec des aides à domicile. Elle vit seule, se déplace avec deux cannes. Elle ne présente pas de troubles cognitifs connus selon sa famille.

Au décours de sa prise en charge initiale, il a été constaté un syndrome inflammatoire avec une CRP à 213 mg/L, sans autre point d’appel infectieux que la diarrhée, une insuffisance rénale aiguë initiale réversible sous hydratation parentérale.

Mme A. s’est avérée orientée dans le temps et l’espace par ailleurs.

Un traitement probabiliste associant ceftriaxone et métronidazole a été introduit après réalisation des prélèvements infectieux, puis la patiente a été hospitalisée. 48 heures après l’admission, Mme A. a présenté des hallucinations visuelles bien critiquées, avec apparition dans un second temps d’un syndrome confusionnel.

A l’interrogatoire de sa famille, elle n’a jamais présenté d’épisode similaire.

Les causes de confusion ont été écartées : pas de survenue de déficit neurologique par ailleurs, de troubles hydro-électrolytiques, l’insuffisance rénale aiguë initiale a régressé de manière favorable ainsi que le syndrome inflammatoire (sans preuve bactériologique ni par la coproculture ni par les hémocultures), pas de rétention aiguë d’urine.

Une origine iatrogène a été suspectée sur la prise de métronidazole ; le traitement a été interrompu. Dans les 24 heures suivant cette interruption, sans autre modification majeure de la prise en charge par ailleurs, le syndrome confusionnel a régressé, pour disparaître à 48 heures, confirmant ainsi l’hypothèse.

Discussion
La confusion fait partie des effets indésirables neurologiques décrits dans les caractéristiques du produit du métronidazole, parmi d’autres symptômes allant jusqu’à l’encéphalopathie et des manifestations psychiatriques (entre autres des manifestations psychotiques, des hallucinations, …) (1,2,3).

Il n’existe pas de nombreuses données dans la littérature, mais celles disponibles suggèrent une réversion complète à l’arrêt du traitement, ce qui a été le cas ici (2).

Certains auteurs ont évoqué une possible relation avec la concentration plasmatique du produit (4), ce qui doit conduire à plus de prudence en cas d’altération de la fonction hépatique ou rénale (principales voies d’excrétion du produit) (5).

Le métronidazole est un traitement antibiotique qui conserve plusieurs indications fréquentes dans des pathologies infectieuses aiguës. Ce risque de confusion ne doit pas être sous-estimé et rester en tête en cas de survenue de symptômes évocateurs ; son arrêt à visée de test thérapeutique peut alors être réalisé. Sur les cas rapportés, les symptômes s’avèrent toujours totalement réversibles suite à l’interruption du traitement.

Gildas COUTU
Pour l'Association de Jeunes Gériatres

Bibliographie

  • Metronidazole induced acute confusional agitated state. Rohatgi A, Monga R, Goyal D. J Assoc Physicians India. 2000 Feb;48(2):261
  • Metronidazole and mental confusion. Mahl TC, Ummadi S.J Clin Gastroenterol. 2003 Apr;36(4):373-4
  • Acute encephalopathy associated with metronidazole therapy. Omotoso AB, Opadijo OG. Afr J Med Med Sci. 1997 Mar-Jun;26(1-2):97-8.
  • Mental confusion in a patient treated with metronidazole--a concentration-related effect? Schentag JJ, Ziemniak JA, Greco JM, Rainstein M, Buckley RJ. Pharmacotherapy. 1982 Nov-Dec;2(6):384-7
  • Neurotoxic risk of metronidazole in severe renal insufficiency. Moulin B, Dhib M, Heudes AM, Godin M, Fillastre JP. Ann Med Interne (Paris). 1988;139(5):369
  • Article paru dans la revue “La Gazette du Jeune Gériatre” / AJG N°20

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