
Les sarcomes osseux sont une pathologie rare chez l'adulte jeune. Nous présentons ici le cas d'une patiente de 18 ans atteinte d'un sarcome d'Ewing avec fusion CIC-DUX4, localisé à l'os malaire droit, pris en charge selon le protocole EURO EWING 2012.
Présentation de la patiente
La patiente, aînée d'une fratrie de deux enfants, a 17 ans et est en classe de terminale STSS avec un projet d'orientation vers le tourisme. Ses antécédents personnels et familiaux ne révèlent aucune pathologie carcinologique connue, et elle ne présente pas d'allergie, si ce n'est une intolérance au PRIMPERAN provoquant une dystonie.
Histoire de la maladie et diagnostic
La symptomatologie débute en octobre 2019 avec l'apparition d'une tuméfaction de l'os malaire droit à croissance lente. En consultation de chirurgie maxillo-faciale en novembre 2019, une chirurgie est programmée pour mars 2020 après un premier scanner. L'exérèse tumorale réalisée en mars 2020 met en évidence une prolifération tumorale maligne indifférenciée, avec une limite d'exérèse classée R1. L'analyse moléculaire confirme la présence d'une fusion CIC-DUX4, orientant vers un sarcome apparenté à la famille des Ewing.
Le bilan d'extension est alors réalisé en post-opératoire :
• L'IRM du massif facial (avril 2020) montre des séquelles post-chirurgicales, sans résidu.
• Le TDM thoracique ne révèle pas de métastase pulmonaire.
• La TEP-TDM au 18FDG (avril 2020) met en évidence un hypermétabolisme local sans lésion à distance, suspect ou post op inflammatoire.
• La scintigraphie osseuse (mai 2020) objective une hyperfixation en regard de l'oszygomatique droit.
• L'IRM de contrôle en avril 2020 montre une petite masse résiduelle de 9 mm.
• Le bilan médullaire est normal.
• Une cryopréservation du cortex ovarien est réalisée en prévision des traitements cytotoxiques.
Stratégie thérapeutique
La patiente est intégrée au protocole EURO EWING 2012, débutant une chimiothérapie d'induction alternant VDC/IE à partir de mai 2020. L'évaluation après la 3ème cure montre une pseudo-progression avec augmentation apparente de la lésion, attribuée à des remaniements hémorragiques. Après 7 cycles, la réponse est partielle, et une reprise chirurgicale est décidée.
L'intervention en octobre 2020 consiste en une exérèse chirurgicale suivie d'une greffe cutanée de peau pour couverture cutanée. L'anatomo-pathologie retrouve un reliquat tumoral de 5 mm avec plusieurs ilots de cellules épithélioïdes, et la notion d'un territoire de fibrose localisée au contact de l'os malaire. Le pourcentage de cellules tumorales viables n'est pas évaluable, l'exérèse est complète, R0. La prise en charge se poursuit par une chimiothérapie adjuvante débutant en novembre 2020. Fin des traitements en 2021.

Figure 1 : Illustration de la dosimétrie
Les suites immédiates sont marquées par une sécheresse oculaire et une kératite minime. Des séquelles esthétiques nécessitent plusieurs chirurgies réparatrices, avec trois lipofillings en 2023, février 2024 et aout 2024.
Irradiation et gestion des séquelles
La discussion thérapeutique inclut la possibilité d'une irradiation conventionnelle ou d'une protonthérapie. Après information, la patiente opte pour une radiothérapie en photons du fait des contraintes logistiques. L'irradiation permet de délivrer :
• 45 Gy en 25 fractions sur le lit tumoral avec marges larges ;
• Complément de 9 Gy en 5 fractions sur le lit tumoral restreint, en séquentiel ;
• Utilisation d'une technique VMAT avec photons de 6 MV.
Conclusion
Ce cas illustre les défis diagnostiques et thérapeutiques d'un sarcome des tissus mous rare, nécessitant une approche multimodale combinant souvent chirurgie, chimiothérapie et radiothérapie. L'étape diagnostique est cruciale, et doit consister en une micro-biopsie par voie radiologique lorsqu'elle est possible, afin d'éviter des chirurgies initiales inadaptées, non carcinologiques. La discussion en RCP en centre NETSARC+ doit être réalisée le plus tôt possible, au mieux dès l'imagerie initiale, avant même la biopsie diagnostique. La chirurgie carcinologique doit être complète, monobloc, réalisée par un chirurgien en centre NETSARC, formé au sarcome. L'évolution favorable malgré une pseudo-progression suspectée initiale souligne l'importance d'une surveillance rigoureuse et d'une prise en charge spécialisée. Ce parcours met aussi en lumière l'impact esthétique et fonctionnel de ces traitements, nécessitant un suivi à long terme et une réhabilitation adaptée.

