Actualités : Cas clinique - En collaboration avec l’équipe du TACFA

Publié le 30 mai 2025 à 14:46
Article paru dans la revue « ANIMT - Magazine des Internes de Médecine du Travail » / Mag'ANIMT N°4

Le TACFA est une association nationale proposant des conférences en ligne aux externes en médecine, gratuites, accessibles à tous quelle que soit la faculté d'origine, et relues par les universitaires de la spécialité.

Cette association est soutenue par l'UNESS, la Conférence des Doyens et la Coordination Nationale des Collèges d'Enseignants en Médecine.

La médecine du travail y est représentée depuis 2022 grâce à la participation de Florence DOLY (Strasbourg), Cédric JULIEN (Montpellier), Matthias NOCENTI (Toulouse) et nous avons le plaisir d'être rejoints par Olivia GORLIER, interne à Marseille, depuis l'été 2024.

Nous accueillerons avec plaisir les internes qui seraient partants pour nous rejoindre, quelle que soit leur ancienneté dans la spécialité !

Les externes sont en demande de conférences sur les spécialités moins connues de l'externat. Le temps de parole attribué à notre spécialité dans les conférences de l'association augmente progressivement depuis 2022.

Nous faisons en sorte d'illustrer le programme et la spécialité à travers des cas cliniques variés et systématiquement ancrés sur une problématique médicale. C'est une occasion pour présenter notre spécialité aux externes.

Potentiel départ des deux membres actuels de l'équipe médecine du travail à la fin de l'année universitaire 2025 2026.

Faites perdurer l'initiative !

Si vous êtes volontaire, vous pouvez flasher le QR code pour remplir le formulaire du TACFA ou contacter directement Matthias NOCENTI via Messenger.

À votre tour de tester vos connaissances d'après la R2C ;)

Madame X, 55 ans, travaille sur une chaîne d'assemblage de l'industrie aéronautique.

Alors qu'elle est allongée sous le ventre de l'appareil avec ses bras levés pour ouvrir une trappe, un surplus de produit réfrigérant dans l'un des circuits de refroidissement provoque une fuite. Il y a un déversement du produit sur les vêtements de travail de Madame X, au niveau de l'aisselle droite. Elle poursuit son travail. Le lendemain matin, elle présente une éruption cutanée s'étendant de la face interne de son bras droit jusqu'à la face latérale droite de son thorax. La photo A est prise le lendemain du contact et la photo B représente l'extension de l'éruption cutanée après 5-6 jours sans traitement. Elle ne signale pas de terrain atopique personnel ni familial. Lorsque vous l'interrogez sur ses allergies, elle vous évoque un épisode d'eczéma quelques mois auparavant, lors de l'application d'un désinfectant et d'un corticoïde topique sur son épaule après une piqûre d'araignée à son domicile.

Question 1

Concernant l'aspect des lésions sur ces deux photos, quelle(s) proposition est(sont) exacte(s) ?

A. Les deux photos sont typiques d'une dermatite de contact irritative.

B. Les deux photos sont typiques d'un eczéma de contact allergique.

C. La photo A oriente vers une dermatite de contact irritative et la B vers un eczéma de contact allergique.

D. La photo A oriente vers un eczéma de contact allergique et la B vers une dermatite de contact irritative.

E. L'aspect clinique suffit le plus souvent à différencier une origine allergique ou irritative.

Question 2

Concernant la procédure de déclaration d'un accident de travail, quelle(s) proposition(s) est(sont) exacte(s) ?

A. Cet eczéma peut être reconnu en accident de travail.

B. La déclaration devra être faite après la réalisation des tests épicutanés.

C. Si l'allergène en cause dans l'épisode actuel est identique à celui ayant causé son antécédent d'eczéma extra-professionnel, son dossier sera refusé.

D. Le certificat médical doit être rédigé par un médecin spécialiste en médecine du travail.

E. En cas d'arrêt de travail lié à cet eczéma, elle n'aura qu'un jour de carence.

Question 3

La patiente se présente dans son service de santé au travail autonome le lendemain matin, avec son éruption cutanée. Elle souhaite un certificat médical initial à joindre à sa déclaration d'accident de travail.

Quel(s) renseignement(s) inscrivez-vous sur le certificat ?

A. « Lésion en nappe érythémateuse infiltrée évocatrice d'un eczéma de contact…».

B. « …allergique… ».

C. « …de la face interne du bras droit, de l'aisselle droite et de la face latérale droite du thorax… ».

D. « …apparu dans la nuit passée… ».

E. « …suite à un écoulement accidentel de produit réfrigérant sur son lieu de travail ».

Question 4

Le produit réfrigérant est composé à 40 % d'eau déminéralisée et à 60 % de propylène glycol. Vous consultez la fiche toxicologique de cette substance.

Il s'agit donc d'une substance non corrosive, sans toxicité systémique par voie cutanée décrite. Elle peut être faiblement irritante et des cas d'allergie cutanée ont été décrits.

Vous adressez Madame X au centre de pathologie professionnelle pour la réalisation de tests épicutanés. Voici l'aspect des patch-tests à la 1ère lecture à 48 heures :

À la lecture à 72h, les résultats suivants sont retenus :

• Produit réfrigérant positif à 3+ sur toutes les dilutions.

• Propylène glycol positif à 3+

• Crème corticoïde topique positive à 3+ ; la composition indique la présence de propylène glycol. Batterie dermocorticoïde négative jusqu'à J7.

• Solution antiseptique positive à 1+ ; la composition indique la présence de propylène glycol et d'Hexamidine (également positive à 2+).

Donc confirmation d'une allergie de contact au propylène glycol et à l'hexamidine, responsable des deux épisodes présentés par la patiente.

Quelle(s) proposition(s) est(sont) exacte(s) ?

A. Elle sera inapte à son poste de travail.

B. Vous l'informez sur les autres produits pouvant contenir ces allergènes (remise d'une fiche d'éviction si disponible).

C. Une contre-indication à tous les dermocorticoïdes est justifiée.

D. Une prescription de dispositif d'auto-injection d'adrénaline sera nécessaire.

E. Une contre-indication aux médicaments oraux et intraveineux contenant du propylène glycol est justifiée.

Question 5

Concernant la prévention d'un nouvel épisode sur son lieu de travail, quelle solution devra être envisagée en priorité parmi les suivantes ? (Réponse unique)

A. Le port d'une combinaison étanche sur son poste de travail.

B. La mise en place d'un système ou d'une procédure limitant le risque de nouvelle fuite du liquide réfrigérant.

C. L'ajout d'un dermocorticoïde sans propylène glycol dans le kit de premiers secours présent dans l'atelier.

D. Donner la consigne de positionner un tapis absorbant au sol et de s'écarter de la trappe lors de son ouverture.

E. La mise à disposition d'un vestiaire équipé d'une douche et vêtements de rechange propres à proximité immédiate de l'atelier.

Correction

Question 1

Réponse correcte : C

À moins de 24h du contact, l'éruption est érythémateuse, infiltrée et la bordure très nette peut orienter vers une atteinte irritative. Par contre, la poursuite de l'extension sur 5-6 jours, avec une lésion de plus en plus inflammatoire, vésiculeuse et de bordure émiettée malgré l'arrêt de l'exposition oriente vers un mécanisme allergique.

Ces caractéristiques ne sont qu'une orientation mais ne permettent pas de distinguer les deux atteintes avec certitude. Le plus souvent, les tests épicutanés restent nécessaires.

Question 2

Réponses correctes : A, E

Il y a un fait accidentel (le déversement de produit), qui survient par le fait/à l'occasion du travail et qui entraîne une lésion (l'éruption cutanée) en moins de 24h (= délai maximal pour déclarer l'accident à l'employeur). Les conditions de reconnaissance d'un AT sont donc réunies. Le CMI peut être rédigé par tout médecin qui constate la lésion.

On parle d'un AT et pas d'une MP où les critères d'un tableau devraient être respectés. Ici l'ensemble des conditions pour la déclaration AT sont déjà réunies et le délai pour la réalisation des patchs ne permettrait pas de respecter le délai maximal autorisé pour la déclaration. Les tests épicutanés préciseront le diagnostic et le dossier à distance.

L'antécédent d'eczéma de contact au même allergène ne bloquerait pas la reconnaissance de cet accident de travail mais l'épisode précédent ne sera pas inclus dans la prise en charge AT/MP.

(Prise en charge possible si exposition habituelle sur le poste, avec récidive ou confirmation de l'origine allergique => MP Tableau donc pas de lien « essentiel » exigé : Part extra-professionnelle n'exclue pas la prise en charge tant qu'une exposition professionnelle est également présente avec délai compatible).

Absence de jour de carence sur les arrêts AT/MP.

Question 3

Réponses correctes : A, C

Vous décrivez la lésion que vous observez sans certifier des éléments que vous n'avez pas constaté. Il y a bien une lésion évocatrice d'un eczéma à cette localisation.

Vous ne certifiez pas le fait accidentel, c'est le rôle de la déclaration rédigée par le patient et des témoins (vous pouvez par contre le conseiller sur le remplissage de ce document).

Si vous n'avez pas vous-même constaté le moment de survenue de la lésion, vous ne le mentionnez pas : La présence de la lésion est déjà mentionnée sur la déclaration faite dans un délai inférieure à  24h à l'employeur.

Vous pouvez par contre mentionner l'aspect d'eczéma aigu constaté cliniquement : Inflammatoire, non lichénifié, sans desquamation, en cours d'extension avec apparition de vésicules.

(Possibilité de rédiger un CM de prolongation pour mentionner l'évolution, probablement non nécessaire ici).

L'origine allergique ne peut pas encore être affirmée.

Question 4

Réponse correcte : B

Il s'agit d'une exposition accidentelle ayant entraîné un épisode unique d'eczéma aigu, non traité, sans séquelle, pour lequel aucune prévention n'a encore été discutée. Il y a encore une grande marge sur sa prise en charge médicale et préventive, on est loin de l'inaptitude dans ce cas.

Il s'agit d'un eczéma de contact, pas d'une allergie systémique ni d'une anaphylaxie : Absence d'indication à un stylo d'adrénaline et absence de contre-indication des ex positions systémiques.

(D'autant que le propylène glycol est un excipient très répandu, les contre indications à de nombreux traitements entraîneraient un risque supérieur au faible risque d'eczéma de contact systémique).

Il sera nécessaire d'accompagner le patient sur l'éviction des contacts cutanés avec l'allergène : Information sur les situations d'exposition possibles, possible atelier d'éducation thérapeutique, les médecins de soins devront lui prescrire un dermocorticoïde sans propylène glycol pour lui permettre de traiter ses épisodes sans les aggraver.

Question 5

Réponse correcte : B

La priorité est d'éviter les nouvelles expositions :

1. Supprimer le produit dangereux si possible.

(Substitutions complexes +++ dans l'aéronautique et PG déjà un produit moins dangereux que les autres alternatives).

2. Limiter le risque de nouvelle fuite.

3. Limiter l'exposition des salariés en cas de fuite :

a. Par des mesures collectives, techniques ou organisationnelles, moins contraignantes.

(Difficulté d'accès à la trappe ? Quelle possibilité d'écartement des salariés ?).

b. Par des protections individuelles

(Combinaisons étanches sur la durée du poste de travail : Quelle compatibilité avec ses tâches et dans des hangars aux températures élevées en été ? Éviter au maximum de créer un nouveau risque).

4. Assurer la bonne prise en charge des expositions accidentelles résiduelles.

Pas de médicament dans les kits de premiers secours accessibles aux salariés sans avis médical. Les dermocorticoïdes ne sont pas des traitements d'urgence et ne sont donc pas non plus mis à disposition dans l'infirmerie du SPST. Pas d'obstacle au fait que la patiente garde un tube dans ses affaires personnelles si elle le souhaite.

 

Publié le 1748609209000