Actualités : Assemblée nationale : le BURN out et sa reconnaissance en maladie professionnelle

Publié le 27 mai 2022 à 13:32


Intervention du Dr Martine Keryer et du Dr Bernard Salengro devant la commission de l’assemblée nationale


Dr Bernard SALENGRO
Expert confédéral CFE-CGC
Pôle santé au travail, conditions de travail, handicap
Président du syndicat CFE-CGC santé au travail

Présentation par le Dr B. Salengro

I - Rappelons d’abord quelques éléments de contexte
Sur la différence d’approches entre médecins du travail et psychiatres, mais également quelques élements concernant la situation historiques des premières descriptions du burn out et le traitement fait dans les autres pays.

Différence psychiatre et médecin du travail

  • Différence entre clientèle du psychiatre et celle du médecin du travail. L’un ne voit que ceux qui se sentent en besoin de consulter un psy tandis que l’autre voit tous les salariés. Du moins jusque maintenant.
  • Différence entre culture du psychiatre soit psychanalytique et tout dépend de l’enfance ou comportementaliste tout revient à l’attitude du patient tandis que le médecin du travail connaît le travail, la structure de l’organisation, du groupe, les caractéristiques du rôle attendu et de la tâche prescrite ainsi que les stratégies développées par le salarié, toutes choses ignorées par le psychiatre.

Différence due à cette pathologie qui fait que le salarié ne se sent pas patient psy mais salarié épuisé voire déboussolé, d’autant que les symptômes sont spécifiques aux situations de travail. Il ne ressent pas le besoin de consulter un psychiatre qui, pour lui, a la compétence sur les psychoses voire les névroses et états limites de personnalité ce qui n’est pas son cas. Au mieux, il consultera un psychologue ou son médecin traitant. Ce qui fait que les psychiatres interrogés parlent sans connaître.

Ce qui fait que ce syndrome ne soit pas intégré dans les différentes classifications de type CIM 10 ou DSM V qui ne sont pas faites avec les médecins du travail.
La spécialité des psychiatres est éminemment respectable mais ne recouvre pas ce champ-là ce qui fait que par rapport à la spécialité des médecins du travail ce sont les médecins du travail qui sont légitimes à en parler.
Que dirait-on d’un rapport de l’académie de médecine sur l’infarctus réalisé par des dermatologues !

Spécificité du terrain engagé pour développer le burn out
Ce n’est pas par hasard que l’étude du stress et de ses formes cliniques dont le burn out en est une a particulièrement répondu à la confédération générale de l’encadrement.

En effet, il est admis par tous que le burn out ne se développe bien que sur un terrain fait de personnes engagées fortement dans leur métier, or les cadres et plus généralement les membres de l’encadrement, ne sont pas arrivés à ces postes par hasard ou par hérédité, ils n’y sont parvenus que parce qu’ils ont été profondément engagés dans leurs études préalables qu’ils ont réussies au prix d’un engagement important, de même ils n’ont obtenu leurs postes qu’au prix d’un parcours professionnel qui ne peut être réussi qu’au prix d’un fort engagement fait de temps non compté, fait de permanence des soucis professionnels, fait d’une quête permanente à l’actualisation des connaissances, fait d’une veille à la reconnaissance de cet investissement, etc. !

Il est certain que l’ouvrier au haut fourneau de la sidérurgie lorsqu’il quittait son poste, n’emmenait pas son haut fourneau avec lui tandis que le cadre emmenait ses soucis d’autant plus facilement que sa boite mail et son téléphone portable lui rappelaient qu’ils étaient toujours présents et encore plus s'il est au forfait !

Toutes les études que cela soit celles commandités par la CFE-CGC ou réalisées au niveau de l’Europe montrent la spécificité de l’encadrement vis à vis de cette pathologie.

Certes la situation change en ce sens que de plus en plus on demande un niveau de connaissances élevé à tous les opérateurs qui deviennent de plus en plus des techniciens et que les nouvelles techniques de management cherchent à pousser tout le monde à s’engager au maximum !

Cependant les cadres au forfait, qui n’ont d’autres limites horaires que les 11h de repos imposé par l’Europe, représentent une patientèle particulièrement exposée.

Le burn out n’est reconnu nulle part
1° Karoshi. Le premier cas reconnu de karōshi date de 1969, introduit par trois médecins, Hosokawa, Tajiri et Uehata au japon et indemnisé comme tel.
2° Belgique, arrêté royal du 10 avril 2014. Section 2 article 3. Le terme burn out est explicitement cité. Cf. arrêté royal du 27 mars 1998 relatif au bien-être.
3° Le burn out n’est pas une maladie mais un syndrome et un syndrome n’est pas dans les tableaux. Or, le tableau sur le plomb comporte un syndrome qui est indemnisé selon la description initiale de Louis Tancrel des Planches et après les diatribes du Dr Georges Clémenceau sur les maladies professionnelles dues au plomb dans l’aurore en 1906 que je vous invite à relire tant elles sont encore d’actualité pour ce qui nous rassemble. Mais plus encore le syndrome dépressif est déjà inscrit dans les tableaux des brucelloses et du sulfocarbonisme.
Au régime agricole le N° 6 et au régime général au N° 24 pour la brucellose et pour le Tableau sur le sulfocarbonisme N° 8 pour le régime agricole et au N° 22 pour le régime général.
4° Enfin, on dit également qu’il n’y a pas de dépression dans les maladies professionnelles, c’est faux, cf. le tableau sur le bromure de methyle. N° 23 au régime agricole et N° 26 au régime général. Vous retrouvez facilement ces références sur le site internet de l’INRS en vous aidant du moteur de recherche.

Le burn out est une description récente
Je ne citerai mon manuel lorsque je suivais mes études de psychiatrie mais la description y était bien évoquée en 1974.
Plus encore dans les écrits de Shakespeare et chez de nombreux auteurs de littérature y compris dans la bible !
Simplement :
1° Congrès de santé au travail Rouen 1990, le Dr A. Raix de l’université Pierre et marie Curie fait toute une intervention sur le brun out dans une description tout à fait classique et publiée dans les archives des maladies professionnelles page 164.
2° Table ronde sur la santé au travail au sénat le 3 décembre 1991, le Dr Robert Salbreux psychiatre évoque le burn out avec la description classique du trepied des symptomes : je cite : « le burn out que nous appelons nous l’épuisement professionnel des soignants et qui est une cause de morbidité considérable au travail… », page 18.
3° Si vous allez sur le site des archives maladies professionnelles et que vous tapez burn out dans le moteur de recherches, vous trouvez de nombreuses publications.
4° Et in fine, la publication de Christina Maslach en 1997 traduite et publiée en français en 2011 avec une magnifique description séméiologique du Dr Legeron qui à l’époque ne disait pas que cela n’existait pas.
5° Certes dans le DSM V vous ne trouvez pas le burn out. Mais par qui est réalisé le DSM V ? Par les psychiatres américains qui comme les psychiatres français ne voient que les patients qui viennent vers eux et en plus ils n’ont pas l’appui d’un corps de spécialistes en santé au travail comme cela existe encore en France. Ce qui ne les empêche pas d’indemniser cette pathologie comme le rapporte les publications du BIT car le système n’est pas le même chez eux, il ne s’agit pas de tableaux mais de l’appréciation du juge ce qui fait que les assurances privées ont organisé une prévention bien avant les français a rapporté Eskenazy dans une récente publication.

II - La philosophie, l’économie, l’épidémiologie et le comportement des acteurs sont concernés par ce problème

L’intérêt de sa reconnaissance en maladie professionnelle.
L’intérêt est très important pour plusieurs raisons :
1° L’équilibre des comptes de la sécurité sociale
car les dégâts du burn out sont quand même indemnisés par la sécurité sociale mais au niveau du régime d’assurance maladie financé par les cotisations que versent les entreprises tandis que si c’était versé par les cotisations ATMP ce serait toujours versé par les entreprises mais avec une incitation financière (modeste rassurez-vous, nous ne sommes dans le droit assurantiel comme chez les américains) à la prévention. Cela paraît logique que les entreprises qui créent la situation générant le burn out en assume les conséquences. Cela libérait le régime maladie d’une dépense qui n’en relève pas et qui permettrait d’inciter à la prévention !

2° La motivation des employeurs par l’immunité civile permise par le régime AT/MP
Le régime ATMP lorsqu’il indemnise protège l’employeur des actions en réparation qui pourraient être demandées au civil. C’est d’ailleurs pour cela qu’il a été créé et pour cela qu’il n’est pas critiqué, car les indemnisations au civil coûteraient beaucoup plus cher !

3° L’incitation à la prévention par les (faibles) incitations financières
La reconnaissance en maladie professionnelle par un mécanisme comptable, un peu lissé, établit une incitation financière pour que les entreprises améliorent leur situation et diminuent l’émergence de la pathologie. Dès que l’on enclenche ce mécanisme la prévention devient rentable et entre dans la logique économique de l’entreprise disait le Dr Cazamian, fondateur de l’enseignement de l’ergonomie à la Sorbonne.

4° Une meilleure indemnisation des personnes atteintes
mais rassurezvous, cette indemnisation n’est pas automatique, il y a description des situations qui génèrent la pathologie, il y a des délais d’exposition au risque, des délais de prise en charge et une liste des types d’affections bien décrites dans les tableaux.
Par ailleurs, il faut se rappeler que cette indemnisation n’est pas extraordinaire, beaucoup moins intéressantes que les indemnisations obtenues au civil car elle est plafonnée, divisée par deux, révisable et dépendante d’un barème antique qui tiens peu compte de l’évolution du travail tertiaire !
Ce qui fait que pour un cadre il serait beaucoup plus intéressant de mener une action au civil comme aux USA, l’indemnisation serait triplée facilement.
Il faut se rappeler que le régime ATMP a été demandé par les employeurs pour échapper aux actions du civil en offrant une forfaitisation immédiate très limitée de l’indemnisation des préjudices en contrepartie de cette immunité civile.

5° Un tableau de maladie professionnelle plutôt que le mécanisme complémentaire des CRRMP !
En effet, dans le cadre d’un tableau, on reste dans la philosophie originale de l’accord avec les employeurs c’est-à-dire une indemnisation automatique mais limitée en contrepartie de la présomption d’imputabilité qui est la contrepartie du lien de subordination caractéristique du statut de salarié.
En pratique, il suffit de présenter une pathologie sous forme de maladie, symptôme ou syndrome en regard d’un exercice professionnel défini.
Tout autre est la philosophie du système complémentaire dans le cadre des CRRMP où il faut faire la preuve du lien comme dans la logique du droit civil mais avec une indemnisation qui reste limitée comme dans le cadre du régime ATMP !

La logique par rapport aux termes de l’accord sur le stress de 2004 et de 2008
1° la logique par rapport à l’accord français sur le stress au travail signé entre les partenaires sociaux en 2008 inclut dans sa logique ce qui relève du burn-out.
Ce qui est intéressant de noter c’est que cet accord, déclinaison de l’accord européen de 2004, a été signé par tous les partenaires sociaux et plus encore, a été étendu par les pouvoirs publics.
Or, ce texte stipule bien les origines de ces problématiques dans l’organisation et les caractéristiques du travail !
Ce texte qui reconnaît la pathologie issue des organisations et des caractéristiques du travail appelle dans sa logique une reconnaissance en maladie professionnelle.

2° La logique par rapport au constat réalisé par la DGT avec l’INRS et avec l’ANACT. Ce guide réalisé sous l’égide de la DGT fait le point quasi exhaustif de la symptomatologie du burn out, du diagnostic positif et étiologique mais également différentiel.
Il établit la conséquence en matière de prévention dans une démarche adaptée aux grandes entreprises mais peu aux PME compte tenu des récentes réformes de la médecine du travail qui vont éloigner le médecin du travail des salariés et de leur vécu surtout dans les PME.

Deux remarques au sujet de ce guide:

  • La première dans la description du rôle du médecin du travail en présentant un rôle amputé : « le médecin du travail ne pratique aucune prescription médicale dans le cadre de l’entreprise ou de la structure dans laquelle il officie. ». Faisant l’impasse sur l’action sur les conditions de travail et sa traduction au travers de ses interventions, écrits, rapports et devoir d’alerte qui sont ses prescriptions médicales (Art. R. 4623-1, Art. R. 4624-4, Art. D. 4624-37, Art. D. 4624-42, Art. R. 4624-3. Art. L. 4624-3.-I.)
  • La seconde étant la description d’une fragilité des personnes s’engageant trop dans leur travail comme étant une caractéristique des individus alors que c’est le résultat des actions managériales actuelles, il suffit de lire les cours des écoles de commerce pour le comprendre. Jean Leon Beauvois dans son « traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens » en a fait la démonstration.

L’importance de l’épidémie et sa mesure
Plusieurs approches ont été réalisées dans le cadre de la CFE-CGC, tout d’abord par le recueil des témoignages poignants que l’on pouvait recevoir émanant d’abord de la fédération de la santé et de celle de la police et puis petit à petit de toutes les fédérations professionnelles.

Afin d’avoir une vision qui ne soit pas limitée qu’aux seuls trains qui arrivent en retard, on a pratiqué des sondages manuellement puis en passant par des instituts de sondage afin que l’on ne puisse pas rétorquer que les résultats étaient fabriqués !

Sondage réalisé par Opinion Way sur 1000 cadres actifs 2011 échantillon représentatif :

1° Charge de travail

  • Avez-vous le sentiment que votre charge de travail est plus lourde qu’auparavant ? Oui à 74 %
  • Avez-vous le sentiment que vous devez travailler trop vite ? Oui à 89 %
  • Diriez-vous que le temps de travail est insuffisant pour la tâche ? Oui à 61 %

2° Flou, anomie

  • Diriez-vous que votre responsabilité est mal définie ? Oui à 41 %
  • Diriez-vous que vos responsabilités dépassent vos compétences ? Oui à 52 %
  • Diriez-vous que vos responsabilités dépassent votre capacité de contrôle ? Oui à 63 %
  • Diriez-vous que les progiciels mécanisent votre travail ? Oui à 41 %
  • Diriez-vous que l’utilisation de progiciels réduit les relations humaines ? Oui à 52 %

3° Reconnaissance

  • Diriez-vous que vos efforts sont reconnus à leur juste valeur ? Non à 58 %

4° Soutien social

  • Diriez-vous que vous avez le sentiment d’être soutenu par vos collègues ? Oui à 72 %

5° Clarté, flou, responsabilité, dialogue, anomie

  • Diriez-vous qu'il y a trop d’incertitude sur la stratégie de votre entreprise ? Oui à 63 % à court terme et oui à 71 % à long terme
  • Êtes-vous inquiet par rapport à votre situation professionnelle ? Oui à 58 %
  • Avez-vous des difficultés à concilier vie privée et vie professionnelle ? Oui à 56 %
  • Avez-vous le sentiment de recevoir des ordres ou des consignes contradictoires ? Oui à 56 %
  • Avez-vous le sentiment d’être en concurrence avec les collègues de votre entreprise ? Oui à 43 %
  • Avez-vous le sentiment d’être confronté à des clients agressifs ? Oui à 41 %
  • Avez-vous le sentiment d’être contraint à des actions contraires à votre éthique ? Oui à 38 %
  • Avez-vous le sentiment de subir des remontrances ou des critiques devant vos collègues ? Oui à 23 %

6° Au niveau du ressenti

  • Avez-vous le sentiment d’être tendu, crispé à cause du travail ? Oui à 70 %
  • Avez-vous l’envie de quitter le travail à cause du stress ? Oui à 39 %
  • Avez-vous l’envie d’un départ anticipé à la retraite ? 28 %
  • Avez-vous des arrêts maladie à cause du travail ? Oui à 14 %
  • Avez-vous une consommation excessive d’alcool à cause de votre travail ? Oui à 13 %
  • Avez-vous des troubles du sommeil à cause de votre travail ? Oui à 63 %
  • Avez-vous des difficultés conjugales à cause de votre travail ? Oui à 25 %
  • Avez-vous des idées suicidaires à cause du travail ? Oui à 7 %, taux qui grimpe en fonction de la taille de l’équipe encadrée

Avec de tels résultats qui se répètent au fur et à mesure des années et dont on trouve confirmation dans d’autres sondages et d’autres travaux, on ne peut s’étonner de chiffres importants pour approcher la pathologie du burn out. Tous les facteurs décrits s’y retrouvent de même que les symptômes !

Dans le dictionnaire des risques psychosociaux et dans accord du GPO
À la rubrique burn out c’est renvoyé à épuisement professionnel p. 273. Philippe Zawieja et Franck Guarnieri, le seuil 2014

Avec les références de :

  • Freudenberger en 1974, Première publication.
  • Christina Maslach et Susan Jackson en 1981.
  • Truchot en 2011.

III - Le type de description de l’affection en question

Le DIAGNOSTIC POSITIF
C’est un Syndrome associant
1° Épuisement physique, psychique et cognitif qui correspond au manque d’énergie, au sentiment d’être exténué par les exigences de son travail. Vidé nerveusement, l’individu a perdu tout entrain, est démotivé. Fatigue physique (faible énergie), épuisement émotionnel (manque d’empathie), épuisement cognitif (diminution des capacités mentales).
2° Cynisme (ou la dépersonnalisation), attitude négative et détachée envers le travail, les collègues, l’organisation.
3° Inefficacité professionnelle (ou la place de réduction de l’accomplissement personnel.

La tendance actuelle est de considérer que l’épuisement émotionnel et la dépersonnalisation constituent le noyau dur du syndrome. Les manifestations du burn out Les manifestations du burn out s’observent au niveau du professionnel, des interactions interpersonnelles, mais également au niveau de l’institution.

Au niveau individuel, un sentiment de fatigue chronique est généralement remarqué.
Le burn out réduit les défenses immunitaires et rend plus vulnérable aux infections virales.
Des troubles du sommeil et une grande fatigue au réveil peuvent apparaître.
Le burn out est associé à des taux de cortisol plus élevés durant la journée de travail. Il conduit au diabète de type 2. Il s’accompagne de troubles musculo-squelettiques et de problèmes cardio-vasculaires.
Le burn out provoque des conduites addictives, en particulier consommation d’alcool et prise de psychotropes. Des troubles cognitifs font également partie de ses manifestations : difficultés de concentration, pensées intrusives (cf. Shirom, 2010).
Le burn out entraîne une intolérance aux frustrations, ce qui induit, entre autres, une sensibilité exacerbée, une agressivité et une détérioration des relations avec les collègues.
Il contribue à dégrader la qualité des relations avec les récipiendaires. Il est associé à un retrait psychologique visà-vis des patients et conduit à des erreurs médicales et de la maltraitance (Truchot 2013).

Pour l’organisation, le burn out représente un coût important. Il contribue à augmenter l’insatisfaction au travail et à diminuer l’engagement. Les professionnels atteints de burn out sont moins impliqués, ont moins de conduites de citoyenneté organisationnelle et ont plus que les autres l’intention de quitter leur emploi.

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
1° Le stress est un terme générique correspondant au stade final du processus d’adaptation et le burn out correspond au stade final d’une rupture d’adaptation. Celle-ci résulte sur le long terme, d’un déséquilibre entre les exigences de l’environnement et les ressources de l’individu.
Par ailleurs, le burn out implique la manifestation d’attitudes et de comportements négatifs (cynisme, retrait psychologique et comportemental), ce qui n’est pas nécessairement le cas du stress.
Le burn out touche davantage les personnes fortement investies dans leur travail et présentent des symptômes surtout liés à la sphère du travail.
2° Certaines similitudes entre les symptômes du burn out et ceux de la dépression conduisent à s’interroger sur le lien entre ces deux états psychologiques. Les symptômes du burn out sont spécifiques aux situations de travail. Au cours des premiers stades du burn out, les individus sont productifs dans d’autres domaines. Au contraire, avec la dépression les symptômes sont « envahissants ». Ils sont indépendants du contexte, se généralisent à toutes les situations, à toutes les sphères de la vie. Ceci implique que l’individu dépressif est susceptible de ressentir un manque d’énergie dans tous les registres variés de sa vie (travail, loisirs, vie familiale, etc.) alors que l’individu frappé de burn out doit ressentir ce manque d’énergie essentiellement sur son lieu de travail.
Les individus atteints de burn out donnent l’impression d’être plus vivants et sont davantage capables de se réjouir des choses.
Ils perdent rarement du poids, montrent rarement de l’inhibition psychomotrice. Ils ont des sentiments de culpabilité plus réalistes le cas échéant.
Une autre différence est qu’ils tendent à attribuer leur indécision et leur inactivité à leur fatigue plutôt qu’à leur maladie, ce qui explique qu’ils n’aillent pas spontanément voir le psychiatre.
Enfin, ils ont souvent des difficultés à s’endormir, tandis que dans le cas de la dépression on tend à se réveiller trop tôt.
3° La différence avec la fatigue chronique est analogue, la fatigue chronique est générale et apparaît après une tension psychique ou un stress de longue durée. Elle n’a pas d’origine systématique dans le travail.
Le burn out ou fatigue émotionnelle est associée aux deux autres composantes : la dépersonnalisation et la perte d’accomplissement au travail. Apparaît suite à une tension psychique ou un stress de longue durée associé au travail.
4° Le workaholisme ou l’addiction au travail. Ils passent beaucoup de temps au travail, sont réticents à se distancier ou se désengager de leur travail et ils fournissent un travail qui va au-delà de ce qui est attendu de leur part au point que leur vie privée en est affectée (Schaufeli et al 2006). Peut notamment conduire au burn out car l’implication excessive dans le travail peut épuiser les ressources.
Le burn out, par contre, touche les personnes qui ont de fortes attentes envers leur travail : ce qui est déterminant pour elles, c’est le métier et le sens donné au travail. L’épuisement propre au burnout ne permet pas à la personne de mobiliser les ressources nécessaires à une forte implication dans le travail (« workaholisme »). Le syndrome d’épuisement professionnel n’est pas nécessairement consécutif au workaholisme.

DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE ou FACTEURS DE RISQUE
La surcharge de travail, le conflit de rôle et l’ambiguïté de rôle, le manque de contrôle, des récompenses insuffisantes, la rupture de la communauté et l’absence de soutien social, l’absence d’équité, l’anomie ou la perte de sens, en particulier dans la contradiction des messages, les conflits de valeurs ou la qualité empêchée.

LA MESURE DU BURN OUT
1° Le Masclach Burn Out Inventory ou MBI. De bonnes propriétés psychométriques. Epuisement émotionnel, cynisme, réduction de l’efficacité. Pourcentage de variance est à 61 %.
2° L’Oldenbourg Burn out Inventory. Evalue épuisement et désengagement. Explique 81 % de la variance.
3° Le Shirom Melamed Burn Out Measure ou SMBM. Fatigue physique, épuisement émotionnel, lassitude cognitive.

IV - Les propositions en termes de tableau de maladie professionnelle

Dans la liste des pathologies
Il paraît incontournable d’évoquer :
1° L’épuisement physique, psychique et cognitif et ses manifestations (fatigue physique avec faible énergie, épuisement émotionnel avec manque d’empathie, épuisement cognitif avec diminution des capacités mentales) associé à.
2° La réaction de dépersonnalisation ou de cynisme vis-à-vis des sujets à traiter. Peut s’y associer une attitude négative et détachée envers le travail, les collègues, l’organisation. Pas toujours associé à.
3° Un sentiment d’échec professionnel. Avec la mesure d’un des tests MBI ayant la meilleure variance.

Dans la liste des expositions professionnelles
L’engagement apparaît comme une donnée incontournable, qu’il soit provoqué par le management qui y incite et/ou par l’empathie nécessitée dans le cadre de la relation d’aide ou de traitement.

S’y rajoute comme autres facteurs ceux qui sont évoqués dans le guide de la DGT c’est-à-dire : charge de travail excessive, charge émotionnelle excessive, manque de soutien social, manque de marge de manœuvre, manque de reconnaissance, manque de dialogue, manque de sens du travail, anomie.

Ces différentes caractéristiques étant repérées au travers des traces de l’action des IRP, des médecins du travail et de leurs équipes concrétisées par leurs écrits.

Comme DER : 1 an
Comme DPEC : 6 mois

Les propositions de prévention
Les acteurs

  • Les IRP et lors qu’ils existent les CHSCT.
  • Les employeurs ont l’obligation de prévention et de résultat de sécurité.
  • Les acteurs de la santé au travail et en particulier les médecins du travail sont des acteurs de premier plan pour dépister et pour conseiller les employeurs et les partenaires sociaux en termes de correction des caractéristiques du travail. Ils ont comme arme leurs conseils traduits par des écrits notamment au travers du devoir d’alerte Art. L. 4624-3.-I

les actions
Se résument en l’évitement des facteurs étiologiques précédemment décrits et bien explicités dans le guide de la DGT.

Article paru dans la revue « Syndical Général des Médecins et des Professionnels des Services de Santé au Travail » / CFE CGC n°54

Publié le 1653651155000