
L’alcoolisation foetale, première cause de handicap mental non génétique
Chez un adulte ou un enfant, l’expression « Troubles Causés par l’Alcoolisation Foetale » (TCAF) désigne l’ensemble des complications résultant de son exposition à l’alcool pendant la vie intra-utérine. La toxicité de l’alcool est responsable de perturbations du développement de l’organisme et tout particulièrement du cerveau, dont les TCAF sont les conséquences. Il arrive aussi que des problèmes de croissance ou des malformations y soient associés, constituant alors le « Syndrome d’Alcoolisation Foetale » (SAF). SAF et autres TCAF font partie des maladies du développement neuro-cognitif.
8000 enfants porteurs de TCAF* , soit 1% des naissances, naîtraient chaque année en France. 800 enfants porteurs du SAF naîtraient chaque année en France.
Expertise Inserm 2001
De graves conséquences sur la structure et le fonctionnement cérébral
Le cerveau des enfants exposés à l’alcool pendant la grossesse est en moyenne plus petit qu’attendu pour l’âge. Cette moindre croissance n’est pas toujours visible, alors que l’organisation du cerveau s’avère perturbée à l’échelle microscopique avec pour conséquence un dysfonctionnement cérébral.
Les lésions cérébrales de l’alcoolisation foetale affectent le fonctionnement cognitif et émotionnel des enfants à de multiples niveaux, avec des conséquences, d’une part sur les apprentissages et le comportement, d’autre part sur l’adaptation sociale et l’autonomie.
Si les déficits cognitifs sont assez généralisés, conduisant parfois à une déficience intellectuelle légère caractérisée, l’efficience intellectuelle reste souvent dans l’intervalle de la normalité, en zone de fonctionnement « limite ». Les troubles les plus gênants au quotidien impliquent en revanche massivement les fonctions exécutives et la régulation émotionnelle. Ils sont d’autant plus importants que l’environnement est fragilisant pour l’enfant, l’alcoolisation foetale le rendant significativement plus vulnérable aux facteurs socio-éducatifs défavorables. Ainsi, s’il n’est pas toujours possible de dégager un profil neuropsychologique spécifique, il importe de retenir que les enfants porteurs d’un SAF ou autres TCAF présentent une vulnérabilité dans les apprentissages et l’autonomisation qui va audelà de leur niveau d’efficience intellectuelle.
Schéma : E. Rien
Méconnaître ces déficits aggrave le handicap
Les difficultés rencontrées par les enfants porteurs de TCAF sont souvent mal interprétées dans des contextes socio-éducatifs difficiles. Sans reconnaissance de leur caractère organique et spécifique, ces difficultés ne pourront bénéficier d’un accompagnement adapté, avec pour conséquence un potentiel cognitif mal exploité et le développement dans plus de la moitié des cas de troubles du comportement secondaires :
- Découragement
- Mauvaise estime de soi
- Rupture ou refus scolaire
- Irritabilité, anxiété
- Opposition, fugues
- Conduites à risque (drogues, sexe)
- Vulnérabilité aux mauvaises influences
- Actes inconsidérés ou déplacés
- Inadaptation à la vie professionnelle
- Démêlés avec la justice
Un diagnostic et un suivi précoces réduisent efficacement les troubles
Tout l’enjeu du diagnostic est de mettre en place le plus tôt possible (idéalement avant l’âge de 6 ans) une prise en charge et une orientation scolaire adaptées, ciblant à la fois les déficits identifiés chez l’enfant et son environnement socio-éducatif, mais aussi et surtout, d’éviter de mésestimer ou mal interpréter ses troubles, source de sentiment d’incompréhension, sinon d’injustice, pour lui et ses parents. L’idéal est un diagnostic et un suivi pluridisciplinaire (neuropédiatre, CAMSP1 notamment) selon les normes canadiennes adoptées par la France en 2010.
Les familles en première ligne pour le suivi
Une fois le diagnostic établi, le suivi repose essentiellement sur les familles et accompagnants. Des bonnes pratiques ont été mises en oeuvre depuis 30 ans en Amérique du nord avec le soutien de travailleurs sociaux et surtout des associations de familles. Des « trucs et astuces » performants sont à connaître pour adapter le quotidien à ce handicap, sachant que c’est l’entourage qui doit s’adapter, et non pas l’enfant : il est possible de se procurer ces informations et documents fort utiles via le site de l’association de parents Vivre avec le SAF, créée en France en 2012 sur le modèle canadien.
L’association VIVRE AVEC LE SAF
Vivre avec le SAF est la première association nationale des familles adoptives, biologiques ou d’accueil concernées par les Troubles Causés par l’Alcoolisation Foetale. La connaissance des TCAF est insuffisamment développée en France. Les enfants et les adultes atteints sont rarement identifiés et très peu bénéficient d’un suivi spécifique. Un groupe de familles a donc créé cette association dédiée, à la suite d’années de souffrance et d’incompréhension dues à l’absence de diagnostic et de suivi adapté de leurs enfants. Vivre avec le SAF s’est donné comme objectifs de :
Partager les expériences
Entre parents de personnes affectées : échanger les « trucs » de la vie quotidienne pour vivre mieux. Les échanges sont quotidiens sur son groupe privé Facebook et très bientôt sur le forum de son site.
Diffuser l’information
Vivre avec le SAF a créé les premiers documents français d’aide aux familles grâce à l’aide de la CNSA2. Quatre dépliants d’information sont déjà édités et en voie de diffusion (familles, médecins scolaires, employeurs et police/justice), et un guide pour les parents, dérivé des guides canadiens, est prévu pour la fin 2015. Tous sont en téléchargement gratuit sur le site www.vivreaveclesaf.fr
Informer les professionnels de la gravité des problèmes vécus par les familles : médecins, enseignants, travailleurs sociaux, police, justice.
Soutenir une politique nationale de prévention, de diagnostic, de soins et de reconnaissance du handicap : Vivre avec le SAF est membre de SAFFRANCE, association médicale dédiée à ces objectifs.
Etablir des partenariats avec des associations similaires de l’Union Européenne ou d’autres pays : Vivre avec le SAF est membre de EUFASD (Alliance Européenne contre l’alcoolisation Foetale) qui regroupe des associations de familles dans la plupart des pays européens, et entretient des contacts avec des organismes ou associations du Canada et des USA.
« Il faut y croire » est un message fort transmis par l’association Vivre avec le Saf
« On sait que les handicaps primaires sont irréversibles mais pas irrémédiables. En effet, après seulement 3 ans d’existence, nos membres ont déjà pu constater que les bons comportements avec les enfants ou adultes touchés réduisent ou suppriment les troubles secondaires, et leur permettent de mener une vie presque - normale ».
« Dans ce combat quotidien, nous comptons beaucoup sur un maillon qui dépend de vous : le diagnostic ».
CONTACTS
Site : www.vivreaveclesaf.fr
Facebook : Vivre avec le Saf
Courriel : [email protected]
Tél. : 06 34 12 12 87 ou 06 16 29 62 29
SAF France : www.saffrance.com
EUFASD : www.eufasd.org
Consultation spécialisée : Service de neurologie pédiatrique - Hôpital Robert-Debré (Paris)
« La tête en désordre » (L’Harmattan), ouvrage de Catherine Dartiguenave et Stéphanie Toutain, paru en déc. 2014, présente quatre récits-témoignages saisissants de familles concernées et un 5ème chapitre technique destiné aux professionnels.
1 Centre d’Action Médico-Sociale Précoce (0-6 ans).
2 Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie
Article paru dans la revue “Association des Juniors en Pédiatrie” / AJP n°12

