Revue de presse : adjuvant palbociclib for early breast cancer

Publié le 10 May 2022 à 23:07


L’équipe de la revue de presse se réunit une fois par mois.  Chaque membre se voit attribuer une revue et y sélectionne un article de son choix, qu’il a trouvé important, original, novateur…  La revue de presse n’a pas vocation à être exhaustive mais plutôt à faire découvrir des articles et à amener discussion et réflexion. Elle est publiée chaque mois sur  le site de l’AERIO.  Bonne découverte !

PARTICIPANTS
Julien Vibert (Paris)
Julie Chartier (Paris) 
Léah MaillyGiacchetti (Paris)
Matthieu Delaye (Paris) 
Adrien Rousseau (Paris) 
Pauline Corbeaux (Lyon) 
Matthieu Roulleaux-Dugage (Paris),
Marc Nourrit (La Réunion) 
Arnaud Saillant (Poitiers) 
Adrien Procureur (Paris)

SÉLECTION D’ADRIEN R. 
Adjuvant Palbociclib for Early Breast Cancer: The PALLAS Trial Results (ABCSG-42/ AFT-05/BIG-14-03)
Michael Gnant et al. JCO
Les inhibiteurs de CDK 4/6 ont amélioré le pronostic des pa- tients avec un cancer du sein avancé, notamment le palbo- ciclib qui, associé à une hormo- nothérapie, augmente la PFS dans trois essais contrôlés ran- domisés (Paloma). Les effets secondaires étaient principale- ment une neutropénie réver- sible, avec un profil de tolérance globalement bon. L’étude de phase trois PALLAS étudie le pal- bociclib en adjuvant.

Il s’agissait d’une étude de phase trois multicentrique randomi- sée, en ouvert, de financement industriel. Il existait un comité d’adjudication indépendant. La population source était les pa- tients avec un cancer du sein de stade II ou III hormono-dé- pendant d’au moins 18 ans. Les patients devaient avoir terminé la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie si indiquée. La thérapie endocrinienne devait démarrer dans les 12 mois sui- vant le diagnostic. Il y avait une randomisation par blocs per- mutés, en 1 pour 1. Les patients recevaient soit deux ans de pal- bociclib avec l’hormonothérapie standard, soit l’hormonothé- rapie standard seule. Il existait une stratification sur le stade anatomique, la chimiothérapie adjuvante, l’âge et la région géo- graphique. Le palbociclib était démarré à la dose de 125 mg/jour de J1 à J21 pour des cycles de 28 jours. L’hormonothérapie était donnée pour une durée de cinq ans. Le critère de jugement prin cipal était la survie sans progres- sion invasive. Les deux groupes étaient comparables. Il s’agissait principalement de stade IIB ou III, avec un T2 dans la moitié des cas, un envahissement ganglion- naire dans 87 % des cas, un grade I ou II dans 67 % des cas, une chimiothérapie adjuvante ou néoadjuvante dans 82 % des cas. Il y avait 50,4 % de femmes ménopausées. Il y avait 0,6 % d’hommes. En termes de résul- tats, il n’y avait pas de différence significative à quatre ans sur la survie sans progression invasive ni sur la survie globale, ni sur la survie sans récidive locorégio- nale. Ces résultats étaient glo- balement homogènes dans tous les sous-groupes. En termes d’effets secondaires, il y avait surtout plus de neutropénie, d’anémie, de thrombopénie, de fatigue, de nausées, d’alopécie et de diarrhée dans le groupe palbociclib. Ces résultats dif- fèrent de l’étude monarchE, qui avait montré un bénéfice en survie sans progression inva- sive pour les patients traités en adjuvant par abémaciclib.

Trastuzumab Emtansine Plus Pertuzumab Versus Taxane Plus Trastuzumab Plus Pertuzumab After Anthracycline for High-Risk Human Epidermal Growth Factor Receptor 2–Positive Early Breast Cancer: The Phase III KAITLIN StudyMichael Ian E. Krop, et al. JCO
Cette étude de phase 3, KAITLIN, comparait le trastuzumab-em- tansine plus pertuzumab ver- sus taxanes plus trastuzumab et pertuzumab après la chimio- thérapie standard par anthra- cyclines pour les patientes avec un cancer du sein localisé HER2 + à haut risque N + et/ou T≥2). L’objectif était également de montrer la bonne tolérance, en maintenant une efficacité simi- laire, afin d’épargner les taxanes aux patientes. Il s’agissait d’un essai randomisé multicentrique en ouvert dans près de 288 centres. Il existait un comité d’adjudication indépendant en aveugle. Les patientes ont été randomisées en un pour un avec des permutations par blocs. Il existait une stratification par ré- gion, statut ganglionnaire, statut des récepteurs aux hormones, et type d’anthracycline. Les deux critères d’efficacité principaux étaient la survie sans progres- sion invasive dans la population N+ et dans la population globale. Les deux populations étaient ré- parties de la même manière. Il s’agissait quasi exclusivement de femmes, avec un âge médian à 51 ans, 60 % blanches, meno- pausées pour 46 % d’entre elles, avec principalement des tu- meurs entre 2 et 5 cm (60 %), en- vahissement ganglionnaire dans 90 % des cas, récepteurs aux hormones positifs dans 55 % des cas, HER2 +++ dans 80 % des cas. À trois ans, il n’existait pas de différence en survie. Dans tous les sous-groupes l’effet était le même. En termes d’effets secondaires, il existait un nombre d’ef- fets secondaires de grade III ou sérieux similaires dans les deux groupes. En revanche il y avait plus d’effets menant à l’arrêt des thérapies ou à une diminution de dose dans le groupe traité par trastuzumab-emtansine + pertu- zumab. En termes de qualité de vie, celle-ci était significativement meilleure avec le groupe trastu- zumab-emtansine pertuzumab.

Impact of Pain on Employment and Financial Outcomes Among Cancer Survivors Michael T. Halpern et al. JCO
Il s’agissait d’une analyse de base de données rétrospective, avec analyse multivariée pour estimer le rôle de la douleur dans le taux d’emploi et les caractéristiques financières des survivants au cancer. Seuls 43 % des adultes survivant de cancer ne rapportait aucune histoire douloureuse sur les sept derniers jours. Les individus qui reportaient des douleurs avaient une probabi- lité plus importante de moins bon emploi, de retraite précoce, de se sentir moins productifs et de manquer de confiance. Ceux qui avaient des douleurs étaient également plus à risque d’avoir des problèmes de dettes, et/ou d’incapacité à payer les factures médicales. Il y avait une relation dose effet entre la douleur et les conséquences so- cio-professionnelles.

SÉLECTION DE MATTHIEU 

Adjuvant Pembrolizumab after Nephrectomy in Renal-Cell Carcinoma
Choueiri TK, et al. N Engl J Med. 2021
Il n’existe pas de traitement ad- juvant ayant montré un béné- fice évident dans le cancer du rein, même à haut risque de récidive. Depuis l’étude S-TRAC, le sunitinib a une autorisation sur le marché américain mais pas ailleurs du fait d’un rapport bénéfice-tolérance insuffisant. Dans la KEYNOTE 564, étude de phase 3 randomisée, en double aveugle, muticentrique, interna- tionale, le pembrolizumab est étudié contre placebo en adju- vant après néphrectomie chez des patients avec un cancer du rein à haut risque de récidive (tumeur de stade 2 avec grade 4 histologique ou une différen- ciation sarcomatoïde, ou tumeur de stade 3 ou plus, ou envahis- sement ganglionnaire). Etaient également inclus des patients avec une maladie oligométasta- tique dont l’intégralité de la ma- ladie pouvait être résécable.

Les patients du bras expérimen- tal recevaient du pembrolizu- mab à la dose de 300 mg toutes les 3 semaines jusqu’à progres- sion, effet indésirable majeur ou jusqu’à un maximum de 17 cycles. Ce bras était comparé à un placebo.

Le critère de jugement principal de cette première analyse in- termédiaire pré-spécifiée était la DFS. L’OS, la sécurité et des questionnaires de qualité de vie étaient également mesurés.

994 patients ont été inclus, dont 496 dans le bras expérimental. L’âge médian était de 60 ans. 86  % des patients avaient une maladie de risque intermédiaire à haut, 8 % à haut risque et 6 % avaient une maladie oligométas- tatique.

L’étude est positive sur son CJP avec une diminution du risque décès ou de récurrence de 32 %. Les récurrences étaient princi- palement à distance. Bien que l’OS médiane soit non atteinte, les premiers résultats en OS montrent un HR à 0,54. Dans les analyses en sous-groupes, le bé- néfice est retrouvé chez les pa- tients ayant une maladie oligo- métastatique malgré leur faible effectif. En revanche le bénéfice apparait surtout dans le sous- groupe avec un score combiné PD-L1 supérieur ou égal à 1. Les données de sécurité sont habi tuelles, avec 30 % d’effets secon- daires de grade supérieurs à 3 dans le bras expérimental versus 19 % dans le bras placebo. Il n’y avait pas de décès toxique. Les données de qualité de vie sont également satisfaisantes avec une amélioration des scores FKSI-DRS et EORTC QLQ-C30.

Ainsi, le pembrolizumab pour- rait s’imposer comme nouveau standard en adjuvant dans les cancers du rein à haut risque après néphrectomie, d’autant que la mise à jour faite à l’ASCO GU 2022 confirme ces résultats impressionnants. Il sera intéres- sant de regarder les critères re- tenus par les autorités dans leur autorisation.

Immune-mediated diseases associated with cancer risk
Ming-Ming He et al. JAMA oncol.
Le surrisque de cancer chez les patients atteints de maladies auto-immunes a été principale- ment mis en évidence dans des études rétrospectives. Il concer- nait avant tout des cancers pri- mitifs des organes atteints par la maladie auto-immune  : can- cer colorectal dans les MICI, tu- meurs des voies biliaires dans les cholangites sclérosantes primitives (CSP), CHC dans les hépatites auto-immunes etc. Néanmoins, un sur-risque de cancer « à distance » a été mis en évidence pour certaines pa- thologies comme les CHC chez les patients atteints d’une recto- colite hémorragique (RCH).

Cette étude s’inscrit dans une étude plus large de cohorte prospective anglaise, UK Bio- bank study, qui s’intéresse aux facteurs génétiques et environ- nementaux de cancers. Les au- teurs ont étudiés la survenue de cancers chez les patients décla- rant une maladie auto-immune.

Parmi les 478753 patients de la cohorte, 61496 (13 %) avaient au moins une pathologie auto-im- mune (l’asthme, la polyarthrite rhumatoïde et la RCH étaient les plus représentées).

La présence d’une pathologie auto-immune est associée à un risque plus important de cancer (HR  : 1.08). Les auteurs confir- ment le sur-risque de cancer « local » pour un certain nombre de pathologie : CSP et tumeurs hépatobiliaires (HR  : 42), hépa- tite auto-immune et CHC (HR 21.26) mais aussi asthme et tu- meur bronchique (HR  : 1.34)… Ils retrouvent également le sur risque « à distance » comme les cancers l’oropharynx dans les hépatites auto-immunes (HR 27.7), PTI et CHC (HR 11.96), Guillain-Barré et sarcome des tissus mous (HR  : 11.17). Cer- taines associations étaient in- verses avec, par exemple, une diminution du risque de cancer de la prostate en cas de polyar- thrite rhumatoïde.

Les auteurs proposent plusieurs hypothèses pour expliquer ces variations du risque. Concernant les cancers «  locaux  », l’hypo- thèse est celle d’une inflamma- tion chronique et d’une dysré- gulation immunitaire favorable à la carcinogénèse. Concernant les cancers à distance, l’hypo- thèse proposée est celle d’une dysrégulation immunitaire, mé- diée en partie par un microbiote aberrant, le niveau de preuve le plus élevé concernant l’axe «  gut-oral  » pour le sur-risque dans le cancer de l’oropharynx dans les MICI. Un point relati- vement peu abordé, et c’est le défaut majeur de cette étude, concerne les prises médicamen- teuses anti-inflammatoires et im- munosuppressives. En effet, les traitements étaient simplement rapportés par les patients, avec les biais de déclaration que cela peut sous-tendre, sans notion de dose ou de durée. Bien que des ajustements aient été faits sur les médications, leur impact ne peut être réellement étudié du fait de l’imprécision de leur recueil. Les auteurs citent plusieurs articles rassurants sur le risque de can- cer sous traitement anti-inflam- matoire ou immunosuppresseur mais leur implication dans les résultats observés ne peut être écartée à l’heure actuelle.

Cette étude importante invite à la prudence chez les patients atteints de maladies auto-im- munes et pousse à développer des surveillances particulières chez ces patients, certaines étant déjà réalisées actuelle- ment, mais d’autres étant à dis- cuter et développer.

Article paru dans la revue “Association pour l'Enseignement et la Recherche des Internes en Oncologie” / AERIO n°3

L'accès à cet article est GRATUIT, mais il est restreint aux membres RESEAU PRO SANTE

Publié le 1652216858000