Réévaluation de la stratégie de dépistage

Publié le 13 May 2022 à 21:09

Des infections uro-génitales basses à Chlamydia trachomatis

La HAS recommande un dépistage systématique de l’infection à Chlamydia trachomatis chez les jeunes femmes, y compris les femmes enceintes.

E. PAGANELLI*
Groupe de travail HAS

En France, la chlamydiose est une des infections sexuellement transmissibles (IST) les plus répandues chez les jeunes femmes. Pourtant 60 à 70% d’entre elles ne présentent aucun symptôme et ignorent qu’elles ont été infectées. Le dépistage représente donc un outil majeur pour réduire la prévalence de l’infection.

La HAS recommande qu’au moins un dépistage de l’infection à Chlamydia trachomatis soit systématiquement réalisé chez les femmes sexuellement actives de 15 à 25 ans inclus, y compris les femmes enceintes. En cas de test négatif et de rapports sexuels non protégés avec un nouveau partenaire, le dépistage est répété chaque année. Si le test est positif, un traitement est défini et le dépistage est répété à 3-6 mois.
De plus, un dépistage opportuniste ciblé doit être proposé aux populations suivantes :
• les hommes sexuellement actifs, présentant des facteurs de risque, quel que soit l’âge ;
• les femmes sexuellement actives de plus de 25 ans, présentant des facteurs de risque ;
• les femmes enceintes consultant pour une IVG, sans limite d’âge.

Un dépistage plus accessible
La HAS préconise que ce dépistage, auparavant réalisé principalement dans des centres spécialisés à vocation de dépistage, soit davantage effectué dans les cabinets de médecine générale, de gynécologie, de sage-femme, dans les maisons de santé ou encore dans les centres d’examens de santé.

L’intensification de la proposition de dépistage en dehors des centres de santé doit s’accompagner d’une offre de formation des professionnels de santé à la santé sexuelle, au dépistage et au traitement des IST (incluant des outils spécifiques pour accompagner la mise en œuvre de la stratégie de dépistage). Les modalités de mise en œuvre et de financement de ces formations sont à définir.

Autre piste proposée par la HAS pour augmenter le recours au dépistage des populations à risque : promouvoir l’auto-prélèvement. En effet, le caractère intime des prélèvements peut dissuader de recourir au dépistage. Sans pour autant se substituer systématiquement au prélèvement réalisé par un professionnel de santé, l’auto-prélèvement vaginal pour les femmes et urinaire pour les hommes représente une alternative qui doit être proposée dans tous les lieux de dépistage. En revanche, les tests de diagnostic rapide (TDR) – utilisés pour leur facilité et rapidité d’accès dans le cadre d’autres maladies comme le VIH ou les hépatites B et C – ne sont aujourd’hui pas suffisamment performants dans le dépistage des infections à Chlamydia trachomatis pour être recommandés.

Le dépistage a deux objectifs majeurs : réduire le risque de complications à long terme chez la femme et limiter la propagation de l’infection au sein de la population, grâce à un traitement précoce.

Accompagner ces mesures de financements adaptés
La HAS recommande de garantir la pérennité d’un financement spécifique au dépistage de l’infection à Chlamydia trachomatis dans les CeGIDD et dans les CPEF, acteurs centraux de la stratégie de dépistage.

La HAS préconise d’élargir le remboursement à plusieurs sites de prélèvement, selon les pratiques sexuelles.

Risque de grossesse extra-utérine et d’infertilité tubaire ?
Les grossesses extra-utérines (GEU) et l’infertilité tubaire représentent les complications à long terme d’une infection à Chlamydia trachomatis non traitée. Il n’existe aucune étude prospective et donc aucune preuve directe du risque, pour une femme ayant une infection à Chlamydia trachomatis non traitée, de développer une infertilité tubaire ou une grossesse extra-utérine. La mise en œuvre d’études prospectives se heurte à des difficultés méthodologiques principalement liées au délai entre l’infection et le développement potentiel de ces complications, ainsi qu’à des problèmes éthiques liés à l’absence de traitement d’une femme infectée à risque de complications. Des informations sur le chemin causal entre l’infection à Chlamydia trachomatis et les complications type GEU et infertilité tubaire ont néanmoins été produites en calculant les probabilités de développer ces complications.

La prise en charge thérapeutique devrait-elle être modifiée ?
Les données disponibles aujourd’hui dans la littérature ne permettent pas de hiérarchiser, avec un niveau de preuve suffisant, l’azithromycine et la doxycycline pour le traitement des infections uro-génitales basses à Chlamydia trachomatis.

Dans l’attente de données démontrant les échecs de traitement/ résistances à l’azithromycine, le groupe de travail préconise de ne pas hiérarchiser les deux traitements dans l’actualisation des recommandations.

* Gynécologue médicale, Secrétaire générale du Syngof et Présidente du Collège de Gynécologie du Centre Val de Loire
* Dans les 12 derniers mois.
**Rapport anal non protégé par un préservatif dans les 6 mois, plus de dix partenaires dans les 6 derniers mois, sexe en groupe, usage de drogues récréatives pendant les relations sexuelles, personne vivant avec le VIH, diagnostic d’une nouvelle IST, PrePeur.
***(Notamment chez la femme enceinte et les HSH ayant une infection anorectale asymptomatique traitée par azithromycine 1g pendant 7 jours pour ne pas passer à côté d’une LGV, etc.).

Article paru dans la revue “Syndicat National des Gynécologues Obstétriciens de France” / SYNGOF n°115

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