Le SYNGOF a analysé les propositions relatives aux évolutions de pratique concernant l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP), le Diagnostic Prénatal (DPN) et l’Interruption Volontaire de Grossesse pour Motif Médical (IVMG).
M.AGOPIANTZ*
Une délégation du SYNGOF était reçue à l’audition publique du 3 septembre 2019, devant les membres de la Commission spéciale Loi de Bioéthique. Les gynécologues obstétriciens et les gynécologues médicaux sont en effet concernés en premier lieu par ces pratiques et leurs éventuelles évolutions. Cette note porte sur les Articles 1er, 2, 19, 20, 21, 22 du projet de loi.
Etaient présents lors de cette audition, les docteurs Bertrand de ROCHAMBEAU, Gynécologue-Obstétricien, Président du SYNGOF, Co-Président du BLOC, Arnaud GRISEY, Gynécologue-Obstétricien, représentant du SYNGOF au CNP GOGM et Mikaël AGOPIANTZ, Gynécologue médical et médecin de la reproduction, membre du CA du SYNGOF.
Le SYNGOF salue le fait que les professionnels de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP), collèges et sociétés savantes, se soient réunis afin de proposer des ajustements au Projet de Loi. A l’instar de ceux-ci, le SYNGOF s’accorde pour saluer les avancées majeures du projet de loi de bioéthique. Nous sommes particulièrement satisfaits de la sanctuarisation du rôle du médecin et notamment du gynécologue-obstétricien et médical, le renforcement de la liberté de la tiente, et la précision de l’application de la clause de conscience dans le cadre de l’IVG.
Article 1er
L’Article 1er de la loi est dense et complexe. Il sort la pratique de l’AMP du médical strict en la plaçant aux confins du sociétal et du médical, ce qu’elle a toujours été. Une réponse par prise en charge médicale, à une problématique sociétale, le désir d’enfant. L’ouverture aux couples de femmes est une mise en cohérence des textes votés depuis 2014 par le Parlement.
Il définit également le contexte de la prise en charge initiale de l’AMP, encadrant la pratique, au bénéfice des femmes et des couples.
Dans le cadre des dispositions relatives au devenir des embryons cryoconservés, les centres privés à but lucratifs sont exclus de l’activité de soins. Le SYNGOF, tout comme les professionnels de l’AMP du public et du privé, excepté la Fédération des CECOS, s’insurge contre la discrimination faite envers les centres d’AMP privés et dénonce le caractère inéquitable de l’accès aux soins pour les patients. Cette disposition inacceptable que l’on retrouve pour l’autoconservation des gamètes dans l’Article 2 est un frein majeur pour l’accessibilité aux soins, que ce soit en termes de délais ou en termes de répartition territoriale. C’est nier que les professionnels du privé travaillent dans les mêmes exactes conditions d’éthique médicale, d’autorisation et de contrôle que les centres publics ou privé à but non lucratif.
A terme, cette discrimination privera les patientes d’un accès plus rapide au don d’ovocyte et organise la pénurie de l’offre. Actuellement, le service public est en effet incapable de répondre à la demande, avec des délais qui dépassent 2 ans pour l’obtention d’un don d’ovocytes. Le SYNGOF rejoint les professionnels de l’AMP, publics et privés, qui s’accordent dans leur ensemble pour exiger qu’aucune différence ne soit faite entre les centres publics et privés pour la pratique des différentes activités d’AMP, dont l’autoconservation ovocytaire qui doit faire partie intégrante de l’autorisation FIV.
De la même manière, il serait grand temps de lever le monopole de fait sur les activités de don de sperme, monopole qui crée la pénurie relative depuis plusieurs décennies, pénurie qui sera sans aucun doute prétexte à la mise en place de mesures discriminatoires envers les couples de femmes et les femmes seules, qui avaient été évoquées par ladite Fédération des CECOS dès 2017 auprès de « ses praticiens ».
En conséquence, le SYNGOF s’associe aux professionnels de l’AMP qui demandent qu’il soit spécifiquement écrit dans le texte de loi que l’accès à l’AMP aux couples de femmes et aux femmes non mariées soit équivalent à celui des couples hétérosexuels en termes de recevabilité de la demande et de délai de prise en charge.
Article 2
L’Article 2 autorise l’autoconservation des gamètes hors motif médical.
Cette disposition devrait être assortie de quelques mesures associées :
• Une interdiction des pressions exercées par les employeurs, comme nous en avons eu l’exemple aux Etats-Unis.
• Une information systématique en amont du choix, par le développement de consultations de conseils en fertilité.
De plus, il nous semble qu’il n’appartient pas à la Loi de bioéthique de discuter des conditions de remboursement.
Enfin, nous réitérons notre refus de l’exclusion des centres privés et de l’exercice privé, en général, de l’activité.
Article 19
L’article 19 renforce la garantie d’information contrôlée médicalement des patientes et encadre totalement la pratique du DPN par un arêté ministériel qui définit les recommandations de bonnes pratiques médicales dans le domaine. Cet arrêté sera pris sur proposition de l’agence de biomédecine et de l’agence nationale de sécurité des médicaments. Médicalement tout repose sur ces agences. Les Conseils Nationaux Professionnels de nos spécialités de la naissance (GO, GM, Pédiatres, Néonatologues), qui ont été créés à cet effet, ne seront sollicités qu’au bon vouloir des agences.
Ce n’est pas possible de l’accepter.
Article 20
Cet article précise les différents cadres d’application de l’activité d’IVG à motif médical. Il encadre donc cette pratique. Il permet à la femme ou au couple d’être entendu par la commission, directement ainsi que par l’intermédiaire d’un médecin que l’on peut qualifier de confiance.
Article 21
Cet article encadre mieux les activités de préservation de fertilité pour motif dit médical, et notamment la problématique du consentement des mineurs et les indications de réutilisation des tissus, notamment des tissus germinaux.
Dans son 2ème alinéa, l’article interdit de fait l’utilisation post-mortem des gamètes et tissus germinaux ainsi conservés. La majorité des sociétés savantes de la discipline se sont prononcées pour l’ouverture au postmortem de l’activité d’AMP sous certaines conditions. Cette question se retrouve dans de nombreuses dispositions qui parsèment le texte, et notamment dans l’Article 1er. Cependant, il n’appartient pas au syndicat d’intervenir sur ce terrain.
Article 22
Cet article va dans le bon sens : il sécurise les pratiques. D’une part, il renforce le rôle prépondérant du médecin dans la démarche d’IVG pour motif médical, et notamment du spécialiste en gynécologie-obstétrique. D’autre part, il réaffirme la clause de conscience spécifique à l’activité d’IVG, y compris pour motif médical, devant le caractère particulier de l’activité de soins. Enfin, l’IVGM peut être pratiquée dans tout établissement public ou privé.
Article paru dans la revue “Syndicat National des Gynécologues Obstétriciens de France” / SYNGOF n°118