Prévention chez les internes – Repérer les signes du Burn-Out

Publié le 21 Mar 2024 à 17:52
Article paru dans la revue « AFIHGE - Le journal des Jeunes gastro » / JJG AFIGHE N°2


Le “burn-out” (ou syndrome d’épuisement professionnel en version francophone) est un syndrome malheureusement très souvent retrouvé chez les étudiants en médecine. En 2021, on recensait jusqu’à 67 % d’entre eux (de la P1 à la fin de l’internat) concernés par l’épuisement professionnel, mais il est pourtant encore trop souvent méconnu.

Définition

Le syndrome d’épuisement professionnel désigne un état d’« épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel » et a initialement été décrit dans les années 1970 dans les professions d’aide à la personne.

Il recouvre trois dimensions :

  • L’épuisement émotionnel et physique.
  • Le cynisme vis-à-vis du travail (perte de l’empathie, déshumanisation, indifférence).
  • La diminution de l’accomplissement personnel au travail et de l’efficacité professionnelle.
  • Il peut alors entraîner une diminution de la qualité des soins prodigués ainsi qu’une augmentation du risque d’erreurs médicales. De plus, il favorise les conduites addictives et lorsqu’il n’est pas repéré et traité à temps il peut mener à une dépression caractérisée voire, dans le pire des cas, au suicide.

    Facteurs de risques

    Le burn out résulte d’un stress chronique à l’origine d’un déséquilibre entre une usure trop importante (pouvant être causée par une surcharge de travail, un sentiment d’injustice, un manque de reconnaissance, etc.) par rapport aux ressources de l’individu pour récupérer de l’énergie (bon équilibre vie professionnelle/vie privée, bonne relation avec ses collègues, trouver un sens à son travail, etc.).

    Il n’est donc pas tant la conséquence d’un stress extrême mais plutôt d’un déséquilibre entre le stress quotidien et le « return », c’est-à-dire une gratification ou au moins un sentiment d’efficacité. Le burn out apparaît généralement lorsque ce « return » s’affaiblit.

    Le rapport Gollac décrivait 6 facteurs de risque psychosociaux, dont la majorité sont volontiers retrouvés dans notre profession :

    • Intensité et organisation du travail (surcharge de travail, imprécision des missions, objectifs irréalistes…).
    • Exigences émotionnelles importantes avec confrontation à la souffrance, à la mort, dissonance émotionnelle ;
    • Autonomie et marge de manœuvre limitées ;
    • Relations dans le travail (conflits interpersonnels, manque de soutien du collectif de travail, management délétère…) ;
    • Conflits de valeurs ;
    • Insécurité de l’emploi.

    De plus, certains facteurs personnels peuvent aggraver le burn-out, dont en voici certains exemples :

    • Des antécédents personnels et familiaux ;
    • De lourdes responsabilités familiales ;
    • Des conflits personnels ;
    • La solitude affective ;
    • Manquer d’estime de soi ;
    • Une personnalité perfectionniste avec des attentes élevées envers soi-même ;
    • Ne pas poser ses limites dans un contexte de surcharge de travail ;
    • Ne pas savoir déléguer ou travailler en équipe ;
    • Faire de son travail le centre de sa vie.

    Symptômes

    Si le burn out semble être avant tout un syndrome psychique, il se traduit pourtant d’abord par des signes physiques :

    • Fatigue permanente ;
    • Tensions musculaires, crampes, mal de dos ;
    • Insomnies ;
    • Céphalées ;
    • Troubles gastro-intestinaux, maux de ventre ;
    • Troubles cutanées ;
    • Infections fréquentes, etc.

    Ces signes peuvent disparaître spontanément mais ne préjugent cependant pas d’une amélioration durable de l’état de santé.

    Une souffrance psychique et des troubles cognitifs peuvent également se manifester :

    • Vide émotionnel ;
    • Tristesse ;
    • Anxiété, irritabilité, hypersensibilité ;
    • Comportements agressifs voire parfois violents ;
    • Sentiment de dépassement, d’échec et démotivation ;
    • Difficultés de concentration, troubles de l’attention et de la mémoire ;
    • Troubles des fonctions exécutives tels que penser, s’organiser, apprendre, etc.

    Si le burn out semble être avant tout un syndrome psychique, il se traduit pourtant d’abord par des signes physiques...

    Puis la personne épuisée devient anormalement froide et indifférente, avec une perte de l’empathie, un isolement social et enfin l’apparition d’un cynisme inhabituel. Cette “dépersonnalisation” correspond en fait à une déshumanisation de la relation à l’autre : c’est une fonction défensive vis-à-vis de l’épuisement professionnel.

    Enfin, des troubles du comportement alimentaire voire des toxicomanies (alcool, drogues, médicaments) peuvent s’y associer.

    L’ensemble de ce syndrome forme donc un continuum depuis des symptômes physiques peu spécifiques, variables en intensité et d’une personne à l’autre, jusqu’à un véritable mal-être psychique d’installation pourtant insidieuse, le rendant si difficile à repérer.

    Des questionnaires existent et peuvent apporter une aide dans l’évaluation, tels que le « Maslach Burnout Inventory » (MBI) ou le « Copenhagen Burnout Inventory » (CBI).

    Mesures préventives

    Divers moyens existent pour réduire le risque d’épuisement professionnel :

    • Être à l’écoute des symptômes physiques et psychologiques liés au stress ;
    • Discuter avec ses collègues et son supérieur de l’organisation du travail ;
    • Apprendre à prioriser et à déléguer ;
    • Savoir dire “non” de temps en temps ;
    • Eviter de comparer ses performances à celles de ses collègues ;
    • Se réserver du temps pour soi, sa famille, ses loisirs, et couper tout ce qui a trait au milieu du travail dans ces temps-là (emails, messages, etc.).

    En outre, l’activité physique régulière a également montré un bénéfice pour réduire le risque de burnout chez les étudiants en médecine.

    Le plus important est de ne pas garder ce stress accumulé pour soi. Si vous êtes face à ces difficultés parlez-en, à vos proches, à vos co-internes, à vos chefs, à un psychologue, à qui vous voulez et en qui vous avez confiance. Si les chiffres que l’on vous a donnés sont si alarmants c’est bien que vous n’êtes pas seul dans ce cas et il n’y a aucune honte à avoir, parfois le premier pas est tout simplement de se sentir compris et épaulé.

    Traitement

    Si les mesures de prévention n’ont pas été suffisantes et que l’épuisement professionnel persiste, il faudra tout d’abord passer par un arrêt de travail de courte durée. L’extraction du milieu en cause sera la méthode la plus bénéfique pour se reposer efficacement et prendre des mesures pour que son retour au travail s’accompagne des changements nécessaires.

    Il peut également être conseillé de consulter un psychologue voire de suivre une thérapie comportementale et cognitive, particulièrement efficace dans ce syndrome.

    Enfin, lorsque le burn out est responsable de troubles dépressifs, un traitement antidépresseur peut être temporairement associé au traitement psychothérapeutique.


    Clémentine ALITTI

    Merci à


    Mme Laurence GEFFROY
    Psychologue Hospitalière au CHU Bicêtre
    pour la relecture de cet article

    Références

  • Enquête 2021 : Santé Mentale et Jeunes Médecins : Dépression, burn-out, humiliation et harcèlement : La santé mentale des futurs médecins en danger ! - ISNAR-IMG, ANEMF et ISNI.
  • Burn out – Repérage et prise en charge - Article HAS (Mise à jour du 12 juin 2019).
  • Comment repérer le burn-out et y faire face ? - Le Monde.
  • Burn out (article en ligne, mis à jour le 08/04/21) - Le Vidal.
  • Stress au travail : tout savoir sur le burn-out - Santé Pratique Paris - Magazine de l’Assurance Maladie de Paris.
  • Taylor CE, Scott EJ, Owen K. Physical activity, burnout and quality of life in medical students: A systematic review. Clin Teach. 2022 Dec;19(6):e13525. doi: 10.1111/tct.13525. Epub 2022 Sep 2. PMID: 36052814; PMCID: PMC9826463.
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