Nouvelles recommandations ESC 2018 : 4e définition universelle de l’infarctus du myocarde

Publié le 24 May 2022 à 12:42

Auteur
David SULMAN
Interne à Paris

Relecture
Benoit LATTUCA
Cardiologue au CHU de Nîmes

Ces vingt dernières années ont été une révolution concernant la définition de l’infarctus du myocarde (IDM) et de ses différents cadres nosologiques basés sur les caractéristiques cliniques, électrocardiographiques, angiographiques mais surtout associés à l’évènement des nouveaux bio-marqueurs cardiaques comme la Troponine T et son variant ultra-sensible.

La principale nouveauté par rapport aux anciennes recommandations (2012) est l’introduction du terme de lésion myocardique aiguë.

Ceci répond au besoin de définir les élévations de Troponine en l’absence de signe d’ischémie aiguë, ces situations étant associées à un pronostic plus défavorable qu’en cas de taux normal, et ce malgré l’absence de contexte clinique ou de modification électrocardiographique. Cela oblige dorénavant tout clinicien, à constamment distinguer une élévation des bio-marqueurs secondaire à un infarctus du myocarde (« myocardial infarction »), d’une lésion myocardique aiguë (« myocardial injury ») sur un processus non ischémique.

Classification ESC 2018 de l’IDM en 5 types
IDM de Type 1
De loin la forme la plus fréquente, il s’agit d’une conséquence d’une complication athéromateuse à type de rupture ou érosion de plaque définie par une élévation et/ou baisse de Troponine associée à des signes d’ischémie aiguë coronaire parmi :

  • Symptômes d’ischémie aiguë myocardique.
  • Modifications dynamiques de l’ECG ou apparition d’ondes Q pathologiques.
  • Apparition d’une anomalie de cinétique segmentaire ou de viabilité myocardique à l’imagerie dans une zone compatible avec de l’ischémie coronaire.
  • Identification d’un thrombus coronaire à l’angiographie.

IDM de Type 2
Conséquence d’un déséquilibre entre besoins et apports en oxygène du myocarde défini par l’élévation et/ou la baisse de la Troponine associée à au moins l’un des signes suivants :

  • Symptômes d’ischémie aiguë myocardique. Modifications dynamiques de l’ECG ou apparition d’ondes Q pathologiques.
  • Apparition d’une anomalie de cinétique segmentaire ou de viabilité myocardique à l’imagerie.

Les IDM secondaires à un spasme coronaire ou dissection coronaire rentrent dans le type 2 de la classification.

L’un des points clés de ces recommandations est de retenir que la situation de l’IDM de type 2, plus fréquent chez les femmes, correspond à de « multiples scénarios possibles au pronostic souvent plus défavorable en termes de mortalité que l’IDM de type 1 ! ».

IDM de Type 3
Pas de changement dans les recommandations actualisées, sont classifiés comme tels les décès d’origine cardiaque probable n’ayant pu bénéficier d’une confirmation biologique malgré une forte suspicion.

IDM de Type 4
Les nouvelles recommandations définissent plus précisément les seuils pour évoquer un infarctus péri-procédural, arbitrairement défini, dans les 48h après l’angioplastie, par l’augmentation de la troponine au moins 5 fois par rapport au 99e percentile du test utilisé chez un patient avec une valeur de base normale ou une élévation de plus de 20 % pour les patients avec une valeur élevée mais stable. Doivent s’ajouter à cette définition biologique, les critères précédemment décrits pour parler d’infarctus du myocarde de type 4 (modification électrique, perte myocardique en imagerie, thrombus ou diminution du flux en angiographie).

IDM de Type 5
Parallèlement à l’infarctus de type 4, il s’agit d’un IDM iatrogène au décours d’un pontage aorto-coronaire défini, dans les 48 heures qui suivent le geste par une élévation Troponine de plus de 10 fois par rapport à la normale ou de plus de 20 % pour les patients avec une valeur élevée mais stable ainsi que les mêmes critères attestant d’une ischémie aiguë précédemment décrits.

Malgré la place centrale de la troponine dans ces définitions, la variation de ce marqueur et surtout l’association à des critères cliniques ou d’imagerie en faveur d’une ischémie myocardique aiguë gardent une place prépondérante comme présentée dans la figure suivante :

Par ailleurs, cette mise à jour 2018 a vu l’apparition de nouvelles sections concernant le syndrome de Tako Tsubo, les récurrences ischémiques, les IDM sur maladie chronique rénale ou ceux d’origine non obstructive pour définir plus précisément et mieux appréhender ces situations particulières.

Enfin, les recommandations insistent sur la place grandissante du coroscanner et surtout de l’IRM cardiaque pour le diagnostic étiologique de l’IDM et une adaptation thérapeutique optimale.

Référence
ESC Clinical Practice Guidelines 2018, Fourth Universal Definition of Myocardial Infarction, Reference European Heart Journal 2018 doi : 10.1093/eurheartj/ehy462.

Article paru dans la revue “Collèges des Cardiologues en Formation” / CCF N°5

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