Les stages d’interne en libéral - D’ou venons-nous ?

Publié le 04 Aug 2023 à 11:27

En 2016, alors que s’annonçait les réformes des 3 cycles d’études médicales et, donc la R3C (réforme du 3ème cycle), l’accueil des internes de spécialité en libéral connaissait déjà ses premières initiatives locales. Il existait déjà des postes en établissements privés mais dont le fonctionnement, certes en milieu libéral, n’était, pour les internes, qu’une transposition de ce qu’ils vivaient dans les centres hospitaliers.

Plus intéressant étaient les stages en pédiatrie et en gynécologie. En effet, rendus obligatoires dans le cursus de l’internat de médecine générale, les capacités d’accueil en CH et en CHU ont été rapidement dépassées et les Départements de Médecine Générale ont donc pris l’initiative de se tourner vers les médecins libéraux, gynécologues et pédiatres, pour accueillir les internes de médecine générale. Fort logiquement, les internes de spécialité ont mal vécu ce qu’ils considéraient comme une inéquité et certaines facultés, dont celle de Montpellier à l’initiative des Pr LAMBERT, MORIN et AMOUYAL, ont mis en place, dans un esprit gagnant/gagnant, l’accueil des internes de pédiatrie et de gynécologie médicale en libéral.

Quelques années plus tard, on constate un engouement croissant pour ce modèle et, finalement, un constat rassurant pour les coordonnateurs de DES dont les services n’ont pas été vidés d’internes qui, au contraire, revenaient parfois enrichis de cette formation.

À la même époque, Tours ouvrait 5 spécialités (pneumologie, pédiatrie, psychiatrie, radiothérapie, urologie) et Toulouse accueillait, hors de ce contexte, les internes en gynécologie médicale. Et dans le reste de la France, à Nancy et à Bordeaux, les premiers Maîtres de Stage Endocrinologues accueillaient leurs premiers internes.

Alors chargé par l’URPS Occitanie de ce dossier, ayant rencontré le doyen de l’époque et le responsable du 3ème cycle, ces derniers avaient eu, sans se concerter, la même phrase: “il va falloir préparer le changement de mentalités et celui-ci est à 5 vitesses”. La suite, que nous vivons actuellement, leur donne totalement raison.

En 2017, pourtant, dans la revue du Conseil National de l’Ordre des Médecins, le Pr Patrice DIOT, Doyen de la faculté de médecine de Tours, écrivait : “la formation ne peut plus aujourd’hui restée hospitalo-centrée (...) nous avons ouvert 7 spécialités(...) et tâchons de convaincre les autres collèges de l’intérêt de ces stages mais cela demande de lever un certain nombre de freins, culturels notamment. Certains de mes collègues n’envisagent pas la formation autrement qu’hospitalo-centrée. Nous sommes là pour préparer les étudiants aux différents modes d’exercice de la médecine et pas seulement hospitalière. Pour que des jeunes médecins s’installent en libéral, il faut leur donner envie et, donc, leur faire expérimenter la médecine de ville. Par ailleurs, notre système de santé est engagé dans un virage ambulatoire et les facultés doivent intégrer cette notion”. Une telle clairvoyance était stupéfiante à l’époque et force est de constater qu’elle a commencé à faire son chemin, faisant apparaÎtre du coup de façon plus contrastée l’hétérogénéité plus que des pratiques mais des mentalités.

Pourtant, et nos collègues de médecine générale le vivent depuis plus de 20 ans, l’enseignement pratique, le compagnonnage donne de nouvelles lettres de noblesse à la médecine libérale. C’est un modèle qui fonctionne de façon largement éprouvée. Il s’agit d’un modèle clairement gagnant/gagnant. Outre le plaisir de transmettre son savoir-faire à son apprenti, cela permet aussi au médecin de rencontrer un futur remplaçant, collaborateur voire un futur associé, de bénéficier aussi d’une acquisition de connaissance plus récente qui, en synergie avec l’expérience du Maître de stage peut déboucher sur une nouvelle vision des prises en charge. Sans compter un gain financier puisque les consultations des internes sont facturées comme une consultation du maître de stage (rien de moins que ce qui est pratiqué quotidiennement et depuis toujours à l’hôpital). À l’époque, le leitmotiv était “il n’y a pas de demande des internes”. En réalité, il était notoire qu’il y avait des pressions - plus ou moins implicites - et que les demandes des internes existaient bien mais en off et anonymes

Le sondage récent réalisé par l’ANIDEN démontre bien (avec un chiffre de 96  % sur 113 réponses reçues) cette demande réelle des internes.

Où en sommes-nous en 2023 ?

C’est sur cette question que s’ouvre ce dossier. De plus en plus de libéraux sautent le pas. Certains visionnaires comme nos collègues de Lyon ou de Strasbourg nous font partager leur expérience et nous livrent les clés de leurs parcours. Les internes nous livrent un retour d’expérience clairement positif et, à travers un sondage inédit par sa nature et son ampleur, nous exposent leurs ressentis et leurs attentes, à la hauteur de l’enjeu. Ils nous demandent, nous, libéraux, de les accueillir et de les former.

À nos collègues : Après avoir lu ce dossier, j’espère que vous vous poserez juste ces 3 questions : avez-vous envie de devenir Maître de Stage ? Acceptez-vous encore que l’on vous en empêche et que l’on empêche les internes ? Souhaitez-vous que la FENAREDIAM et l’ANIDEN vous guident ? Si la réponse à ces deux premières questions se jouera dans le secret de vos choix, la réponse à la troisième est déjà connue : un groupe de travail des 2 associations que l’on souhaite en collaboration avec vos associations locales travaille à pouvoir vous livrer la solution quasiment clé en main. Nous souhaitons en discuter de vive voix avec les 2 Collèges d’Enseignants afin de travailler en harmonie autour des futurs duos Maître de Stage/internes.

Aux internes : Merci d’avoir exprimé votre voix… cette voix qui était le chaînon manquant et qui maintenant nous porte tous…


Dr Edouard GHANASSIA
Endocrino-diabétologue, Echographiste Sète,

Paris

Article paru dans la revue « Génération Endocrinologie Diabétologie Nutrition »  / GENERATION S ENDOC N°01

 

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