Les grands moments du voyage : l'ECNP et la brain food

Publié le 27 May 2022 à 08:25


Le congrès du Collège Européen de Neuro-Psycho-Pharmacologie (ECNP) s'est déroulé du 6 au 8 octobre 2018 à Barcelone.

J’ai trouvé génial l’idée du comité d'organisation de cette année : associer au programme scientifique du congrès des activités alternatives en lien avec la santé mentale, comme une session de ‘’Brain food’'. Ce sujet est discuté de plus en plus en ce moment et montre l’importance du régime alimentaire pour le bien-être psychique et l’implication de carences alimentaires dans les troubles psychiatriques. Il y avait aussi une salle de méditation de pleine conscience avec un instructeur de yoga, et une session de course à pied de cinq kilomètres avec le président du congrès et quelques dizaines de participants ! Cela a permis de sensibiliser le public à l’importance du sport dans la santé en général et surtout dans la santé mentale.

Au niveau scientifique, le programme a été très divers avec des thématiques classiques de recherche fondamentale et clinique, mais également des thématiques plus innovantes telle que la place du numérique dans la prise en charge en psychiatrie. 

Radu Iuga
Interne de psychiatrie à Besançon

Le CNIPSY et son Hackaton

Les 17 et 18 octobre 2018 les internes français se sont retrouvés dans la capitale des Flandres pour échanger sur le thème des réseaux lors de leur rendez-vous annuel :
Le Congrès National des Internes en Psychiatrie (CNIPSY).

Ce thème large et pourtant crucial dans l’exercice quotidien du métier de psychiatre a permis d’aborder les différentes facettes du rôle désormais attendu des psychiatres : experts médicaux, leaders, collaborateurs, communicateurs, érudits/chercheurs, et promoteurs de la santé mentale.

Outre les internes en psychiatrie, de nombreux organismes ont participé à l’évènement : des associations d'usagers de santé mentale comme l’Union Nationale de Famille et Amis de personnes Malades (UNAFAM) et l'Étoile bipolaire  ; des associations de professionnels de santé mentale comme Médecins Sans Frontières, l’AFFEP, l’Union Européenne des Médecins Spécialistes, la Fédération Européenne des Internes en Psychiatrie (EFPT), le Collège National des universitaires de Psychiatrie et l’Association pour les praticiens hospitaliers et assimilés (APPA). Étaient également représentés les établissements de santé comme le CHU de la Réunion, les établissements publics de santé mentale (EPSM) du Nord-Pas de Calais, le groupe Clinéa et des organismes de communication comme la Fédération Hospitalière de France (FHF-Psy) et le PSYCOM. Enfin on retrouvait des assureurs spécialisés en santé comme La Médicale et la MACSF

Le congrès se voulait être un lieu d’échange, favorisant collaboration interprofessionnelle et innovation. Pour cela, outre les sessions plénières et ateliers, organisateurs ont également proposé un hackathon technologique intitulé #disruptmasantémentale.

Processus créatif fréquemment utilisé dans le domaine de l’innovation numérique, le hackathon est une forme de challenge qui regroupe sur quarante-huit heures de petites équipes afin de réfléchir sur une problématique précise. Le rassemblement en équipe d'un nombre restreint facilite la création de liens et le travail collaboratif.

L’idée était de donner aux professionnels en formation l’occasion d’apprendre à travailler en intelligence collective dans le champ de la santé mentale, et d’utiliser le potentiel de chacun pour améliorer la santé mentale de tous. Le focus s’est porté sur la e-santé, champ en pleine expansion qui incarne non seulement l’espoir d’innovations permettant la détection de certains symptômes et la prise en charge précoce des maladies mentales, mais également celui d’une révolution dans la façon dont on approche ces maladies. S’il parait évident que le domaine de la santé mentale a besoin de dispositifs innovants, et si beaucoup considèrent désormais l’innovation digitale comme une priorité stratégique, le pouvoir disruptif de la e-santé mentale est tel qu'une collaboration interprofessionnelle et avec les usagers est essentielle afin de s'assurer que les nouveaux paradigmes issus des dispositifs de e-santé répondent aux besoins des usagers du système de soins. Il est nécessaire d’accompagner les projets et de développer de nouvelles compétences.

Ainsi se sont constituées 5 équipes d’étudiants en psychiatrie, d’étudiants infirmiers et étudiants en informatique. Ils ont travaillé sous l’œil expert et les conseils avisés des représentants des usagers et de responsables de chaque filière, pour proposer un projet permettant d’améliorer les soins en santé mentale.  

Les projets étaient tous d’excellente qualité, mais il fallait les départager ! Deux équipes se sont vues récompensées le vendredi soir : l’équipe LIMO et l’équipe #InMyHead.

Retrouvez les interviews des équipes gagnantes juste en dessous !  Le CNIPSY LILLE 2018 tient à remercier l’ensemble des collaborateurs au projet, notamment l’institut de soins infirmiers de la catho, la faculté libre des sciences économiques et de gestion de Lille (FLSEG), les masters du RIZOMM pour avoir organisé l’emploi du temps de leurs étudiants afin que ceux-ci puissent participer à l’événement, et l’ensemble des participants qui ont fait vivre ce beau projet et continuent à le faire vivre. En effet, l’une des équipes travaille à la recherche de financements pour développer leur idée, et l’un des participants y a puisé son sujet de thèse d’exercice ! Un grand bravo à toutes et tous !

Venez nombreux au prochain CNIPSY 2019 à Bordeaux. L’équipe d’organisation est en train de vous préparer un programme aux petits oignons. Un bon courage à eux, et au plaisir de tous vous retrouver bientôt ! 

Audrey FONTAINE

Découvrez ci-dessous la présentation du projet ayant remporté le premier prix  !
1er prix : ÉQUIPE GAGNANTE : LIMO
Chefs d’équipe : Radu Iuga & Alexandru Terbea

Les études épidémiologiques montrent que le trouble bipolaire touche environ 1 à 4 % de la population générale et que plus d'une moitié des patients atteints d'un trouble bipolaire vont débuter leur symptomatologie avant l'âge de 21 ans. Un patient sur quatre diagnostiqué avec un trouble bipolaire va faire une tentative de suicide et environ 15 % vont décéder par suicide. De plus, le trouble bipolaire est considéré par l'Organisation Mondiale de la Santé parmi les dix maladies les plus invalidantes.

L'utilisation du Lithium a montré une efficacité importante dans la manie aiguë, la stabilisation au long terme du trouble bipolaire, ainsi qu'une diminution du potentiel suicidaire jusqu'à celui de la population générale. Malgré cela le Lithium reste peu utilisé à cause d'une réticence des médecins due à la zone thérapeutique restreinte, la toxicité importante aux doses supérieures à la zone thérapeutique, aux nombreux effets indésirables graves, et aussi au protocole contraignant de mise en place du traitement avec des dosages fréquents de la lithiémie et le maintien d'une surveillance étroite tout au long du traitement.

Nous proposons un dispositif de dosage en temps réel de la lithiémie capillaire avec l'aide d'un capteur attaché à un patch en utilisant les principes de la iontophorèse inverse et chromatographie ionique. Le résultat sera transmis et stocké sur un serveur et sera accessible au patient grâce à une application mobile et aux spécialistes de la santé mentale via un logiciel.

Le patient sera prévenu par une notification en cas de survenue d'un surdosage qui pourrait mettre en péril sa vie et pourra également déclarer des effets indésirables directement sur l'application. 

Ce concept va simplifier la mise en place et la surveillance du traitement, va aider à trouver la dose efficace du traitement ce qui va faciliter la décision médicale partagée, va réduire la fréquence des rechutes et des hospitalisations, et va prévenir un éventuel surdosage du traitement avec toutes ses conséquences, et tout cela pour une stabilisation du trouble bipolaire et l'amélioration de la vie de patients.

Découvrez maintenant l'interview de Sarah Martinez et Pauline Boiroux, deux internes de Montpellier présentes au Hackaton cette année  :

A.F. : Comment as-tu décidé de participer au HACKATON ?
P.B. : Par hasard... Je n’avais aucune idée de ce qui m’attendait. Lorsque tu nous a annoncé qu’on allait rester 48h dans une pièce à essayer de développer une idée, je dois t'avouer que ma première pensée a été de prendre la fuite !
S.M : A vrai dire je n’avais pas tout à fait compris de quoi il en retournait. Je m’étais inscrite à ce que je pensais être une table ronde de discussion entre professionnels et usagers de santé mentale. Quand j’ai compris ce que c’était, j’ai trouvé le concept plutôt cool tout en ne me sentant absolument pas prête à y participer !

A.F. : Raconte-moi ta journée !
P.B. : Nous avons formé une équipe avec Naël, Nicolas, Marion, Cécile et Amandine, qui sont respectivement étudiants en informatique, étudiantes infirmières et formatrice à l’IFSI. On était tous un peu paumés au début mais rapidement les idées ont fusé. Au final, on a réalisé un projet qui nous a tous emballé, on y croyait à peine ! Sans qu’on se rende compte de comment on en était arrivés là, on avait réalisé un prototype d’appli en moins de 48h.
S.M. : La première matinée a été un peu laborieuse. On a commencé par faire un brainstorming pour trouver une idée. Il en est ressorti des choses très intéressantes mais nous n’étions qu’entre professionnels de santé : Amaury et Julie, étudiants en soins infirmiers, et moi-même. On sentait qu’il nous manquait un regard extérieur pour bien définir notre projet et surtout déterminer sa faisabilité. Quand Antoine et Fabien, tous les deux étudiants en école d’informatique, sont arrivés, on est repartis de plus belle et on ne s’est plus arrêtés jusqu’au lendemain soir. On avait beaucoup d’idées et le plus dur était parfois de cerner ce qui était vraiment intéressant et ce qu’il valait mieux laisser de côté pour le moment.

A.F. : Qu’en as-tu retiré ?
P.B. : Ça a été une expérience très enrichissante, d’un point de vue intellectuel et relationnel. On a rarement l’occasion de travailler avec d’autres corps de métier que des soignants et se retrouver autour d’une table avec des étudiants d’informatique était motivant. J’ai pu me rendre compte que même en médecine, la créativité est valorisée.
S.M. : J’ai vraiment adoré pouvoir plancher sur un domaine qui me passionne avec des gens qui lui étaient complètement extérieurs. C’était hyper rafraîchissant, d’autant qu’on n’a que peu l’occasion de le faire au cours de notre cursus et ça a généré beaucoup d’émulation, dans mon groupe mais aussi avec les autres.

A.F. : Tu peux m’en dire plus sur ton projet ?
P.B. : On l’a appelé #InMyHead. L’idée c’est de pouvoir améliorer l’accès aux soins des ados, à travers une application accessible et ludique. On a utilisé une intelligence semi-artificielle qui leur permet de mettre des mots sur leur souffrance et d’être orientés vers des professionnels.
S.M. : On a commencé par définir notre cible et nos objectifs. On voulait créer un outil qui s’adresserait à des personnes jeunes, en début de maladie chronique. Alors on a « inventé » un patient et on s’est demandé ce qui pourrait lui être utile. Au final, on a conçu CoNext, une application fonctionnant en binôme avec un bracelet connecté, qui aide à regagner en autonomie au sortir de l’hôpital, entre autres sur l’aspect de gestion des traitements.

A.F : D’après toi, c’est quoi un bon projet ?
P.B. : Je crois qu’il n’y a pas de critères exacts pour juger d’un « bon » projet. L’important c’est d’être motivé, et convaincu que cela va avoir un réel intérêt pour l’usager.
S.M. : C’est un projet qui est novateur, utile et surtout qui fasse sens pour tout le monde dans l’équipe. Le moteur, c’est vraiment ce sentiment d'être sur le point de trouver la solution à un problème qui nous touche. Le bon projet, c’est celui que tu es frustré de mettre en pause quand sonne la fin du Hackaton.

A.F : Si vous deviez résumer votre expérience en un seul mot, vous diriez quoi ?
P.B. et S.M. : On a pensé au même : EXALTANT !

A.F. : Et pour la suite ?
P.B. : On a bien l’intention de la développer, cette appli ! Forte du succès qu’elle a eu au CNIPSY, je vais participer à 180 SPI pour l’amener un peu plus loin.
S.M. : Je ne compte pas m’arrêter là ! J’espère vraiment pouvoir porter notre idée jusqu’à ce qu’elle prenne pied dans la réalité. C’est du gros boulot mais je m’y attèle jour après jour par petites étapes. P.B. et S.M : Et pourquoi pas... se donner rendez-vous à Montpel pour recommencer ?!

Le CFP et 180SPI

3, 2, 1... 180  !

Moment phare du Congrès Français de la Psychiatrie qui s'est déroulé à Nantes du 28 novembre au 1 décembre 2018 ; la troisième édition de 180 Secondes Pour Innover -180SPI- a accueilli les douzes internes sélectionnés en finale sur scène pour présenter leur projet.

Du slam à la pollution de l'air en passant par les nudges et l'intelligence artificielle, des thèmes innovants et inédits ont été abordés.

La compétition fut aussi rude que le temps fut pluvieux... Mais les quatres candidats récompensés pour leur prestation ont su éblouir le jury.

Saluons tout d'abord la performance de Lucie Berkovitch, Pauline Boiroux, Cynthia Borel, Marion Boulesteix, Alexandre Couturier, Victor Debourdeau, Marilou Lamourette, Yannick Longuet, Benoît Schrek, Yoann Stoebner et Martina Traykova... Qui n'obtinrent pas de prix mais auront donnés à coup sûr quelques sueurs froides à nos gagnants !

Et les récompensés sont... ...

Christophe Gauld pour le troisième prix. Grâce à son analyse captivante de nos émotions, il nous aura presque autant ému que le Roi Lion. A vous faire chavirer ! ...

Alexandra Princé pour le deuxième prix. Comment prévenir la rechute psychotique par la méditation pleine conscience ? Reste zen... Et médites !

...Emmanuel Noblins et sa longue vue pour le premier prix ! Avec le panache d'un conquistador, il nous a fait voyager aux confins du système vestibulaire. Renversant, à l’unanimité ! ...

Anne-Eva Libert pour le prix du public. Sa mission ? Interroger nos pratiques quant à la question de la sexualité en entretien psychiatrique. Une thématique irrésistible !

Pauline BOIROUX

Article paru dans la revue “Association Française Fédérative des Etudiants en Psychiatrie ” / AFFEP n°24

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