La Radiologie et la Psychiatrie

Publié le 09 Oct 2023 à 14:19

 

Avec l’aide de Fabricio Pereira, PhD, MCF UNIM, CHU Carémeau, Nîmes et de chat GPT

La radiologie et la psychiatrie sont deux domaines de la médecine qui peuvent sembler éloignés l'un de l'autre à ce jour. Cependant, ils peuvent être étroitement liés dans le diagnostic et le traitement de certaines maladies mentales. Je remercie les internes de m’avoir questionné sur une des applications de notre discipline qui permet et permettra bien des évolutions dans un domaine où les fous seront reconnus comme étant des malades à part entière avec des traitements adaptés. Le sujet étant très vaste, je vous propose de survoler la façon dont la radiologie peut être utilisée en psychiatrie et les avantages qu'elle peut offrir.

La radiologie en psychiatrie

La technique d'imagerie couramment utilisée en psychiatrie est l'imagerie par résonance magnétique (IRM). L'IRM peut aider les médecins à visualiser les structures du cerveau et à identifier les anomalies structurelles qui peuvent être associées à certaines maladies mentales, telles que la dépression, la schizophrénie et la maladie d'Alzheimer.

En outre, la tomographie par émission de positons (TEP) est une autre technique d'imagerie médicale qui peut être utilisée en psychiatrie. La TEP utilise des produits chimiques marqués par des isotopes radioactifs pour visualiser le fonctionnement du cerveau. Elle peut être utilisée pour identifier les régions du cerveau qui sont actives ou sous-actives chez les personnes atteintes de troubles mentaux.

Avantages de l'utilisation de la radiologie en psychiatrie

Le premier avantage consiste dans l’aide des médecins à diagnostiquer les maladies mentales plus précisément. En visualisant les anomalies structurelles et fonctionnelles du cerveau, les médecins peuvent mieux comprendre les causes des troubles mentaux et développer des traitements plus efficaces.

Deuxièmement, la radiologie peut aider à prédire la réponse d'un patient à un traitement particulier. En visualisant le cerveau avant et après un traitement, les médecins peuvent déterminer si le traitement a eu un effet sur les anomalies structurelles ou fonctionnelles du cerveau. Cela peut aider les médecins à ajuster les traitements pour les rendre plus efficaces.

Troisièmement, la radiologie peut aider à développer de nouveaux traitements pour les maladies mentales. En identifiant les régions du cerveau qui sont actives ou sous-actives chez les personnes atteintes de troubles mentaux, les chercheurs peuvent développer de nouveaux traitements qui ciblent spécifiquement ces régions.

Enfin, l'utilisation de la radiologie en psychiatrie peut aider à réduire la stigmatisation associée aux maladies mentales. En montrant que les troubles mentaux sont causés par des anomalies physiques dans le cerveau, plutôt que par des faiblesses personnelles ou un manque de volonté, la radiologie peut aider à changer.

Les possibilités de l’IRM cérébrale en psychiatrie

Dans le domaine de la psychiatrie, l'IRM est un outil de diagnostic précieux qui peut aider à identifier les anomalies structurelles et fonctionnelles du cerveau chez les patients atteints de maladies mentales. Voici quelques-uns des avantages de l'utilisation de l'IRM en psychiatrie :

  • Identification des anomalies structurelles du cerveau : L'IRM peut aider les médecins à visualiser les structures du cerveau et à identifier les anomalies structurelles qui peuvent être associées à certaines maladies mentales, telles que la dépression, la schizophrénie et le trouble bipolaire. Par exemple, chez les patients atteints de dépression, l'IRM peut révéler des anomalies dans les régions du cerveau qui régulent l'humeur, telles que l'hippocampe et le cortex préfrontal.
  • Détection précoce des maladies mentales : L'IRM peut détecter les signes précoces de maladies mentales avant l'apparition de symptômes évidents. Par exemple, l'IRM peut détecter des anomalies dans les régions du cerveau associées à la schizophrénie chez les patients avant qu'ils ne présentent des symptômes évidents de la maladie. Cela peut aider les médecins à diagnostiquer et à traiter les patients plus tôt, ce qui peut améliorer les résultats à long terme.
  • Évaluation de la progression de la maladie : L'IRM peut aider les médecins à surveiller la progression de la maladie chez les patients atteints de maladies mentales. Par exemple, chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer, l'IRM peut être utilisé pour surveiller la progression de la perte de tissu cérébral au fil du temps.
  • Suivi de l'efficacité du traitement : L'IRM peut être utilisée pour évaluer l'efficacité du traitement chez les patients atteints de maladies mentales. Par exemple, chez les patients atteints de dépression, l'IRM peut être utilisée pour évaluer l'efficacité des antidépresseurs en surveillant les changements dans les régions du cerveau qui régulent l'humeur.
  • Développement de nouveaux traitements : L'IRM peut aider à développer de nouveaux traitements pour les maladies mentales en identifiant les régions du cerveau qui sont impliquées dans la maladie. Par exemple, chez les patients atteints de schizophrénie, l'IRM peut être utilisée pour identifier les régions du cerveau qui sont sous-actives et développer des traitements qui ciblent spécifiquement ces régions.

Un focus sur l’IRMf et les tenseurs de diffusion en IRM

IRM fonctionnelle : L'IRMf est une technique d'imagerie qui permet de visualiser l'activité cérébrale en temps réel en mesurant les changements dans le flux sanguin cérébral. Elle est souvent utilisée pour étudier les fonctions cognitives telles que la mémoire, l'attention, le langage et l'émotion. En psychiatrie, l'IRMf peut être utilisée pour identifier les anomalies fonctionnelles dans le cerveau qui sont associées à des maladies mentales, telles que la dépression, la schizophrénie et le trouble bipolaire. Les études d'IRMf ont révélé que les patients atteints de ces maladies présentent souvent des anomalies dans les régions du cerveau qui régulent l'humeur, la perception sensorielle, la prise de décision et l'empathie.

Tenseurs de diffusion : Les tenseurs de diffusion (DTI) sont une technique d'imagerie qui permet de visualiser les connexions entre les différentes régions du cerveau en mesurant le mouvement de l'eau dans les tissus cérébraux. En psychiatrie, la DTI peut être utilisée pour identifier les anomalies structurelles dans les connexions entre les différentes régions du cerveau chez les patients atteints de maladies mentales. Par exemple, chez les patients atteints de la maladie d'Alzheimer, la DTI peut être utilisée pour visualiser la dégénérescence des faisceaux de substance blanche qui relient différentes régions du cerveau.

L'IRMf et la DTI sont deux techniques d'imagerie avancées qui sont de plus en plus utilisées en psychiatrie pour aider à comprendre les anomalies fonctionnelles et structurelles du cerveau associées aux maladies mentales. Ces techniques peuvent fournir des informations précieuses sur la physiopathologie des maladies mentales et aider à identifier de nouvelles cibles pour les traitements. Cependant, comme pour toute technique d'imagerie, leur interprétation doit être effectuée par des experts en la matière et leur utilisation doit être intégrée dans une approche clinique globale pour le diagnostic et la prise en charge des maladies mentales.

Quel avenir pour l’IRM en psychiatrie !

L'imagerie en psychiatrie a connu une croissance exponentielle (pic de publication en 2021 avec 4800 articles dans Pubmed) au cours des dernières décennies, et son utilisation continue de se développer. L'avenir de l'imagerie en psychiatrie est prometteur et devrait continuer à jouer un rôle important dans la compréhension des troubles mentaux et dans l'amélioration des soins aux patients. Voici quelques éléments qui pourraient influencer l'avenir de l'imagerie et des radiologues en psychiatrie :

  • L'avènement de nouvelles technologies d'imagerie : Les technologies d'imagerie continuent de se développer rapidement, avec de nouvelles techniques telles que la tomographie par émission de positons (TEP), la tomographie optique diffuse (TOD) et l'imagerie par résonance magnétique en ultra-haute résolution. Ces technologies pourraient permettre de visualiser le cerveau à des résolutions encore plus élevées et de mieux comprendre les anomalies structurelles et fonctionnelles associées aux maladies mentales.

L'utilisation croissante de l'intelligence artificielle : L'intelligence artificielle (IA) est de plus en plus utilisée dans le domaine de l'imagerie médicale pour aider à l'interprétation des images et à l'identification de biomarqueurs associés à des maladies. Les radiologues pourraient bénéficier de cette technologie pour améliorer la précision des diagnostics et des traitements en psychiatrie.

  • La nécessité de développer des traitements personnalisés : Les données d'imagerie pourraient jouer un rôle clé dans le développement de traitements personnalisés pour les patients atteints de maladies mentales. Les radiologues pourraient travailler en étroite collaboration avec les psychiatres pour identifier les biomarqueurs qui prédisent la réponse d'un patient à un traitement particulier.
  • La demande croissante pour les services d'imagerie en psychiatrie : Les troubles mentaux affectent des millions de personnes dans le monde, et la demande pour des services d'imagerie en psychiatrie devrait augmenter à mesure que la compréhension de la physiopathologie des maladies mentales s'améliore. Les radiologues spécialisés en imagerie en psychiatrie seront donc de plus en plus sollicités.

L'avenir de l'imagerie et des radiologues en psychiatrie semble prometteur, avec des perspectives pour améliorer la compréhension des troubles mentaux, le diagnostic et la prise en charge des patients. Le développement des IRM 7T permettra d’améliorer les explorations morphologiques et fonctionnelles du cerveau. Enfin, la constitution de bases de données nationales et internationales est nécessaire afin d’étudier les relations entre les biomarqueurs d’imagerie et les maladies psychiatriques.

IRM cérébrale dans la responsabilité pénale et aspects éthiques

Il est important de noter que l'imagerie médicale, y compris l'imagerie cérébrale, ne peut pas être utilisée comme preuve irréfutable d'une intention criminelle ou d'une responsabilité pénale. Les scanners cérébraux peuvent révéler des anomalies dans le cerveau, mais ces anomalies ne sont pas nécessairement liées à un comportement criminel ou à une intention malveillante.

De plus, la plupart des maladies psychiatriques ne peuvent pas être différenciées par imagerie de l'acte volontaire d'une personne. Par exemple, les scanners cérébraux ne peuvent pas dire si un comportement criminel a été commis à cause d'une maladie mentale ou d'un choix délibéré. En effet, les causes des troubles psychiatriques peuvent être multiples et complexes, et la contribution de facteurs biologiques et environnementaux est souvent difficile à déterminer.

Cependant, l'imagerie cérébrale peut être utile pour comprendre les processus sous-jacents des maladies mentales, y compris les troubles de la personnalité, les troubles anxieux, les troubles de l'humeur et la schizophrénie. Les scanners cérébraux peuvent révéler des anomalies structurelles et fonctionnelles dans le cerveau qui peuvent aider les professionnels de la santé à diagnostiquer et à traiter les troubles mentaux.

Il est important de souligner que l'utilisation de l'imagerie cérébrale pour la compréhension et le traitement des maladies mentales doit être faite avec prudence et dans le respect de l'éthique médicale. Les professionnels de la santé doivent prendre en compte l'ensemble des facteurs médicaux, psychologiques et sociaux qui contribuent à la santé mentale et au bien-être de leurs patients. Il est interdit d’utiliser l’IRM comme outil de détection de mensonges.

 

En conclusion, la psychiatrie est un des domaines qui bénéficie des innovations des équipements de radiologie, du numérique, des mathématiques, innovations qui permettent de nouvelles indications. Je me félicite que les internes de radiologie s’emparent de ce domaine pour aider nos collègues psychiatres dans les soins. La difficulté réside dans la stagnation du nombre d’interne par an, à savoir environ 260 nouveaux radiologues par an, chiffre insuffisant pour assurer les remplacements des radiologues qui partent en retraite, l’explosion des indications et d’assurer les nouvelles indications. Si les évolutions médicales sont à marche rapide et forcée, les évolutions administratives sont plus lentes. Un autre souci est l’achat d’une IRM 7T qui est cher ainsi que la reconnaissance financière insuffisante d’actes diagnostiques complexes en IRM fonctionnelles ou avec les tenseurs de diffusion. Les explorations cérébrales nécessitent du temps machine, temps qui n’est pas assez rémunéré pour pouvoir étendre les indications à ce jour à des pratiques cliniques régulières.

Référence

La France à « l’ère du neurodroit » ? La neuro-imagerie dans le contentieux civil français. Sonia

Desmoulin-Canselier. Dans Droit et société 2019/1 (N° 101), pages 115 à 135.


Pr Jean-Paul Beregi
Président du CERF

Article paru dans la revue « Union Nationale des Internes et Jeunes Radiologues » / RADIO ACTIF N° 48

Publié le 1696853997000