L’ordonnance type – Exploration d’une diarrhée chronique

Publié le 21 Mar 2024 à 15:20
Article paru dans la revue « AFIHGE - Le journal des Jeunes gastro » / JJG N°4


Diarrhée chronique : > 3 selles/jour, Bristol 5 à 7, > 4 semaines Si doute diagnostic : fécalogramme sur 3 jours pour pesée des selles : diarrhée si poids des selles ≥ 250-300 g/24h.

Interrogatoire et toucher rectal = systématiques

Essentiels, ils ont deux objectifs : écarter un diagnostic différentiel (tumeur rectale, incontinence, fausse diarrhée du constipé) et orienter le diagnostic vers une étiologie :

  • Toxique (médicamenteuse type metformine, anti-inflammatoires non stéroïdiens, laxatifs, plantes médicinales, alcool…).
  • Infectieuse (voyage en zone d’endémie parasitaire dans les deux années précédentes, antibiothérapie dans les deux mois précédents, immunodépression).
  • Post-opératoire (pullulation bactérienne sur anse montée, diarrhée post-cholécystectomie).
  • Par malabsorption avec groupes d’aliments incriminés (gluten pour la maladie coeliaque, lactose).
  • Lésionnelle en cas de diarrhée glaireuse et/ou sanglante.

En l’absence d’orientation étiologique évidente chez le sujet jeune < 45 ans, la démarche à suivre peut se résumer comme suit.

Ordonnance type en l’absence de cause évidente et d’orientation diagnostique

  • Bilan systématique
  • Retentissement

    • NFS (anémie carentielle ?)
    • Ionogramme, urée, créatinine, calcium, phosphore (troubles hydroélectrolytiques ?)
    • TP (carence en vitamine K ?)
    • Albumine, cholestérol (dénutrition ?) (Possibles marqueurs d’une entéropathie organique si diminués)
    • Ferritine, vitamine B9, B12 (carences ?)

    Recherche d’une étiologie

    • CRP (inflammatoire ?)
    • Bilan hépatique (cytolyse et cholestase associées à la maladie coeliaque ? Consommation d’alcool ?)
    • Glycémie à jeun (diabète ?)
    • TSH (hyperthyroïdie ?)
    • Électrophorèse des protéines sériques (déficit immunitaire ? entéropathie exsudative ?)
    • Examen parasitologique des selles (giardiase +++) : répété 2 fois à plusieurs jours d’intervalle
  • Se discutent en complément
    • EOGD (+ biopsies duodénales et gastriques) et iléo-coloscopie (+ biopsies iléales et coliques étagées) :

    -Systématiquement en première intention si diarrhée d’allure lésionnelle ou signe d’alarme (asthénie/modification récente du transit / âge > 45-50 ans/ perte de poids).

    -Après le bilan de première intention en l’absence de cause évidente.

    • Échographie abdominale ou TDM abdominopelvien injectée (si perte de poids inexpliquée, douleur abdominale...).
    • Calprotectine fécale : n'a de valeur que si elle est normale (< 50 à 100 ug/g de selles), elle est donc surtout utile pour éliminer une MICI chez un patient jeune présentant une diarrhée chronique non glairo-sanglante chez qui on souhaite se passer d'endoscopies. Augmentée, elle impose la réalisation d'une iléocoloscopie.
    • Coproculture : si déficit immunitaire ou si hospitalisation et/ou prise d’antibiotiques récente (ajouter recherche de toxine de Clostrioïdes difficile dans ce cas).
    • Élastase fécale : si consommation chronique d’alcool, signes cliniques ou radiologiques de pancréatite chronique, selles mousseuses.
    • Sérologie VIH : si conduite à risque.
  • Après ce bilan de première intention et en l’absence d’orientation du mécanisme à l’interrogatoire, des tests peuvent servir à l’exploration du mécanisme
    • Fécalogramme sur 72h dans des conditions de vie normales mais avec supplémentation graisseuse (50 grammes de beurre les 3 jours qui précédent les 3 jours de recueil) + dosage sanguin de l’alpha-1-antitrypsine (pour calcul de sa clairance : entéropathie exsudative ?).
    • Test au rouge carmin (diarrhée motrice si apparition de selles rouges dans les 6 à 8 heures).

    Bilan selon le mécanisme identifié

    Diarrhée lésionnelle

    • EOGD et biopsies systématiques.
    • Iléo-coloscopie et biopsies systématiques.
    • Possible complément d’exploration du grêle (vidéocapsule, entéro-IRM…).

    Diarrhée sécrétoire

    • Iléo-coloscopie avec biopsies systématiques.
    • Scanner abdomino-pelvien injecté.
    • Dosages hormonaux : TSH, calcitonine, sérotonine et/ou chromogranine, VIP, gastrine.

    Diarrhée motrice

    • Dosages hormonaux : TSH, calcitonine, sérotonine et/ou chromogranine.
    • Glycémie à jeun.

    Diarrhée osmotique

    • Test respiratoire au lactose.
    • Test d’exclusion alimentaire.

    Malabsorption

    • Si suspicion de maladie pancréatique/péritonéale/ vasculaire : scanner abdomino-pelvien injecté en première intention.
    • EOGD + biopsies systématiques gastriques et duodénales.
    • IgA anti-transglutaminases (et IgA totaux voire IgG anti-transglutaminases si déficit en IgA).
    • Test respiratoire au glucose (Small Intestine Bowel Overgrowth ou SIBO) si forte probabilité de pullulation microbienne.


    Clémentine ALITTI


    Relecteur
    Dr Antoine MARTIN
    CCA en HGE
    au CHU de Bicêtre

    Références

  • Diarrhée chronique - Document Source National (DSN) de la CDU-HGE
  • Diarrhée chronique - Post'U U (2011) 161-164 – P. Marteau et B. Coffi n
  • Diarrhée chronique: Raisonner par étape - legénéralisteFMC - P. Seksik et P. Naudin-Rousselle
  • La diarrhée : du diagnostic au traitement – O. Corcos
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    Publié le 1711030803000