L’ordonnance type - Des notions et exemples d’ordonnances en oncologie digestive

Publié le 20 Nov 2024 à 10:41
Article paru dans la revue « AFIHGE - Le journal des Jeunes gastro » / JJg N°5

L'oncologie digestive est une discipline complexe, où la prise en charge des patients est multidisciplinaire. Elle repose à la fois sur la précision des traitements (chimiothérapie, immunothérapie, thérapies ciblées) et sur les soins de support chez des patients souvent fragilisés par leur pathologie tumorale et de nombreuses comorbidités. Ces patients sont confrontés à un ensemble de symptômes, liés tant à la maladie elle-même qu'aux effets secondaires des traitements, auxquels s'ajoute presque systématiquement un état de dénutrition pouvant lui aussi altérer la qualité de vie et impacter la poursuite des traitements.

En tant qu'interne, l'un de nos principaux objectifs est d'améliorer au mieux la qualité de vie des patients. Voici quelques exemples d'ordonnances types et de concepts clés (sans être exhaustif) concernant l'antalgie, la nutrition, la radiothérapie, les bains de bouche « type » en oncologie digestive.

L'antalgie

• Nociceptive : Elle est médiée par les fibres nerveuses sensitives spécifiques A delta et C, localisées dans la peau, les tissus sous-cutanés, les aponévroses, les tissus conjonctifs, les os et les articulations.

• Neuropathique : Elle s'explique par une lésion à n'importe quel niveau du système nerveux central et/périphérique, elle peut avoir une part nociceptive. Elle peut être dépistée avec le questionnaire DN4.

Presque tous les centres de cancérologie disposent d'équipe(s) de la douleur dont l'aide est précieuse. N'hésitez pas à faire appel à eux pour vous conseiller, et pour participer à l'éducation thérapeutique du patient.

Douleur nociceptive

Les antalgiques sont classés de manière historique en palier I, II et III. En cas d'utilisation de palier III, on arrête d'utiliser les paliers II. Chez la personne âgée (supérieure à 65-70 ans), les paliers II sont déconseillés, il est préférable d'utiliser des paliers I et/ou III d'emblée, si nécessaire.

Palier I

Paracétamol

Il est anti-nociceptif et antipyrétique (contrôle la fièvre/ les décharges septiques). Il potentialise l'effet des morphiniques et ses dérivés et donc reste toujours utile même en cas de prise de palier II ou  III. La posologie est de 4 g/24H chez le « tout venant » (si poids inférieure à 50 kg : 500 mg toutes les 6H), et 3 g/24h chez la personne âgée (supérieure à 65-70 ans). La posologie classique est 1 g toutes les 6h mais la prise de 500 mg toutes les 4H permet un taux sanguin stable de paracétamol et un meilleur contrôle antalgique (à adapter à chaque patient) : osons essayer !

Modalité d'administration : Orodispersible, comprimé, gélule, IV, en 1g ou 500 mg.

Tolérance : Excellente.

Contre-indications  : Généralement déconseillé en cas d'insuffisance hépatique sévère, de dénutrition sévère et d'éthylisme chronique (hépatotoxicité). En pratique, il est souvent poursuivi, notamment dans les prises en charge de fin de vie, malgré l'insuffisance hépatocellulaire.

Nefopam (ACUPAN)

Il agit sur la douleur centrale. Il est considéré comme un palier I mais s'apparente à un palier II. C'est le médicament idéal en cas d'insuffisance hépatique.

Modalité d'administration  : Comprimé (30 mg), PSE/24h (à favoriser pour la tolérance IV) ou ampoule/4h IV (20 mg) ou ampoule à boire (goût amer, à boire avec boisson sucrée).

Tolérance : Effet anticholinergique (crise de glaucome aigu, rétention aiguë d'urine), en cas d'injection IV rapide (inférieure à 30 mins) ; sueur, tachycardie, confusion.

Contre-indications : Insuffisance rénale sévère.

Exemple d'ordonnance: Nefopam panpharma 30 mg cp pellic, 1 cpr toutes les 4h en cas de douleur, jusqu'à 6 cpr par jour.

Palier II 

Tramadol (contramal, zamudol lp)

Il appartient aux opioïdes. Il est un des rares antalgiques (avec la méthadone) à agir à la fois sur la composante nociceptive et neuropathique d'une douleur. Il existe des formes à libération prolongée avec des interdoses ou formes LI (libération immédiate). La dose maximale est de 400 mg/24h (exemple  : 100 mg LP matin et soir et jusqu'à 4 interdoses de 50 mg/j24h). Une dose maximale 600 mg/24h peut être tolérée.

À noter qu'à partir du 01/12/2024, leur prescription sera sur ordonnance sécurisée.

Modalité d'administration : IV (50, 100 mg), per os (LP : 100, 150, 200 mg. LI : 50, 100 mg), gouttes.

Tolérance : Constipation, sueurs, nausées, confusion, céphalée. Risque de syndrome sérotoninergique si associé à un antidépresseur (ISRS, tricyclique, inhibiteur de MAO).

Contre-indications  : Épilepsie non contrôlée, prescription concomitante à un antidépresseur type inhibiteur de MAO. En cas d'IRC, espacer les interdoses.

Exemple d'ordonnance: Zamudol LP 100 mg, 1 cpr matin et soir, OROZAMUDOL 50 mg, 1 cpr toutes les 4h en cas de douleur, maximum 4 cpr/jour, MACROGOL 4000, 10 g, 1 à 3 sachets par jour, à adapter au transit.

Moins fréquemment utilisés, il existe :

• Le CO-DOLIPRANE (codéine + doliprane).

Particularité  : la codéine a un pouvoir antitussif parfois recherché. Attention à ne pas cumuler avec d'autres médicaments contenant du paracétamol !

• L'IZALGI (poudre d'opium + paracétamol).

• La LAMALINE (paracétamol, poudre d'opium, caféine).

• Le DICONDIN LP (codéine seule).

À noter qu'à partir du 01/12/2024, la prescription de médicament contenant de la codéine sera sur ordonnance sécurisée.

Palier III

Ils sont composés par les médicaments opioïdes. Il existe des formes LP (libération prolongée) dont l'effet dure 12h par prise ; le matin agit pour la journée, et la prise du soir agit pour la nuit. On les associe aux formes LI (libération immédiate) dont l'effet dure 4h.

Il est possible de prendre la forme LP uniquement le matin ou uniquement le soir (à adapter au contexte douloureux). Il n'existe pas de dose limite théorique mais la prise supérieure à 60-80 mg/24h doit motiver un avis auprès d'un médecin de la douleur (risque d'effet paradoxal des morphiniques).

Quelle est la dose nécessaire ?

Pour déterminer la dose à prescrire, on parle de Titration. Elle peut se faire :

• En IV (morphine IV, 1-2 mg toutes les 3-5 mins sans dépasser 10 mg).

• En per os (1cpr toutes les heures) jusqu'à soulagement.

• On ne doit pas titrer avec des patchs.

En IV, la dose administrée lors de la titration pour obtenir l'antalgie correspond à la dose nécessaire pour 4h d'antalgie. Pour obtenir la dose sur 24 h, on la multiplie par 6 (6 x 4h = 24h). Avec le tableau d'équivalence on peut calculer la dose « théorique » de morphinique nécessaire sur 24h.

À noter qu'à partir du 01/12/2024, la prescription de médicament contenant de la codéine sera sur ordonnance sécurisée.

4 mg IV de titration équivaut à un besoin de 24 mg/24h de morphine IV, soit un PSE

Exemple: 4 mg IV de titration équivaut à un besoin de 24 mg/24h de morphine IV, soit un PSE/PCA IV de 1 mg/h et de bolus de 1 mg (prescription conseillée de débit = bolus). Après bon contrôle antalgique IV par PSE/PCA à 1mg/h, cette dose équivaut théoriquement à environ à 60 mg de morphine per os par 24h, soit SKENAN 30 mg LP 1.0.1 avec des interdoses de 10 mg (cf. tableau).

L'effet antalgique est différent selon chaque opioïde, pour les équivalences entre chacun, on peut se référer au tableau d'équivalence des opioïdes forts :

 

Comment fait-on le relais ?

• Les formes IV agissent immédiatement et s'éliminent en env. 4h.

• Une forme per os LI agit en 1h et s'élimine en 4h.

Une forme LP s'élimine en 12h.

• Un patch s'élimine en 12h et agit progressivement.

Il s'agit de soulager le patient en calculant l'arrêt du dernier morphinique et le début du suivant, sans risquer le surdosage.

Tolérance : Constipation, sécheresse buccale, prurit, sueurs, nausées/vomissements, confusion, céphalées, somnolence, rétention aiguë d'urine, myoclonies en cas de surdosage (si IRC/IRA).

Contre-indications : Déconseillé en cas d'insuffisance rénale sévère, d'insuffisance hépatique sévère et d'insuffisance respiratoire (sans limite évidente).

Pour cette catégorie, je vous les présente selon leur modalité  'administration ; le choix est vaste !

Per os

• Morphine : SKENAN (LP 10, 30, 60, 100, 200 mg), ACTISKENAN (5, 10, 20, 30 mg), ORAMORPH (sol buvable 20 mg/ml – 8 gouttes/prise ou récipient unidose de 100mg/5 ml – 1 ml par prise).

• Oxycodone : Oxycontin (forme LP à 5, 10, 20, 40, 80), OXYNORM, (5, 10, 20 mg).

• Méthadone (prescription à initier par un médecin de la douleur).

Orodispersibles

• Morphine : Actiskenan orodispersible (1, 2,5, 5, 10, 20, 30 mg).

• Oxycodone : OXYNORMORO (5, 10, 20 mg).

• Fentanyl.

• ABSTRAL SUBLINGUAL (100, 200, 300, 400, 600, 800).

• ACTIQ (200, 400, 600, 800, 1200, 1600) (n'est plus utilisé ; obsolète car fond pendant 20 mins).

Patch (action de 72h)

• Fentanyl (DUROGESIC 12, 25, 50, 75, 100  g).

Voie nasale

• Pecfent (100  g, 400  g).

• Instanyl (50, 100, 200).

Particularités

• En cas de trouble de la déglutition : Préférer les patchs et les formes orodispersibles.

• En cas de nutrition EXCLUSIVE par sonde nasogastrique : Tous les SKENAN-ACTISKENAN peuvent être utilisés, il faut ouvrir les gélules Sans écraser les granules, tout comme il ne faut pas écraser les comprimés à libération prolongée (comme l'OXYCONTIN), au risque d'un surdosage (destruction de l'enveloppe protectrice).

• En cas d'accès fébriles répétés : Éviter la forme transdermique par patch (modification de la diffusion).

• En cas d'accès douloureux paroxystique (« ADP ») : ces douleurs durent inférieure à 1h, sont à début et fin brutales.

L'interrogatoire doit être minutieux pour les identifier. Exemples : mobilisation pour la toilette, lors d'une séance de radiothérapie, lors d'une prise alimentaire... Pour ce type de douleur, le fentanyl par voie nasale ou sublingual sont idéaux. Néanmoins, ils doivent être prescrit en 3ème intention, après l'échec de contrôle de ces douleurs avec un opioïde fort LP et des LI. En effet, prendre une LI 1h avant un geste peut « couvrir » le pic douloureux occasionné. Les produits type Pecfent, Instanyl, Abstral sublingual n'ont pas d'équivalence morphinique, il s'agit de « tester » les différentes doses pour trouver la dose minimale efficace adaptée aux crises douloureuses.

• L'oxycodone per os est 2 fois plus puissante que le skenan, ce qui peut réduire la dose totale d'opioïde en cas de switch (se référer à la table d'équivalence).

• Toute prescription de morphinique doit être accompagnée d'une prescription de laxatif (soit conventionnel de type MOVICOL, MACROGOL, soit spécifique de type NALOXOL 25 mg (Moventig).

Délivrance

Les morphiniques sont prescrits sur ordonnance sécurisée (ordonnance manuscrite «  spécifique  »), sur laquelle il faut préciser le nom, prénom, la date de naissance du patient, la date et le lieu de prescription, la posologie doit être notée en toutes lettres, le nombre de substances prescrites précisé dans le cadre en bas à droite. La délivrance est possible sur 28 jours maximum. La notion de «  chevauchement autorisé  » permet au patient de récupérer son « nouveau » traitement morphinique avant la fin du délai de prescription de l'ordonnance sécurisée précédente.

Exemples d'ordonnances

1. Fentanyl transdermique (patch) : xx microgrammes/heure à coller au niveau du bras ou de l'épaule et à remplacer toutes les soixante-douze heures.

2. Oxycodone à Libération Immédiate (LI) : xx milligrammes à prendre en cas de douleurs et une heure avant les actes douloureux (soins médicaux, déplacement, repas, miction…).

Il est possible de reprendre la même dose en respectant une heure entre chaque prise sans dépasser quatre prises en quatre heures. Maximum de six prises par jour.

OU

2. Abstral® (Fentanyl sublingual) : xx microgrammes/dose.
En cas de pic douloureux, prendre un comprimé sublingual. Si la douleur n'est pas soulagée quinze minutes après, prendre un autre comprimé sublingual à xx microgrammes et attendre quatre heures avant la prochaine prise. Traitement pour quatre accès douloureux (soit huit comprimés) par jour maximum.

OU

2. Pecfent® (Fentanyl transmuqueux) : xx microgrammes/dose. En cas de pic douloureux, faire une pulvérisation nasale dans une narine. Si la douleur n'est pas soulagée quinze minutes après, faire une autre pulvérisation dans l'autre narine et attendre quatre heures avant la prochaine pulvérisation nasale. Traitement pour quatre accès douloureux (soit un flacon) par jour maximum. XXXXXX flacon(s) de XXXXX microgrammes/dose (1 flacon = 8 pulvérisations). 

3. Macrogol 4000, 10 g. 1 à 4 sachets par jour, à adapter au transit.

ET/OU

3. Moventing 25 mg : 1 cpr le matin ou le soir.

Prescription pour vingt-huit jours.
À délivrer en une fois.
Chevauchement autorisé.

En raison de la baisse de vigilance induite par ce médicament, l'attention est attirée sur les risques liés à la conduite d'un véhicule et à l'utilisation d'une machine

1. Oxycodone à Libération Prolongée (LP) : « dix » milligrammes à prendre systématiquement matin et soir (respecter douze heures entre chaque prise).

 

2. Oxycodone à Libération Immédiate (LI) : « cinq » milligrammes à prendre en cas de douleurs et une heure avant les actes douloureux (soins médicaux, déplacement, repas, miction). Il est possible de reprendre la même dose en respectant une heure entre chaque prise sans dépasser quatre prises en quatre heures. Maximum de six prises par jour.

3. Macrogol 4000, 10 g.
1 à 4 sachets par jour, à adapter au transit.

ET/OU

3. Moventing 25 mg : 1 cpr le matin ou le soir.

Prescription pour vingt-huit jours.
À délivrer en une fois.
Chevauchement autorisé.

En raison de la baisse de vigilance induite par ce médicament, l'attention est attirée sur les risques liés à la conduite d'un véhicule et à l'utilisation d'une machine.

Douleur neuropathique

Il existe 3 catégories principales médicamenteuses adaptées :

• Les antidépresseurs tricycliques : LAROXYL, DULOXETINE.

• Les antiépileptiques/analgésiques/anxiolytiques : GABAPENTINE, PRÉGABALINE.

• Les patchs de lidocaïne (VERSATIS 700 mg).

Ces médicaments agissent sur la douleur, ils n'agissent pas sur les paresthésies. Ces différents médicaments peuvent être prescrits en association.

Gabapentine (NEURONTIN)

L'effet thérapeutique survient à partir de 900-1200 mg (maximum 3600 mg/j), en plusieurs semaines (2-3  semaines), l'évaluation de l'effet thérapeutique est utile à 10-21 jours après le palier de 900- 1200  mg/jour. Il est nécessaire d'augmenter très progressivement la dose pour évaluer la tolérance (risque de somnolence ++).

Modalités d'administrations : Comprimé ou gélule de 100, 300, 400, 600, 800.

Tolérance : Somnolence (surtout si concomitant à palier III), trouble de l'attention, tremblements, étourdissements, risque de pancréatite aiguë, idées suicidaires.

Contre-indications :  Aucune franche (introduction précautionneuse si IRC).

Exemples d'ordonnances :

Patient en « bon état général.
GABAPENTINE CPR 100 mg.
1 cpr matin midi et soir pendant 3 jours.
Puis 2 cpr matin midi et soir pendant 3 jours.
Puis 3 cpr matin midi et soir pendant 21 jours.

Patient en « mauvais état général »

GABAPENTINE CPR 100 mg.
1 cpr matin midi et soir pendant 3 jours.
Puis 2 cpr matin 1 midi et 1 cpr soir pendant 3 jours.
Puis 2 cpr matin 2 cpr midi et 1 cpr soir pendant 3 jours.
Puis 2 cpr matin 2 cpr midi et 2 cpr soir pendant 3 jours.
Puis 3 cpr matin, 2 cpr midi et 2 cpr soir pendant 3 jours.
Puis 3 cpr matin 3 cpr midi et 2 cpr soir pendant 3 jours.
Puis 3 cpr matin 3 cpr midi et 3 cpr soir pendant 21 jours.

Amitriptyline (LAROXYL)

C'est un antidépresseur tricyclique. Il provoque de la somnolence et s'avère utile en cas d'insomnie.

La prise est donc conseillée le soir. La dose initiale est 1 goutte/10 kg de poids du patient (1 goutte = 1 mg), qui peut être augmentée tous les 3 à 7 jours d'1 goutte pour trouver la dose minimale efficace. Effet à attendre dans 10-21 jours.

Modalités d'administrations  : Gouttes, comprimés (25 mg), IV.

Tolérance : Somnolence, trouble de l'attention, tremblements, étourdissements, effets anticholinergiques, rétention aiguë d'urine, poussée de glaucome aigu).

Contre-indications :  SCA ST+/bloc cardiaque ou trouble du rythme récent, prescription avec un inhibiteur de MAO (syndrome sérotoninergique), insuffisance hépatique sévère.

Exemple d'ordonnance :

LAROXYL 40 mg/ml sol buv.
8 gouttes le soir.

QSP 15 jours, renouvelable.

Duloxetine (CYMBALTA)

C'est un antidépresseur inhibiteur de la recapture de la sérotonine (5-HT) et de la noradrénaline (NA).

La posologie maximale est 120 mg/jour. L'augmentation doit être progressive. L'effet thérapeutique est à attendre en 2-4 semaines. Il convient aux neuropathies périphérique (de type « pied-mains ») pour les neuropathies diabétiques, et les séquelles de chimiothérapie.

Modalités d'administrations : Comprimés de 30, 60 mg.

Tolérance : Somnolence, trouble de l'attention, tremblements, étourdissements, effets anticholinergiques (rétention aiguë d'urine, poussée de glaucome aigu).

Contre-indications : Prise de ciprofloxacine, fluvoxamine (antidépresseur) et d'énoxacine (quinolone), insuffisance hépatique sévère, IRC inférieure à 30 ml/min, prescription concomitante d'un inhibiteur de MAO (syndrome sérotoninergique).

Exemple d'ordonnance :

DULOXETINE 30 mg.
1 cpr par jour pendant 2 semaines, puis 2 cpr par jour pendant 1 mois.

Prégabaline (LYRICA)

Il est prescrit sur ordonnance sécurisée. L'introduction doit être progressive pour dépister une mauvaise tolérance, notamment la somnolence. L'effet thérapeutique est possible à partir de 150 mg/jour en 14-21 jours (à partir de ce palier). La dose maximale est de 600 mg/ jour (300 mg en cas d'IRC), par palier de 3-7 jours.

Il existe sous forme de liquide (en cas de SNG), ce qui n'est pas le cas de la Gabapentine.

Modalités d'administrations : Gélule de 25, 50, 75, 100, 200, 300 mg.

Tolérance : Somnolence (surtout si concomitant à palier III), trouble de l'attention, tremblements, étourdissements, idées suicidaires.

Contre-indications :  Aucune franche (introduction précautionneuse si IRC).

Exemple d'ordonnance

PREGABALINE vingt-cinq milligrammes.
Un comprimé matin, midi et soir pendant trois jours.
Puis deux comprimés matin midi et soir pendant trois jours.
Puis trois comprimés matin midi et soir.

Prescription pour vingt-huit jours.
À délivrer en une fois.
Chevauchement autorisé.

En raison de la baisse de vigilance induite par ce médicament, l'attention est attirée sur les risques liés à la conduite d'un véhicule et à l'utilisation d'une machine.

Patch de versatis

Initialement, il est utilisé pour les douleurs post-zostériennes. Il est utilisé pour les douleurs neuropathiques localisées.

Corticoïdes & Ains

En cas d'échec des antalgiques conventionnels, la corticothérapie permet parfois de soulager les douleurs « inflammatoires » avec des posologies très variables selon les services hospitaliers, et parfois les AINS.

En cas de métastase(s) osseuse(s), dans l'attente d'une radiothérapie à visée antalgique et/ou consolidatrice, l'oxycodone s'avère plus efficace que les autres opioïdes. En cas de résistance aux opioïdes, on peut utiliser les corticoïdes (PREDNISOLONE – type SOLUPRED ou METHYLPREDNISONE en IV). L'administration peut être per os pour le patient ambulatoire ou en IV en hospitalisation (jusqu'à 1-1,5 mg/kg), en décroissance dont la durée est à l'appréciation du praticien. En cas de douleur réfractaire, une administration IV jusqu'à 120 mg de méthylprednisone matin et soir (ou matin, midi) est pratiquée dans certains centres.

Quelques notions de nutrition

La dénutrition est un problème permanent en oncologie digestive. La dépister, la prévenir et la prendre en charge est primordial. Plusieurs facteurs participent à l'aggraver, et notamment l'altération du goût générée par la chimiothérapie, les mycoses et les mucites (cf. bains de bouches). Les services d'oncologie se doivent de travailler avec un(e) diététicien( ne) qui réalise les évaluations nutritionnelles et participe à l'éducation thérapeutique. En cours de traitement systémique, les apports recommandés sont de 30 à 35 kcal/kg/jour dont 1,2 à 1,5 g de protéines par kg/jour.

Tout d'abord, il y a les règles hygiéno-diététiques :

• L'enrichissement alimentaire : Selon les goût des patients, il consiste à augmenter particulièrement la consommation de produits laitiers (fromages à pâte dure ou molle, la crème, le beurre), de viande, et de féculents. Attention, les aliments sucrés sont surtout riches en calories mais pauvres en protéines ce qui les rendent légèrement « moins attractifs » sur le plan nutritionnel.

• Le fractionnement des prises alimentaires (à préconiser en cas d'anorexie) : Il consiste à préférer des apports 5-6 fois par jour en faible quantité plutôt que les 3 repas habituels. En cas d'appétit conservé, la poursuite des 3 repas est possible avec 1 à 2 collations par jour avec des CNO par exemple.

Ensuite, il y a les compléments nutritionnels oraux (CNO). Ils ne doivent pas remplacer un repas, mais doivent être pris en supplément. Il est déconseillé de prescrire supérieure à 2 compléments par jour (hors cas particuliers). Les horaires idéaux seraient à 16h et au coucher. La prise de 10h est déconseillée car elle coupe la faim pour le midi. Pour les patients diabétiques, ils peuvent recevoir des compléments nutritionnels oraux (CNO) classiques en première intention, et si la glycémie est difficile à contrôler, alors utiliser des CNO spécifiques pour diabétiques.

Le maintien d'un état nutritionnel satisfaisant est primordial (influence le pronostic à moyen/long terme), il est donc essentiel de proposer aux patients  toutes les options qui existent ! et d'insister !

Plusieurs marques proposent des produits similaires : Fortimel, Delical, Clinutren notamment.

En bref, il existe de nombreuses catégories de compléments alimentaires :

• Les produits lactés (« boisson lactée HPHC » ou « crème HPHC), à préférer en première intention car riches en protéines : ils contiennent généralement 20-30g de protéines par prise, pour un apport de 200-300 kcal.

• Les jus de fruits (« boisson saveur fruit » / « juicy »): ils contiennent en moyenne 8 g de protéines, pour 200-300 kcal.

• Les biscuits (exemple : Delical nutra'cake, ou madeleine)  : 1 sachet de 3 biscuits contient 500 kcal, avec 23 g de protéines.

• Les poudres hyperprotéinées (Protifar, Nutrisens forteocare) à mélanger dans les aliments (soupe/potage, compote, yaourt, jus de fruit).

 • Puis les autres produits de deuxième intention car moins riches en protéines : les soupes HPHC, le riz au lait, les boissons de type thé glacé, purée HPHC, etc.

Ordonnance type qui laisse un libre choix aux patients en pharmacie après tous conseils COMPLÉMENTS ALIMENTAIRES REMBOURSÉS : Saveur et texture à adapter aux goûts du patient, 1 complément lacté et un complément fruité par jour.

À prendre à distance des repas ; par exemple à 16h et au coucher.

QSP 1 mois.

Renouvelable 2 fois.

La radiothérapie

Quelques ordonnances types pour les patients en cours de radiothérapie notamment oesophagienne.

En cas d'odynophagie

Xylocaine

C'est un anesthésiant local. Il peut être utile mais attention au risque de fausse route.

Exemple d'ordonnance

Xylocaine gel oral 2 % : 1 cuillère à soupe 30 minutes avant le repas ou en application cutanée directe, 1 à 6x/jour.

Les antalgiques de palier 1, II à III, les inhibiteurs de pompes à protons (simple dose ou double dose) sont utilisés, ainsi que les cures courtes ou prolongées de prednisolone.

En cas de radiodermite

Grade I (érythème)

Il existe plusieurs crèmes topiques.

Exemples d'ordonnances

IALUSET crème tube de 100 mg : Appliquer la crème IALUSET 1 à 2 fois par jour, sur la peau érythémateuse et éviter tout frottement avec les vêtements.

A faire tous les jours après la séance de radiothérapie.

Cold cream préparation à usage thérapeutique :

Une application par jour au niveau de la zone traitée APRÈS chaque séance de radiothérapie.

Diprosone 0,05 % crème : En cas de prurit, 1 application par jour sur les zones prurigineuses.

 Grade II

Il existe plusieurs crèmes topiques.

Exemple d'ordonnance

1. Prontosan : 1 flacon de 350 ml.

2. Compresses steriles 10 x 10 : 1 boîte de 100 (renouvelable 2x sibesoin).

3. Ialuset creme : 1 tube de 100 grammes.

A faire tous les jours après la seance de radiotherapie.

Déposer le PRONTOSAN sur les compresses stériles, et les appliquer sur la zone d'érythème (zones rouges) pendant 15 minutes.

Retirer délicatement les compresses après les 15 minutes d'application.

Appliquer la crème IALUSET sur la peau érythémateuse et éviter tout frottement avec les vêtements.

En cas d'épistaxis / croûtes nasales douloureuses

Ils sont liés à la sécheresse des muqueuses. L'application de topiques hydratants permet de les diminuer.

Exemple d'ordonnance

Vaseline : 1 tube

1 application matin et soir d'une noisette de pommade dans chaque narine.

ET/OU

Huile gomenolée 5 % sol p instillation nasale : 1 tube.

2 à 4 gouttes dans chaque narine 3 fois par jour.

Bain de bouche

L'immunodépression, l'hyposialie, les effets secondaires directs des traitements sont souvent responsables de mycoses et de mucites.

Ci-joints des bains de bouches :

• « Standard » : à visée préventive.

• « Curatif » en cas de mucite ou de mycose buccale.

Standard (version 1)

Bains de bouche Bicarbonate de sodium 14 ‰ 500 mL :

Faire 6 bains de bouche par jour (1 bain = 2 verres) matin, midi et soir.

À renouveler autant que nécessaire pendant 3 mois.

Standard (version 2)

Bains de bouche avec une préparation de :

• 500 ml de bicarbonate de Na à 1,4 %.

• + 1 flacon d'Eludril.

• 3 à 6 gargarismes /jour.

À renouveler autant que nécessaire pendant 3 mois.

Bain de bouche curatif : en cas de mycose

Fungizone® (Amphotéricine B) 10% suspension buvable.

Une cuillère à café 3 fois par jour jusqu'à disparition de la mycose.

À renouveler autant que nécessaire pendant 3 mois.

NB : Possibilité de l'avaler pour le traitement des mycoses oesophagiennes. 

Bain de bouche « renforcé » : en cas de mucite (version 1)

Dans 500 mL de Bicarbonate de sodium à 14 ‰, ajouter :

• 2 ampoules de SOLUMEDROL® (Méthylprednisolone) 40 mg.

• 2 ampoules 5 mL de Procaïne 2 %.

Faire 3 bains de bouche par jour (un bain = ~2 verres). Alterner 3 bains de bouche standard avec 3 bains de bouche « renforcé ».

Pendant 10 à 15 jours, jusqu'à cicatrisation, puis reprendre des bains de bouche “standard”.

Prescription à but thérapeutique en l'absence de spécialité équivalent existant.

À renouveler autant que nécessaire pendant 3 mois.

Bain de bouche curatif : en cas de mucite (version 2)

Bain de bouche renforcé.

Bicarbonate de sodium à 1.4 % : flacon de 500 ml.

Prélever 250 ml et ajouter :

• 2 ampoules de SOLUMEDROL ® 40 mg.

• 1 flacon de 20 ml de XYLOCAINE 10 mg/ml sans conservateur.

Faire 3 bains de bouche par jour (un bain = 1 verre). Alterner 3 bains de bouche standard avec 3 bains de bouche « renforcé ».

La préparation reste stable 24h00 et se conserve entre 4 et 7°.

Bain de bouche standard :

Bicarbonate de sodium à 1.4 % (flacon de 500 ml) :

Utiliser les 250 ml restant et faire 3 bains de bouche (un bain = 1 verre) par jour.

Soit un flacon de 500 ml de bicarbonate de sodium par jour.

Prescription à but thérapeutique en l'absence de spécialité équivalent existant.

À renouveler autant que nécessaire pendant 3 mois.

Pierre SAUNIER
Interne

Merci au Dr DE RYCKE Ophélie pour sa précieuse aide.
Merci à l'équipe de la douleur SAPO (service d'analgésie periopératoire) du CHU de Dijon : Sandrine BOCCARD et Céline POUHIN.
Merci à Mme Sabrina LARDERET, diététicienne du CHU de Dijon.

 

Publié le 1732095695000