L’internat océan indien, expérience d’une interchu

Publié le 10 May 2022 à 09:24

Quelques-uns sautent le pas, pour aller se former à des milliers de kilomètres de la métropole. Parfois l’idée ne nous traverse pas l’esprit immédiatement, puis après quelques semestres passés sous la grisaille, dans l’atmosphère du CHU avec horaires à rallonge, on se dit pourquoi pas aller voir ce qui se passe chez nos collègues de l’autre côté de la planète ! Il semblerait que la misère serait moins pénible au soleil…

Premier cap à passer : monter le dossier administratif de l’interCHU. Ça peut paraître compliqué quand on lit tous les papiers à rassembler, mais une fois la destination choisie, quelques mails échangés avec le service d’accueil, c’est totalement faisable. C’est l’université de Bordeaux qui gère les interCHU DOM TOM. Il faut surtout faire attention à envoyer son dossier avant la date butoir : http://www.u-bordeaux.fr/Actualites/Dela- formation/Stages-hors-subdivision-dans-les- DOM-TOM pour toutes les informations. Délai pour le semestre de novembre à mai : avant le 20 mai, et pour le semestre de mai à novembre, avant le 20 décembre. Bien sûr, plus on est ancien et plus on a de chance de voir son dossier d’interchu accepté. Les accords des coordonnateurs et de l’ARS s’obtiennent généralement assez facilement. Il faut ensuite attendre l’accord définitif de la commission de Bordeaux. Surtout ne pas hésiter à contacter des internes qui ont déjà fait des dossiers d’interchu, et ne pas hésiter également à se renseigner auprès des internes des DOM.

Pour ma part j’ai choisi comme destination la Réunion. Première bonne nouvelle : le billet d’avion est financé par le CHU et un hébergement en gîte ou à l’hôtel est proposé les deux premières semaines, le temps de trouver une coloc. L’arrivée est assez rythmée entre la prise de poste, la recherche de la coloc de vos rêves et de la voiture, indispensable sur l’île. Pour s’installer, les contacts se font assez facilement avec les internes Océan Indien, via un groupe Facebook (D.R.I.M, signifiant Direction Réunionnaise des Internes de Médecine, comptant déjà plus de 2000 membres…) puis bien sûr en direct à votre arrivée au gîte.

L’accueil à l’hôpital est très agréable, avec une réunion d’accueil avec les internes et les responsables pédagogiques, ainsi que les responsables des affaires médicales qui pour une fois, sont très accessibles et à l’écoute.

La Réunion a une capacité de formation très intéressante. Il y a deux CHU, l’un à Saint-Denis, au nord de l’île et l’autre à Saint-Pierre, dans le sud. En plus des deux CHU, possibilité d’effectuer son stage dans les CH selon la spécialité.

J’ai été dans le service de réanimation néonatale et pédiatrique au CHU Sud Réunion, à Saint-Pierre.

Le pôle mère-enfant est tout neuf. Le service est composé sur deux étages avec d’une part la maternité, l’unité kangourou, et le secteur de néonatologie et d’autre part de la réanimation néonatale, les soins intensifs néonataux et la réanimation pédiatrique. La maternité de Saint-Pierre compte environ 3500 accouchements par an.

Côté pratique, l’offre d’activité est très intéressante. Selon les semestres et le nombre d’internes (Océan Indien, interCHU, FFI), la répartition dans les différentes unités n’est pas toujours la même avec plus ou moins changement d’unité au cours du semestre. Pour les internes parisiens (petit clin d’oeil), beaucoup plus d’autonomie concernant les gestes et la prise en charge du patient. Le poids de la hiérarchie se fait moins sentir, et la relation avec l’équipe médicale est beaucoup plus « familiale ». Même sentiment pour ce qui est des échanges avec les autres spécialités pour les avis, les gens sont accessibles et répondent facilement.

Pour les avis, beaucoup de surspécialités sont représentées entre les deux CHU et il n’y a pas de problèmes de moyens techniques, bien au contraire.

Pour le recrutement, toutes les pathologies de métropole sont vues, et en plus il y a ce qu’on appelle les « EVASAN » (évacuation sanitaires) venant du 101ème département de France que peu connaissent, Mayotte. On a souvent affaire à des pathologies à un stade extrêmement avancé (plusieurs cas de tétanos vus par nos collègues de Mayotte, ou tumeurs en stade terminal, pour la réanimation neurologique…) ou des pathologies infectieuses tropicales.

Concernant la formation de l’interne, on peut dire que les moyens sont là également. Dans le service, le planning de cours aux internes a été respecté. Plusieurs sessions de simulation pratique (par exemple salle de naissance pour la néonat, pose de cathéter de pression intracrânienne pour la réa ped) ont été proposées, et la présence de l’interne est évidente ! Cours également à Saint- Paul avec les DES de pédiatrie Océan Indien, avec possibilité pour tous les internes du service de s’y rendre. Staffs hebdomadaires communs avec la pédiatrie avec présentation par un interne ou un chef d’un cas clinique, ou séance de biblio.

Agréable surprise également côté temps de travail. Dès la première réunion d’information, il nous a clairement été dit que ce décret était une obligation que devait appliquer l’établissement vis-à-vis des internes. Et oui, nous avons effectivement eu un planning similaire à celui des PH et assistants, avec décompte des demi-journées de présence et de formation. Ça s’est plutôt bien passé, sans problème de continuité des soins.

Toujours dans l’ambiance dynamique et du progrès, mise en place petit à petit de l’e-learning. Mise en place également à l’hôpital de la téléradiologie à partir du semestre prochain. 

Parlons maintenant du quotidien de la vie d’un interne Océan Indien…

Déjà, les colocs. Ambiance assurée, avec nombreuses soirées organisées (pendaisons de crémaillères, « pool party » etc.).

Nombreux événements sportifs ou autres proposés par l’asso des internes (ça vous dit pas le beach volley en sortant de stage ? ou un canyoning le week-end plutôt ?). WE d’intégration proposé également, souvent une nuit en gîte à la montagne, où on se réchauffe au rhum…

L’île est magnifique et offre pleins d’activités, plutôt orientées « montagne » : randonnées toutes plus belles les unes que les autres, canyoning, parapente, parachute, VTT, escalade…

Il y a également le lagon, pas mal pour les repos de garde ! On peut faire de la plongée également. Malheureusement, il y a encore beaucoup de plages où on ne peut pas se baigner car pas de barrière de corail, et présence des requins… mais vu tout ce qu’on peut faire, on est quand même content. De plus, depuis cette année, des filets sont mis en place contre les requins, et on peut à nouveau surfer sur quelques plages ! Certes, rien à voir avec d’autres îles, mais c’est appréciable !

En bref, c’est une belle occasion d’allier qualité de la formation et qualité de vie, pendant au moins un semestre. Expérience fortement recommandée !

Alexandra BOWER
Article paru dans la revue “Association des Juniors en Pédiatrie” / AJP n°13

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