L’ENGAGEMENT DU PH
La médecine n’est pas une activité comme les autres. C’est un engagement, auprès des patients, de le prendre en charge le mieux possible. Et cet engagement se renouvelle pour chacun des patients. Mais, quels sont les engagements particuliers du PH ? En quoi, travailler à l’hôpital, engage celui qui accepte ce poste ?
Il y a 3 niveaux d’engagement :
1.LES ENGAGEMENTS DU PH À L’HÔPITAL
L’hôpital est d’abord un lieu de soin, ouvert à tous. Le PH qui y travaille s’engage donc à prendre en charge tous les patients, quelles que soient leurs pathologies (en fonction des compétences et des possibilités techniques de prise en charge), un patient ne peut être refusé parce que sa pathologie n’est pas assez rentable, pas assez « intéressante » ou spécifique. De même que son origine, son mode de vie ou son statut socio-économique ne doivent pas entrer en ligne de compte dans sa prise en charge. Le PH est garant de cette égalité de traitement.
L’hôpital est, par essence, un lieu de travail en équipe. Le PH qui y travaille s’engage à travailler avec son équipe médicale et paramédicale, en facilitant les échange d’information au sein de cette équipe. « Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ».
Dr Maud Willianson
SCPF
Syndicat des Chirurgiens
Pédiatres Françai
3 FOIS PLUTOT QU’UNE !
L’hôpital, enfin, est un lieu de formation : le PH s’engage à transmettre son savoir, son expérience. Il n’est pas le dépositaire unique d’une connaissance mais l’amplificateur de ces connaissances pour l’ensemble de l’hôpital dans lequel il travaille.
Participe au bon fonctionnement de l’hôpital : CME et comités particuliers : douleur, nutrition, infection, CHSCT.
2.LES ENGAGEMENT DU PH SYNDICALISTE
L’hôpital est soumis à des pressions extérieures : économiques, sociétales, politiques, transmises généralement par l’administration et la direction de l’hôpital, et des pressions intérieures (lutte de pouvoir, rivalités…).
Ces pressions influent sur les conditions de travail des personnels médicaux et paramédicaux.
Le PH, lorsqu’il devient syndicaliste, décide de défendre et améliorer le statut des médecins ainsi que leurs conditions de travail. Il a un rôle local d’écoute et de défense de ses collègues lorsqu’ils sont en difficulté. Il a aussi un rôle national.
3.LES ENGAGEMENT D’UN PH CITOYEN
L’hôpital est partie intégrante de la société, le médecin qui y travaille ne peut s’en extraire. Se préoccuper de l’organisation de la santé en France pour favoriser un accès au soin pour tous, de qualité. Ceci implique de participer à l’élaboration de cette organisation, à la formation des futurs médecins et personnels paramédicaux. Cela implique plus généralement de participer à la vie de la cité, à s’engager pour une société qui permette à un médecin de l’hôpital publique de remplir ses missions en accord avec ses valeurs.
PRATICIEN HOSPITALIER : UNE CARRIÈRE D’ENGAGEMENTS ET DE RESPONSABILITÉS
QU’EST-CE QUE L’ENGAGEMENT ?
Dr Eric Oziol - SYNDIF, SYNdicat Des Internistes Français
Engager signifie étymologiquement mettre en gage. Au Moyen Âge, le mot a un usage juridique correspondant à l’action de lier par un contrat ou par une promesse. L’engagement est alors le fait de participer à une œuvre en échange d’un paiement (les gages). Nos modernes contrats de travail en sont les héritiers. À partir du XVIe siècle, l’engagement désigne ce qui pousse quelqu’un à agir d’une certaine façon ou caractérise celui qui est dans une situation avec des obligations. Au tournant du XVIIIe et du XIXe siècle, avec les guerres de la Révolution puis de l’Empire, le terme d’engagement signifie, non seulement le contrat du soldat, mais également l’introduction d’une unité militaire dans une bataille, voire aussi la bataille elle-même. Ce double sens se retrouve dans l’usage politique contemporain de l’engagement qui signifie à la fois la décision d’agir pour une cause qu’on a choisi de défendre et l’action enclenchée par cette décision. Cependant dans d’autres langues, le terme signifiant engagement ne vient pas du gage mais de l’idée de commission (commit ment en anglais ou compromise en italien), qui signifie que l’engagement est à la fois mission et promesse. Pour tout médecin l’engagement professionnel primordial et au-dessus duquel il ne peut y avoir d’autre engagement, c’est le serment à l’éthique hippocratique, prêté solennellement au moins deux fois : devant ses maîtres universitaires et condisciples, ainsi qu’au conseil de l’Ordre. Cet engagement est à la fois la mission et la promesse faite à l’humanité, rien ne pourrait en soustraire le médecin de sa responsabilité.
ENGAGEMENT IMPLIQUE RESPONSABILITÉ !
Le principe de l’engagement est paradoxal. Il doit être issu du libre choix de l’individu, faute de quoi il perd tout sens ou valeur. Mais si l’engagement est libre, il implique des contraintes qui pourraient apparaitre comme des servitudes contraires à la liberté. La langue commune exprime bien cette dualité : on tient son engagement (caractère libre et actif), mais on est tenu par lui (caractère contraint et passif). Celui qui s’engage doit pouvoir répondre de lui-même à autrui pour la cause, la profession ou le métier qu’il a choisi. Il n’y a donc pas d’engagement sans responsabilité. Le petit Larousse donne une double définition au terme de responsabilité : « 1- la capacité à prendre une décision sans en référer préalablement à une autorité supérieure » et « 2- l’obligation de remplir une charge, une mission », ce qui suppose donc un engagement. Il y a donc à la fois liberté d’initiative et obligation. La responsabilité est un acte à assumer, une décision à prendre, dans une position double, singulière et sociale, de sujet et de citoyen, que possède la personne responsable. La responsabilité est indubitablement liée à l’éthique personnelle pour un engagement collectif.
Le concept, cher à l’INPH, « d’indépendance professionnelle » pour chaque praticien hospitalier, est donc le garant de son engagement éthique et de sa responsabilité professionnelle, institutionnelle, sociétale, mais surtout de son inaliénable responsabilité humaine.
Et pour celui-là qui est solidaire des hommes, l’homme n’est point simple mot de son vocabulaire, l’homme est ce dont il est responsable.
Antoine de Saint-Exupéry
Citadelle
REDÉCOUVRIR L’ENGAGEMENT SYNDICAL
Il est une erreur des plus répandues qui consiste à croire en l’immanence des valeurs. De ses propres valeurs, bien entendu. On en déduit à tort que ces valeurs feraient essentiellement consensus, et que leur non-respect à un moment donné sera reconnu par la grande majorité comme une anomalie ayant nécessairement vocation à se corriger. Un peu comme l’idée selon laquelle la nature serait infiniment résiliente. Dans le contexte hospitalier, on conçoit bien le confort de ces représentations, où l’on pourrait se consacrer pleinement à son art en laissant à d’autres, ou mieux encore au « système », le soin de garantir l’éthique, le progrès, la bienveillance… et les moyens matériels d’y parvenir. Et de fait, nous nous étions installés dans une douce léthargie, bercés par la certitude du bannissement définitif de l’obscurantisme tout comme celle de l’avènement du progrès sans fin. La fin de l’Histoire, en quelque sorte, et confortés en ce sens par une pensée unique lénifiante. Le réveil n’en n’est que plus brutal : rationnement croissant de notre outil de travail, marchandisation rampante du système de santé, dérive technocratique cynique et à l’occasion violente, dégradation du dialogue social, et ce dans un contexte de déficit démocratique sans précédent… tout cela nous renvoie à un principe fondamental : rien n’est jamais acquis.
Ainsi, nous allons devoir réapprendre à porter notre vision de l’hôpital, pour ne pas dire de la médecine : une médecine de qualité et pour tous, mais aussi un environnement de travail en accord avec nos valeurs : l’excellence par le travail et l’action collective, mais aussi l’humanité, la bienveillance, le respect d’autrui, là où d’autres ne voudraient voir que rapports de force, compétition, et technocratie sous couvert d’un discours pseudo-humaniste et sans âme. Mais que veut dire, concrètement, « porter nos valeurs » ? Cela signifie d’abord s’assurer que nous sommes bien au clair avec elles, puis les défendre par la parole comme dans nos actes au quotidien. Mais cela ne suffit pas, car lorsqu’il s’agit d’une vision collective, les individus pèsent bien peu. L’action collective est incontournable. Et le syndicalisme a été conçu précisément dans cette finalité. Nous avons largement oublié que le syndicalisme est, depuis ses origines, indissociable du progrès social, voire du progrès tout court selon l’idée que l’on s’en fait. Et nous redécouvrons que, sans cette action collective, notre système hospitalier et au-delà notre vision de la médecine ne pourrait que régresser, et que notre responsabilité en cela serait immense. Voilà pourquoi nous devons nous engager, ensemble. Pour les patients, et pour nous.
Article paru dans la revue « Intersyndicat National Des Praticiens D’exercice Hospitalier Et Hospitalo-Universitaire.» / INPH n°16