Jean-Pierre Bethoux

Publié le 01 Feb 2023 à 14:59

 

Attractivité médicale et si nous osions une convention collective unique des professions de santé ?

La crise de la Covid a fait prendre conscience aux professionnels de santé, et en particulier aux médecins, qu’ils appartenaient tous à un même « corps » : celui des « soignants » au sens général du terme. Et ce, au fond, quelle que soit leur appartenance statutaire, au secteur public comme au secteur privé.

 Les intégrer dans une convention collective unique est ainsi une option devenue des plus logique et inéluctable.

Le canevas organisationnel et statutaire serait ainsi du même type pour l’ensemble des professions de la santé (médecins, auxiliaires médicaux, pharmaciens, administratifs…) :

  • Formation initiale selon la branche « métier » permettant d’accéder, dès l’issue du concours ou de l’examen de  n de formation selon les spécificités de chaque « métier », à la convention collective unique des professionnels de santé, constituant un véritable système intégré des professions de santé (SIPS). 
  • Puis recrutement selon les modalités propres aux structures de soins recrutantes ; mais toutes aboutissant à un contrat en CDI, à temps plein ou à temps partiel, avec rétribution de base et rétributions complémentaires selon les fonctions, les missions et les responsabilités exercées, et selon les différents types d’intéressement au mérite ou à l’optimisation des parcours de soin proposés aux patients ; rétributions de base et complémentaires étant toutes prises en compte dans le calcul de la retraite.

Pour les professions médicales par exemple, après la période de formation initiale des 1er, 2ème et 3ème cycle, de durée variable selon les spécialités, chaque spécialiste (médecin généraliste ou spécialiste, chirurgien, obstétricien, biologiste, sage-femme ou odontologistes), après validation de son cursus universitaire spécifique, accèderait à un diplôme de doctorat lui permettant d’intégrer la convention des « Praticiens » du SIPS (à un niveau de rang « A » compte tenu de la durée de leurs études et de leurs responsabilités) et d’en porter le titre (suivi du type de spécialité, ex : Praticien urologue, Praticien dermatologue, Praticien Sage-Femme, etc.).

Ces « Praticiens » auraient la possibilité d’exercer soit en établissement de santé (exercice médical hospitalier) public et/ou privé, soit en Maison de Santé Pluridisciplinaire ou MSP (exercice médical de ville), ou dans les deux, en même temps ou successivement (dans le cadre par exemple d’un exercice territorial).

Leur recrutement s’établirait en CDI à temps plein ou temps partiel, facilité par un complet décloisonnement public/privé au sein de « groupements de coopération sanitaire hospitaliers de territoire » (GCSHT) se substituant aux actuels « groupements hospitaliers de territoire » (GHT) purement publics.

Pour la médecine de ville, il serait mis  n à l’installation en cabinet médical isolé, trop exposée de nos jours en termes de sécurité et de protection sanitaire en cas de pandémie. Tout exercice médical de ville se ferait en MSP.

Pour les ES, le statut des « Praticiens Hospitaliers » (décret n°84- 131) et celui des « Hospitalo-Universitaires (HU) » (décret n°84-135) seraient mis en extinction au pro t de la nouvelle convention collective, commune à tous les types de « Praticiens », avec niveau supérieur de rémunération rendant ce Corps plus attractif, comme cela a été initié par le « Ségur de la santé ».

Pour les HU, la valence universitaire, comme celle de la recherche, ferait partie, en début de carrière, des activités donnant droit à des rétributions complémentaires (à l’inverse de leur actuel statut où le salaire est universitaire et les émoluments sont hospitaliers) prises en compte dans le calcul des points de retraite.

Les rétributions universitaires seraient gérées par l’Université concernée au titre de « personnels enseignants associés » (et la carrière gérée dans sa globalité par le CNG) : 

  • Professeurs des universités (associés) à mi-temps : nomination pour une période de 9 ans renouvelable (sans limite).
  • Maîtres de conférences des Universités (associés) à mi-temps : nomination pour une durée portée à 5 ans renouvelable (également sans limite et au lieu de 3 ans pour les disciplines autres que médicales et odontologiques).
  • Praticiens-Assistants des Universités (associés) à mi-temps pour une durée de 2 ans renouvelable une fois. L’indication du titre et de la spécialité  figurerait après le terme « Praticien » (ex : « Praticien-Professeur d’urologie », « Pratricien-Professeur de médecine interne », « Praticien- Professeur d’odontologie », « Praticien-Maître de Conférence d’orthopédie », « Praticien-Chef de Clinique de cardiologie » …).

La valence universitaire serait d’un montant au moins équivalent, voire réévalué, par rapport à celui des actuels salaires des personnels hospitalo-universitaires pour rendre très attractive ce type de carrière.

Certes les HU ne seraient plus, dans leur grande majorité, titulaires de l’enseignement supérieur, puisque leur rémunération de base serait cette fois hospitalière, mais en contrepartie leurs rétributions universitaires, complémentaires, seraient entièrement prises en compte pour le calcul de la retraite  ; ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui avec leurs émoluments hospitaliers.

Cependant, au bout des 9 premières années de fonctions de Praticiens-Professeurs (associés) ou des 5 premières pour les Praticiens- MCU (associés), les HU pourraient être admis sur concours de titres et travaux dans le corps des Professeurs des Universités (titulaires)- Patriciens ou des MCU (titulaires)- Praticiens, où ils seraient cette fois titulaires à temps plein de la Fonction publique d’État (Éducation Nationale) avec des émoluments complémentaires de Praticien (bénéficiant d’un contrat à temps partiel dans un GCSHT et/ou une MSP).

En cas de recrutements successifs, dans des ES (ou des Maisons de santé pluridisciplinaires) différents, à chaque fois, le total des rétributions proposés ne pourrait être inférieur à celui offert par la (ou les) structure (s) où exerçait précédemment le « Praticien » du SIPS. La gestion des carrières des « Praticiens » serait confiée au CNG (comme actuellement pour les PH), avec déconcentration au niveau des ARS pour le contrôle des contrats de recrutement locaux.

La reconstitution de carrière pour les Professeurs d’Universités ou MCU titulaires-Praticiens serait cette fois gérée par l’Université de rattachement et le Ministère de l’éducation nationale et non plus par le CNG. Les conditions d’accession au « Praticinat » du SIPS, la définition et la liste des rétributions complémentaires (liées à des missions spécifiques comme celle de l’enseignement, aux gardes, aux  modalités d’intéressement), de même que les grilles des rétributions de base et complémentaires des « Praticiens », seraient  xés par voie réglementaire, de même que les conditions d’accès à la fonction publique d’État avec le titre de Professeur-Praticien ou d’MCU-Praticien.

Un tel dispositif permettrait d’allier la garantie de l’emploi du statut des Praticiens Hospitaliers à la souplesse de carrière et de recrutement des médecins libéraux. Il serait ainsi mis  n à la dualité d’exercice médical public et privé et aux différentiels de revenus entre médecins de statuts différents.

Article paru dans la revue « Intersyndicat National Des Praticiens D’exercice Hospitalier Et Hospitalo-Universitaire.» / INPH n°25

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