Interview : Angélique et Arthur deux élèves directeurs

Publié le 27 Sep 2022 à 16:58

 

“ Il y a eu beaucoup d’échanges, certaines divisions mais aussi de nombreux points communs „
Angélique Debernard et Arthur Goudard sont en deuxième année de la formation de Directeur d’Hôpital à l’École des Hautes Études en Santé Publique. En juin dernier, ils ont co-organisé avec l’ISNI un week-end où 12 internes et autant d’EDH participaient. Le but ? Laisser de côté les vieux antagonismes pour apprendre à se connaître et construire ensemble, l’hôpital de demain. 

ISNI.- Pouvez-vous présenter votre parcours ? Pourquoi avoir choisi d’intégrer la direction hospitalière ?
Angélique Debernard.-
Avant de présenter le concours interne d’élève directeur d’hôpital, j’ai été sage-femme pendant huit ans à l’hôpital de Bastia. J’ai adoré mon métier mais très tôt, j’ai eu envie de faire évoluer les choses et pas seulement dans ma spécialité. En parallèle de mon travail à l’hôpital, je me suis inscrite en droit et j’ai obtenu un master. Travailler au sein de la direction hospitalière a rapidement été une évidence, le prolongement de ce que j’avais fait car je continue à faire du soin, à plus grande échelle.

Arthur Goudard.- En post-bac, j’ai hésité entre plusieurs voies (dont médecine). J’ai préféré m’orienter vers Sciences Po Toulouse pour travailler dans le service public. J’ai eu l’occasion de faire un stage en préfecture, mais l’administration hospitalière faisait plus de sens. C’est pour contribuer à résoudre les nombreuses difficultés que certains de mes proches rencontrent au quotidien à l’hôpital - pour l’anecdote, j’ai eu le déclic en lisant Vie de carabin -, que j’ai passé le concours.

« Travailler au sein de la direction hospitalière a rapidement été une évidence, le prolongement de ce que j’avais fait car je continue à faire du soin, à plus grande échelle »

Quelles sont vos premières impressions des stages en tant qu’élève directeur ?
Arthur Goudard.-
Dans mon stage actuel, je suis rattaché au CHU de Montpellier, en tant que Directeur «  junior  ». J’y ai tout de suite apprécié les débats, la forte souplesse organisationnelle, la diversité des métiers et le sens aigu de l’engagement. En première année, le stage en immersion hospitalière de deux mois est extrêmement intéressant. Nous travaillons directement aux côtés du personnel administratif, logistique, mais aussi du personnel soignant. Ce fut l’occasion de voir combien chaque agent est impliqué dans sa mission.

Angélique Debernard.- Le stage en immersion est effectivement très enrichissant. Je connaissais déjà l’hôpital, et pourtant, je me suis rendue compte que de nombreux services m’étaient étrangers, notamment les services support : la blanchisserie, la restauration, l’informatique, etc.
En première année, nous avons aussi l’occasion d’effectuer un stage en France ou à l’étranger, dans une entreprise publique ou privée en lien avec la santé. Je l’ai effectué à l’hôpital de Cerdagne dans les Pyrénées, seul établissement transfrontalier d’Europe. J’ai découvert que les Espagnols avaient réussi à mettre en place un système d’informations au niveau national ! Alors qu’en France, chaque hôpital a encore son propre système informatique ne communiquant pas avec les autres…

Comment vous êtes-vous rapprochés des internes en médecine ?
Angélique Debernard.-
Il y avait déjà une initiative, lancée par nos prédécesseurs qui s’appelait «  L’Hôpital ensemble  ». Cela consistait à des rencontres informelles autour d’un café pour mieux se connaître. Thibault Steinmetz, [NDLR : interne en médecine du travail à Grenoble et vice-président ISNI réseaux et formation] nous a contacté pour co-organiser un week-end afin de mieux se connaître et échanger ensemble.

Arthur Goudard.- C’est ainsi que l’on s’est retrouvé à Paris les 4 et 5 juin derniers : 12 internes et 12 élèves directeurs. Nous avons invité des élèves directeurs de première année car nous souhaitons tous que cette collaboration devienne pérenne. Je souhaite préciser que, de notre côté, nous ne représentions aucun syndicat. Nous venions en notre nom propre.

Angélique Debernard.- C’était un week-end « brise-glace » au départ : mieux comprendre le travail de l’autre, ses motivations, ses préoccupations, sa pression aussi. Il y a eu beaucoup d’échanges, certaines divisions mais aussi de nombreux points communs. Nous avons choisi de travailler ensemble en table ronde sur des sujets qui nous concernaient autant les uns que les autres : la gouvernance, la formation, l’organisation du travail et le financement.

Qu’est-ce qui est ressorti de ces échanges et de ces tables rondes ?
Angélique Debernard.-
Ce qui ressort de ce week-end est surtout l’envie de travailler ensemble ! Sur ce bateau, nous sommes co-capitaine et nous avons fixé un cap commun. Quant aux moyens à mettre en face des propositions, c’est une autre étape.

Arthur Goudard.- Ce qui est ressorti, c’est d’abord que ceux qui construiront l’hôpital de demain peuvent et veulent travailler ensemble. Sur le fond, c’est l’idée de privilégier la compétence aux traditions. Les compétences de chacune de nos professions doivent être bien défi nies. Nous avons écrit ces propositions dans une tribune qui n’est, à l’heure actuelle, pas encore publiée [NDLR : à la mi-août].

« Ce qui ressort de ce week-end est surtout l’envie de travailler ensemble ! Sur ce bateau, nous sommes co-capitaine et nous avons fixé un cap commun »

Les 3 axes de propositions pour l’hôpital de demain des élèves directeurs participants et internes

1 - Une gouvernance unique et réfléchie fondée sur la compétence et non sur les titres

2 - Des formations courtes inter-métiers qui associent les soignants, les administratifs ainsi que le personnel logistique afin de mieux comprendre comment l’autre travaille.

3 - L’organisation du travail qui prend soin des patients et des professionnels avec la fin des gardes de 24h pour les internes et l’inscription, dans la loi, d’un « bouclier soignant » c’est-à-dire un minimum de soignants en charge d’un patient dans tous les services hospitaliers.

Angélique Debernard
Arthur Goudard

Article paru dans la revue “ Le magazine de l’InterSyndicale Nationale des Internes ” / ISNI n°29

 

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