Intelligence artificielle : rêve ou cauchemar du radiologue ?

Publié le 14 May 2022 à 09:48

Séminaire FNMR - Lyon 2 juin 2018

Le séminaire de la Fédération Nationale des Médecins Radiologues (FNMR) Intelligence artificielle : rêve ou cauchemar du radiologue ? tenu à Lyon le 2 juin dernier a permis de faire un vaste tour d’horizon des questions posées par le développement de l’IA et de son application à l’imagerie médicale.

En 2017, le congrès nord-américain de la radiologie, le RSNA1, avait fait de l’intelligence artificielle un de ses thèmes. Plusieurs responsables de la Radiologie française avaient été sollicités par la presse sur ce sujet.

Récemment, le rapport du député Cédric Villani et l’intervention du président de la République lors d’un colloque au Collège de France, le 29 mars dernier, ont montré que l’État français entend faire de l’intelligence artificielle un axe majeur du développement technologique en France et la santé un des grands chantiers. La mise en oeuvre commence avec l’annonce, par la ministre de la Santé, Agnès Buzin, de la création d’un hub de données de santé.

Certains prédisent la disparition, d’ici quelques années, des médecins radiologues remplacés par l’intelligence artificielle. D’autres considèrent que l’IA sera une nouvelle technique au service des patients qui donnera au médecin radiologue les moyens de se recentrer sur le coeur de son métier.

Pour le Dr Paul Chang, de l’université de Chicago, si certains peuvent envisager de remplacer les radiologues par des machines, c’est peut être parce que nous exerçons comme des machines. Il appartient donc aux médecins radiologues de s’interroger non pas seulement sur l’utilisation d’une nouvelle technologie, l’Intelligence Artificielle, mais aussi sur leur pratique. Au-delà de sa dimension technologique, l’IA peut-elle contribuer à renforcer la relation entre le médecin radiologue et son patient ?

Ce sont toutes ces questions que nous avons voulu aborder lors de notre séminaire en explorant les différentes dimensions de l’IA : philosophique, géo-politique, médicale, déontologique, juridique, technique.

La France ne manque pas d’atouts pour développer des projets d’intelligence artificielle dans le domaine de la santé et en imagerie. Citons en premier lieu, la richesse des données médicales sans équivalent à l’étranger. L’existence d’un identifiant unique pour chaque Français, le numéro de sécurité sociale, renforce encore l’attrait de nos bases de données. En imagerie médicale, les PACS2 archivent non seulement les images mais aussi le compte rendu médical.

Un autre atout est le nombre de start-up françaises qui s’appuient sur l’excellence de la formation des ingénieurs, en particuliers les data-ingénieurs, et des mathématiciens formés en France. Le problème est que notre pays ne sait pas toujours les retenir, nombre d’entre eux, personnes physiques ou entreprises, s’installant aux Etats-Unis, souvent en Californie.

Si la France n’est pas capable de développer son propre écosystème d’Intelligence Artificielle, d’autres le feront pour nous. La concurrence sera vive dans ce domaine. Les entreprises américaines avec, entre autres, les GAFAM, mais aussi les entreprises chinoises avec les BATX3. Ces entreprises, et leur pays d’origine, n’ont pas la même culture médicale que la nôtre. La solidarité de notre système de santé, la relation avec le patient, le respect de l’éthique sont autant de valeurs propres à notre vieux continent et plus encore à la France. 

Le séminaire a suggéré un certain nombre d’objectifs que nous pourrions assigner à un futur outil d’IA dédié à l’imagerie médicale. Il a aussi pointé certaines difficultés. Parmi celles-ci, une a été mise en évidence par le président de l’UNIR, Cedi Koumako, qui a présenté l’état d’une enquête conduite par son syndicat sur la préparation des internes en radiologie à l’IA. Force est de constater que si le sujet intéresse les jeunes, la faculté ne leur donne pas aujourd’hui les moyens de s’en emparer comme d’une technique complémentaire à leur exercice quotidien de demain.

Les médecins radiologues, qu’ils exercent à l’hôpital ou en libéral, qu’ils soient en formation ou engagés dans leur carrière doivent maîtriser ce nouvel outil. C’est l’enjeu de l’annonce que nous avons faite, le Professeur Jean-François Meder et moi-même, au nom du G4, du lancement d’un projet d’écosystème français de l’IA dédié à l’imagerie médicale. Il sera indépendant des GAFAM et BATX

Grâce à un big data potentiel de plus de 5004 millions de dossiers médicaux et libellés, enregistrés dans les PACS libéraux et hospitaliers, grâce à l’exhaustivité des comptes rendus radiologiques archivés par les médecins radiologues des services d’imagerie médicale français depuis cinq ans, cet outil mettra une nouvelle technologie porteuse de progrès médicaux au service des patients.

L’enregistrement vidéo du séminaire sera bientôt disponible sur le site de la FNMR. Vous pouvez déjà regarder l’interview que le Dr Chang a donnée à l’occasion de ce séminaire.

https://www.fnmr.org/fr/pages/programme-ia-2018

  •  Picture Archiving Communication System (Système d’archivage et de transmission d’images)
  •  GAFAM : Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft – BATX : Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi.
  •  120 millions d’examens d’imagerie médicale sont réalisés chaque année.
  • Article paru dans la revue “Union Nationale des Internes et Jeunes Radiologues” / UNIR N°32

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