Imagerie cardiovasculaire : A quoi correspond en pratique un MINOCA

Publié le 25 May 2022 à 09:48
#Cardiologue

(Myocardial infarction with non-obstructive coronary arteries) ?

MINOCA signifie myocardial infarction with non-obstructive coronary arteries, littéralement « infarctus du myocarde à coronaires saines ». Cependant, dans les recommandations ESC 2020, la définition de MINOCA est en réalité plus subtile car elle correspond à un diagnostic transitoire posé chez un patient présentant un tableau compatible de syndrome coronaire aigu mais sans sténose coronaire significative à la coronarographie (1). Ainsi, comme le mentionnent certains experts, il s’agit plutôt d’un « diagnostic in progress » (en cours d’évaluation) que d’un diagnostic étiologique final.

Devant un patient présentant un MINOCA, les 3 principaux diagnostics étiologiques que l’on pourra évoquer seront (1) :

  • La myocardite
  • L’infarctus à coronaires saines
  • Le syndrome de Takotsubo

Les recommandations de l’ESC exigent maintenant une IRM cardiaque systématique car dans ces trois cas, le seul examen capable de poser le diagnostic final est l’IRM cardiaque !


Figure synthèse : Faire le diagnostic étiologique des MINOCA et de la cardiopathie ischémique selon la topographie du réhaussement tardif.

En pratique le compte rendu de l’IRM cardiaque doit apporter une réponse à ces 3 questions (Tableau) :

  • Quel est le diagnostic étiologique du MINOCA ?
  • Quel est le retentissement sur le ventricule gauche ?
  • Existe-t-il un retentissement sur le ventricule droit ?


Tableau : Les 3 questions à évoquer devant un compte rendu d’IRM cardiaque pour MINOCA (4).

Comprendre simplement le T1-mapping et T2-mapping en IRM cardiaque ?
Bref rappel sur l’IRM :
Le spin, correspond à l’orientation magnétique des atomes d’hydrogène dans le corps humain. A l’état de base, l’orientation de chaque spin des atomes d’hydrogène est aléatoire, mais l’aimantation globale est nulle.

Lorsque l’on soumet ces atomes à un champ magnétique, le spin de chaque atome est modifié, et s’aligne dans la direction du champ.

Lorsque l’impulsion cesse, chaque spin retourne à son état de base, en émettant une énergie qui définit 2 paramètres :

  • T1 = temps de relaxation longitudinale du tissu étudié
  • T2 = temps de relaxation transversale du tissu étudié

Chaque atome d’hydrogène aura un temps de relaxation T1 et T2 différents selon les tissus auxquels il appartient.

Comment interpréter le T1 d’un tissu ?
Le T1 d’un tissu est directement relié à la quantité d’eau libre contenue, et par extension, au volume extracellulaire. Ainsi, une élévation du T1 au sein du myocarde peut traduire une augmentation pathologique de son secteur extracellulaire (oedème, nécrose, fibrose…).

Les séquences de T1-mapping consistent à capturer plusieurs images, durant une apnée, avec différentes pondérations T1 afin de construire une cartographie précise dont la valeur de chaque pixel correspond au temps de relaxation T1. L’intérêt du T1-mapping est de pouvoir déterminer précisément les caractéristiques tissulaires en donnant une valeur absolue de T1 pixel par pixel afin de détecter une élévation pathologique du secteur extracellulaire.

En pratique : c’est la séquence de référence pour détecter une fibrose interstitielle diffuse avec une élévation pathologique globale du T1 myocardique (non détectable en rehaussement tardif).


Figure : Exemple d’un T1-mapping en séquence ShMOLLI (shortened MOLLI) (3)

 
Figure : Hypothèses diagnostiques selon le T1 mapping natif et l’ECV du myocarde (d’après Messroghli et al. JCMR 2017)

Comment interpréter le T2 d’un tissu ?
Le T2 mapping est une séquence permettant d’obtenir une image paramétrique du myocarde basée sur le temps de relaxation transversale T2 pixel par pixel en s’affranchissant des limites des séquences traditionnelles du T2 (un faible rapport signal sur bruit, une perte de signal liée aux mouvements cardiaques dans les séquences sang noir, une grande dépendance aux inhomogénéités de champ magnétique).

La valeur du T2 est augmentée par la présence d’oedème myocardique du fait d’une proportion accrue d’eau libre. Il s’agit d’une technique très reproductible, tout comme le T1 mapping.

Cette séquence est particulièrement utile pour les pathologies s’accompagnant d’un oedème myocardique : IDM au stade aigu, myocardite, Tako-Tsubo, sarcoïdose en poussée, rejet de greffe cardiaque…


Figure synthèse : Critères de Lake-Louise modifiés pour le diagnostic de Myocardite (d’après Ferreira VM, et al. J Am Coll Cardiol. 2018;72(24):3158-3176.)

 
Tableau : Signes évocateurs en IRM cardiaque d’infarctus à coronaire saine, de myocardite, et du syndrome de Takotsubo (1, 3).

Conclusion
L’IRM cardiaque est aujourd’hui indispensable devant tout tableau de syndrome coronaire aigu avec élévation de troponine sans sténose significative en coronarographie. En effet, elle permet de faire le diagnostic étiologique parmi 3 grands diagnostics en routine : infarctus à coronaires saines, myocardite et syndrome de Takotsubo.

Références

  1. Pasupathy S, Air T, Dreyer RP, Tavella R, Beltrame JF. Systematic review of patients presenting with suspected myocardial infarction and nonobstructive coronary arteries. Circulation. 2015 10;131(10):861–70.
  2. Ishii M, Kaikita K, Sakamoto K, Seki T, Kawakami K, Nakai M, et al. Characteristics and in-hospital mortality of patients with myocardial infarction in the absence of obstructive coronary artery disease in super-aging society. Int J Cardiol. 2020 15;301:108–13.
  3. Marcu CB, Beek AM, Van Rossum AC. Cardiovascular magnetic resonance imaging for the assessment of right heart involvement in cardiac and pulmonary disease. Heart Lung Circ. 2006;15(6):362–70.
  4. Biere L, Larralde A. Chapitre 7: MINOCA. In: Polycopié national d’Imagerie cardio-vasculaire (Société Française de Cardiologie – Société Française de Radiologie). Elsevier-Masson. 2021.

Article paru dans la revue “Collèges des Cardiologues en Formation” / CCF N°15

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