Imagerie Cardiaque : La radiologie cardiaque, une spécialité qui concerne tous les radiologues !

Publié le 11 Jul 2022 à 10:47

Promouvoir pour les internes de radiologie un choix vers l’imagerie cardiaque est chose aisée du fait des possibilités incroyables du scanner et de l’IRM qui ont fait des progrès incroyables ces 20 dernières années. Les patients sont là très nombreux avec des cardiopathies ischémiques, valvulaires, de l’insuffisance cardiaque et bien entendu des cardiopathies arythmogènes, congénitales, tumorale, hypertrophiques, … Pendant longtemps, les pathologies cardiovasculaires étaient la première cause de mortalité, devancées maintenant par la pathologie oncologique, du fait des progrès de dépistage, de diagnostic et de traitement. La radiologie s’insère dans ce domaine médical avec des spécialités fortes comme la cardiologie et la chirurgie cardiaque. Convaincre ces médecins et chirurgiens de nous faire confiance en nous confiant leurs malades n’est pas chose aisée car ils ont l’habitude de maîtriser la chaîne des examens. Et pourtant, progressivement mais sûrement, nos techniques s’améliorent, les indications augmentent et notre place est reconnue. Nous devons être de très bons médecins pour que d’autres ne prennent pas notre place. Cela est vrai dans toutes les spécialités car neurologues, rhumatologues, cardiologues sont à l’affût d’un défaut d’offre de notre part.

Revenons quelques années en arrière, lorsque j’étais interne. J’assurais la vacation d’IRM cardiaque, 1H30 avec un seul patient. La technique était simple : du T1 dans les 3 plans pour explorer une cardiopathie congénitale. J’arrivais avec l’objectif de lire les articles du journal de radiologie français (ancêtre de DIII), voire parfois European Radiology, et je repartais avec une cinquantaine d’images relativement facile à interpréter. Et puis, le cinéIRM est arrivé suivi des séquences d’IRM avec rehaussement tardif. Ces séquences se sont améliorées pour aujourd’hui être réalisées en apnée. En parallèle est arrivé le gating en scanner avec la possibilité de réaliser des coroscanners.

Au départ 3 radiologues assuraient la vacation pour reconstruire les images selon les plans intéressants alors que maintenant, les reconstructions sont quasi-instantanées. Quelle évolution  ! Quelles innovations techniques de la part des constructeurs  ! Et des indications se sont confirmées avec une place grandissante pour ces imageries. Nous évaluons non seulement la morphologie mais aussi la fonction cardiaque (systolique, diastolique), la perfusion myocardique, la viabilité cardiaque. Progressivement ils remplacent l’épreuve d’effort et la scintigraphie myocardique dans la majorité des indications.

Les centres d’expertises en radiologie et imagerie cardiaque n’arrivaient pas à répondre à la demande et la spécialité radiologique a pris le parti de former tous les radiologues pour que ces examens, au moins les coroscanners, puissent être réalisés par tous les radiologues. Pas besoin d’être un surspécialiste des cardiopathies congénitales pour connaître les indications d’un coroscanner, optimiser les acquisitions, interpréter et collaborer avec les cardiologues. Un groupe d’interface entre la radiologie et la cardiologie a été créé permettant de travailler les indications et les pratiques avec notamment un DIU commun. Ce dernier a été fermé l’année dernière compte tenu maintenant de la réforme du 3ème cycle qui permet de former les radiologues à la réalisation de ces examens. Les relations entre les 2 sociétés continuent avec un rôle principal d’optimiser les parcours  : pour le cardiologue c’est celui de connaître les indications et de s’occuper de la conduite à tenir, et pour le radiologue c’est celui de connaître la pertinence des demandes, d’optimiser les acquisitions, d’interpréter et de discuter la conduite à tenir avec le correspondant et les cardiologues. Dans certains centres, l’organisation varie compte tenu des égos de certains et de l’absence d’offre radiologique. Des tendances à l’auto-prescription doivent être combattues et travailler ensemble s’apprend. Dans tous les CHU, le CERF veille à ce que les internes puissent accéder à des stages validant la spécialité de radiologie cardiaque et vasculaire. L’investissement en radiologie et imagerie cardiaque est en général couplé à de la formation en vasculaire diagnostique et interventionnelle mais aussi parfois à la formation en radiologie thoracique. Compte tenu de la demande, tous les radiologues doivent être formés au coroscanner ou l’IRM cardiaque de viabilité et d’évaluation de la fonction ventriculaire. Les centres d’excellence conservent en général l’évaluation des cardiopathies congénitales, les examens spécialisés de stress, les tumeurs cardiaques, les pathologies rares.

Une frayeur a parcouru le monde de la radiologie suite à l’apparition de l’option en imagerie cardiaque d’expertise pour les cardiologues dans le cadre de la réforme du 3ème cycle. Le CERF et la SFR sont vigilants. Les cardiologues ont surtout besoin de s’investir en échographie transcutanée ou œsophagienne, de diagnostique ou en complément des actes interventionnels morphologiques (TAVI, MitralClip, Stenting pulmonaire, fermeture d’un auricule, …). Nous avons demandé au ministère de pouvoir former les radiologues à l’échographie cardiaque et aux activités interventionnelles. Il est recommandé à tous les terrains de stages en radiologie d’accepter un interne de cardiologie que si celuici ne gêne pas la formation des internes en radiologie. Le stage est limité dans le temps (1/2 journée par semaine sur un an)  ; il est limité aux indications et conduite à tenir, en aucune manière pour de l’interprétation et acquisition. Il est recommandé une contrepartie pour la radiologie, à savoir soit accepter de recevoir un interne de radiologie en échographie ou en salle de cathétérisme, soit que l’interne de cardiologie tienne à jour des registres en radiologie.

« Compte tenu de la demande, tous les radiologues doivent être formés au coroscanner ou l’IRM cardiaque... »

Mon rôle est de veiller à votre bonne formation dans toutes les spécialités de notre métier. Acquérir une formation complète est la base pour que demain vous puissiez vous adapter aux évolutions du métier. Ensuite, certains d’entre vous sont attirés par des spécialités en radiologie plus que d’autres. Des effets de modes existent mais toutes les spécialités sont intéressantes et surtout demande une présence de notre part sur le territoire pour offrir nos soins à tous. Vous devez vous investir dans une, deux, voire 3 spécialités en fonction du centre où vous aller exercer. Compte tenu du nombre de patients, il est indispensable que nous soyons présents en radiologie cardiaque, vasculaire et thoracique. La crise sanitaire SARS-Cov2 est là pour nous le rappeler. Nous ne pouvons dissocier l’examen d’un organe de son environnement. Avec nos examens, nous réalisons une analyse du cœur mais aussi du thorax dans son ensemble. Nous soignons des patients et non des organes ou des maladies. Notre valeur ajoutée est bien dans le soin, la compétence et la visibilité des patients. Pour le moment, les indications principales de l’imagerie cardiaque sont portées par les cardiologues qui revendiquent maîtriser la filière. Cependant, évaluer la fonction cardiaque ou dépister une cardiopathie ischémique est utile en oncologie, en diabétologie, en pré-opératoire, en dépistage pour certaines personnes, ce qui nous conduit à établir des liens avec d’autres spécialités pour ces demandes. À nous d’être médecin et non seulement de réaliser l’acte mais de conseiller sur les conduites à tenir. Nous réalisons une consultation basée sur un examen de radiologie. N’oubliez pas le patient et en pathologie cardiovasculaire, il y en a beaucoup  ! Merci à la SFICV d’offrir tant de formations de qualité, de promouvoir une SFICV junior dynamique, des ateliers de traitement d’imagerie en coupes, des congrès et réunions, des webinars, … La force de notre spécialité est bien de savoir s’organiser. La reconnaissance de la spécialisation en radiologie cardiaque a été demandée par les internes lors du bureau du CERF précédent. Un diplôme appelé «  BADGE  » a été créé pour reconnaître votre investissement dans les domaines que vous avez choisis. Un stage en phase de consolidation, un travail personnel en radiologie cardiaque, une participation à une réunion de la SFICV (SFICV Junior), la visualisation des cours de consolidation en radiologie cardiaque permet au coordonnateur de valider ce badge. Ce dernier vient en complément de votre formation de DES. Il peut se finaliser lors de votre assistanat, permettant ainsi de faire le lien entre formation initiale et continue.

« Acquérir une formation complète est la base pour que demain vous puissiez vous adapter aux évolution du métier. »

En conclusion, la radiologie cardiaque peut faire peur devant son aspect complexe tant dans la réalisation des examens qui doivent tenir compte de la respiration et des battements cardiaques, que par l’aspect rémunérateur moindre compte tenu d’une « productivité  » à l’heure plus faible que certains autres examens. N’oublions pas que vous vous êtes investis en médecine pour soigner et offrir à tous vos compétences. Gardez votre passion et votre engagement au profit des patients ; soyez innovants en ne suivant pas ce que la majorité des internes choisissent car les cabinets ou les groupes hospitaliers ont besoin de diversité et de nombreuses opportunités existent. En choisissant la radiologie cardiovasculaire, vous aurez accès à une surspécialisation qui s’adresse à la fois à des patients en urgence mais aussi en programmé, à des enfants et à des patients plus âgés ; bref une spécialité radiologique challengée car innovante, variée, intéressante et d’avenir. Merci de vous y investir à fond et en nombre  !

Article paru dans la revue “Union Nationale des Internes et Jeunes Radiologues” / UNIR N°45

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