Economie de la santé en radiologie

Publié le 16 May 2022 à 07:49


Quelques points pour nous éclairer sur l’organisation pratique de l’imagerie en France et son mode d’organisation d’un point de vue économique grâce au Professeur Jean Pierre Pruvo, chef de service de neuroradiologie du CHU de Lille, extrêmement impliqué dans le maillage territorial des équipements d’imagerie, notamment dans la région des Hauts de France.

Victor Delemar : Que peut-on dire aujourd’hui sur les dépenses d’imagerie en Santé ?
Pr Jean Pierre Pruvo :
L’écart entre l’imagerie conventionnelle et l’imagerie en coupe est une incohérence médicale en 2018.

En 2015 par exemple, la répartition des dépenses en ville concentre 2,3 milliards d’euros pour le standard et l’échographie et seulement 1,1 milliards pour l’imagerie en coupe.

Il faut favoriser l’accès des patients au scanner et à l’IRM tout en garantissant des indications justes et utiles et en valorisant des actes spécialisés à forte plus value intellectuelle.

En 2017, voici un tableau qui résume le nombre d’acte des 4 modalités d’imagerie médicale réalisées en ville et les activités externes des établissements publics et privés :

Radiologie Conventionnelle 44 611 276 1 430 076 552 Echographie 27 977 815 1 680 291 737 Scanner 4 763 630 221 446 274 IRM 4 484 648 287 578 102

Le coût du fonctionnement des scanners et IRM en France est élevé du fait du sous dimensionnement du parc d’équipements modernes actuels, il entraîne un élargissement des plages d’exploitation des machines, aboutissant à la constitution d’équipes fonctionnant souvent de 7h à 21h et le samedi matin, frein à l’attractivité et pénalisant le financement. L’amplitude de fonctionnement devrait être celle des blocs opératoires en soins programmés à adapter selon les conditions locales, à l’image de nombre de pays européens et du monde.`

Victor Delemar : Comment dès lors augmenter les possibilités d'accès à l’imagerie pour une médecine de qualité ?
Pr Jean Pierre Pruvo : Ceci doit passer par une majoration du nombre de scanners et d’IRM en France.

En 2018, il y a au dernier chiffrage, 1030 IRM soit un taux de 15 par millions d’habitant.

Le Japon en totalise 51 à titre de comparaison.

Il faut également développer les plateaux techniques complets et diversifiés – regroupant échographie, radiographie, scanner, IRM, proximité des équipements TEP, reliés en réseau qui vont permettre d’assurer le partage des expertises par des radiologues spécialisés et des manipulateurs compétents dans ces domaines.

L’imagerie moderne permet en effet d’assurer au malade une médecine de précision et parfaitement personnalisé.

Ces nouvelles possibilités d’imagerie doivent s’accompagner d’un soutien fort à la démographie des médecins radiologues, en rapport avec les croissances des activités diagnostiques et interventionnelles et de la permanence des soins.

Victor Delemar : Quels objectifs pour l’avenir, notamment en radiologie interventionnelle et quelle place pour l’intelligence artificielle ?
Pr Jean Pierre Pruvo : Il faut :

. Encourager l’accès des jeunes radiologues en formation en radiologie interventionnelle et à la formation clinique afin de leur donner les moyens de s’occuper de leurs patients. Ceci passe par un renforcement de l’ enseignement des indications de ces techniques innovantes dans le second cycle des études médicales.

. Dédier des équipements à la radiologie interventionnelle pour permettre enfin le développement des nouvelles thérapies guidées par l’image.

. Anticiper la nouvelle révolution numérique en imagerie médicale en intégrant l’acte médical qu’est la téléradiologie dans des projets de télé-médecine associant les radiologues à des équipes pluridisciplinaires et soignantes, à l’opposé des modèles non organisés de télé-interprétation.

. Favoriser recherche et innovations utilisant les bases de données d’imagerie, qui constituent un support indispensable notamment pour les développements en intelligence artificielle, dans le respect des aspects éthiques et législatifs.

Article paru dans la revue “Union Nationale des Internes et Jeunes Radiologues” / UNIR N°34

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