COVID-19 : Communiqué CNPMT

Publié le 30 May 2022 à 15:09

À l’attention des professionnels de santé au travail

03 avril 2020

Le Conseil National Professionnel de Médecine du Travail (CNPMT) est composé de l’ensemble des institutions de professionnels de médecine du travail, notamment les société régionales et nationales de médecine du travail, les enseignants en médecine du travail, les syndicats représentatifs des médecins du travail, les représentations des diverses branches de médecins du travail publiques et privées.

Dans la confrontation à la pandémie COVID-19 le CNPMT a pris le parti de rester dans un premier temps sur la réserve vu l’investissement cognitif et opérationnel de la plupart des professionnels de santé au travail dans l’accompagnement des salariés et des entreprises, au mieux de leur possibilité.

Le CNPMT toutefois, alerté par plusieurs de ses membres, attire l’attention sur trois conditions de cadrage de l’action de la médecine du travail.

  • La Direction Générale du Travail a diffusé le 20 mars 2020 une instruction sur l’organisation des services de santé au travail, l’organisation des visites et de l’action en milieu de travail qui ont déconcerté de nombreux praticiens de terrain tant elle apparaît décalée par rapport à la problématique des salariés et des collectifs de travail dans la confrontation à la pandémie. L’application de la réglementation des visites de reprises et d’embauche des salariés pour les entreprises « exerçant une activité nécessaire à l’activité économique de la nation » apparaît comme une injonction paradoxale avec une dimension de garantie assurantielle des entreprises, alors que la préoccupation des travailleurs et des entreprises est bien de rechercher les moyens de préserver les salariés et de limiter l’intensité de la contagion pandémique, en recherchant les moyens. Dans un cadre d’acculturation jamais atteinte sur une problématique de santé, l’utilité de la médecine du travail, est alors de jouer son rôle de conseil sur les protections, l’hygiène, les processus d’activité et de côtoiement pour le respect des distanciations inter-corporelles ; leur rôle n’est pas alors de sélectionner l’affectation d’un salarié à partir d’un pouvoir médico-légal, mais de faciliter le pouvoir d’agir, aux travailleurs fragiles qui ont besoin d’un retrait, aux entreprises et aux travailleurs en étant disponible pour une compréhension des enjeux et des risques dont ils seront enrichis pour leurs décisions et leurs négociations.
  • Le CNPMT apprécie le travail de recommandation de la SFMT (Société Française de Médecine du Travail, membre du CNPMT) du 23 mars 2020 à destination des équipes de santé au travail des établissements de soins. C’est un travail de catégorisation des travailleurs fragiles et des situations d’exposition qui est et sera souvent utile aux professionnels de santé au travail.
  • Cependant le CNPMT constate que le terme de « recommandations » d’éviction ou non, évoque des conduites à tenir normatives assimilables à un pouvoir de sélection par la médecine du travail alors que les choix relèvent des directions, des ressources humaines, des coopérations négociées et vécues et de l’engagement de chaque soignant, dans un contexte là aussi d’acculturation remarquable, même si celle-ci est traversée par les controverses. Cette position met à mal éthiquement de nombreux médecins du travail face à la relativité des moyens de protection et de dépistage, et beaucoup d’entre eux « adaptent » leur pratique avec l’intelligence des opérateurs des établissements par la recherche de compréhension et de formalisation de conseils les plus audibles et partageables.

    Le CNPMT propose donc aux professionnels de santé au travail d’interpréter les recommandations comme repères référentiels et soutient la SFMT pour continuer ce travail en infléchissant leurs rédactions pour mieux être en phase avec l’attente des médecins du travail de terrain qui veulent accompagner par leurs analyses et leurs conseils la responsabilité et le pouvoir d’agir des établissements et des soignants sans se substituer à eux.
    D’autres composantes du CNPMT sont bien sûr disposées à contribuer à l’élaboration de ces repères référentiels.

  • Le CNPMT prend acte de l’ordonnance du 1er avril 2020 d’adaptation des conditions d’exercice des missions des services de santé au travail et apprécie la pondération implicite de l’instruction DGT citée plus haut. Une grande majorité des médecins du travail cherche déjà à s’impliquer dans la participation à la lutte contre la propagation du Covid-19 écrite dans l’article 1, mais cette participation ne doit pas se limiter à l’appui et à l’accompagnement des entreprises comme écrit dans les alinéas 2 et 3 de l’article 1, mais aussi dans l’aide et l’accompagnement des salariés eux-mêmes pour la préservation de leur santé au travail.
    En attendant le décret déterminant l’application de l’article 2, le CNPMT rappelle que la prescription d’arrêts de travail doit se concevoir comme un complément des activités de médecine de soins qui seraient devenues impossibles ou difficilement accessibles. La possibilité de procéder à des tests de dépistage, au-delà du protocole à définir, doit avoir comme objectif de permettre à chaque salarié avec son consentement éclairé de connaître son statut de contagiosité ou de protection pour son investissement, d’en avoir une vue d’ensemble accessible à la collectivité de travail, mais les préconisations éventuelles ne doivent pas être un critère de sélection médico-légale autoritaire en dehors de la protection du collectif de travail.
    Le caractère transitoire de ses dispositions doit être réaffirmé et tenu. Le maintien des seules visites jugées indispensables par le médecin du travail va dans le bon sens et la reconnaissance de la responsabilité professionnelle des médecins du travail. L’observation des conséquences est une opportunité pour alléger des empilements d’obligations réglementaires parfois impertinentes.
  • Gérard LUCAS
    Président du CNPMT
    06 80 23 31 20

    ACTUALITÉS

    Les négociations sur la réforme de la santé au travail ont repris avec le Medef mais la confiance n’y est pas, d’abord parce que la CFE-CGC a été échaudé par de précédentes négociations où la parole n’a pas été tenue (cf. la déclaration d’ouverture) et également parce que les représentants du Medef quand ils connaissent le sujet sont des personnes intéressées au maintien du statu quo et de la gouvernance actuelle. Quant aux politiques, après l’avancée des préconisations Lecocq et leur mise en musique dans le rapport des 3 experts, on a constaté un intense lobbying se traduisant par le rapport Artano, Gruny dont l’axe essentiel est de ne pas toucher à la gouvernance et de confier le système aux directions actuelles !

    Mais les carsat ont été bousculées par le texte sur la retraite, est-ce un signe ? Les journées parlementaires sur la santé au travail du 3 mars sont également un signe en ce sens qu’en tribune il n’y a aucun professionnel de santé au travail ni aucun syndicaliste ! troublant ! Mme Lecocq y a déclaré qu’il y aurait une réforme pour l’année 2020 et qu’elle tiendrait compte de son rapport mais également du rapport du sénat (Artano, Gruny), ce qui peut laisser entendre un possible maintien de la gouvernance actuelle.

    J’y ai été impressionné par le manque de connaissances qui émanait de certaines réponses ainsi quand le Dr Sebaoun ancien parlementaire et médecin du travail réclamait que l’indépendance de l’infirmière soit assurée au même niveau que celui des médecins on a senti une incompréhension du sujet dans la table ronde ! De même, devant les exposés un peu perchés de l’entreprise libérée où les salariés sont présentés comme autonomes et de ce fait libérés du stress, j’ai posé la question de ce que devenaient des notions comme le lien de subordination et la présomption d’imputabilité, on a pu percevoir le même flottement de méconnaissance que lors de la précédente intervention !

    Vous trouverez dans ce numéro les communiqués et déclarations faites.

    Vous trouverez également un compte rendu du rapport des 3 experts par l’un d’eux le Dr Christian Expert.

    Effet du choc provoqué par le rapport Lecocq on voit des efforts désespérés des services pour communiquer comme ils ne l’ont jamais fait, mais communiquer ne suffit pas pour répondre à ce que les textes attendent comme activité, de même on observe des opérations de fusions rapprochements comme jamais et pas souvent dans de bonnes conditions de clarté et de transparence. A ce sujet n’hésitez pas à contacter la juriste de notre fédération santé (Fanny Seviran) particulièrement au fait des manœuvres et des conséquences de ces actions et à tenir au courant le syndicat.

    Vous trouverez quelques textes au sujet de la retraite et en particulier des amendements proposés par la conféderation qu’il est important de transmettre à votre député.

    https://www.cfecgc.org/actualites/reforme-des-retraites-demelons-le-vrai-du-faux

    Vous trouverez également les conclusions du rapport annuel d’un confrère, à souligner l’importance de la rédaction de ce document qui est une trace médico-légal qui peut toujours être produite si besoin quoiqu’en disent les détracteurs qui cherchent à le décrédibiliser. N’hésitez pas à nous transmettre vos conclusions de votre rapport annuel pour en faire part aux autres.

    Dr Bernard SALENGRO
    Président d’honneur

    Santé au Travail CFE-CGC

    Article paru dans la revue « Syndical Général des Médecins et des Professionnels des Services de Santé au Travail » / CFE CGC n°62

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