Biothérapies dans l’asthme sévère

Publié le 05 Jan 2023 à 15:56

 

Dr Merouane MESSEKHER
Assistant Hospitalier Montpellier
« 
L’asthme touche environ 365 millions de personnes dans le monde, avec une prévalence estimée à 6 % (4 millions) en France. Selon le GINA, l’asthme est une pathologie respiratoire chronique hétérogène secondaire à une inflammation des bronches. Cette hétérogénéité concerne la présentation clinique, qui peut être variable selon les patients (phénotypes), mais aussi le type d’inflammation locale selon différents mécanismes (endotypes). »

COMMENT POSER LE DIAGNOSTIC D’UN ASTHME SÉVÈRE ?
Il est défini par l’ERS/ATS par un asthme qui nécessite :
L’utilisation de fortes doses de corticoïdes inhalés ;
Plus un autre traitement de fond ;
ET/OU le recours aux corticoïdes oraux > 6 mois/an ;
Pour maintenir le contrôle de l’asthme ; OU qui demeure incontrôlé malgré l’utilisation de traitements appropriés.

Selon cette définition, on ne parle d’asthme sévère qu’après un suivi minimal de 6 mois. Avant de poser ce diagnostic il est nécessaire de suivre rigoureusement les étapes suivantes :
1. Revérifier le diagnostic d’asthme et éliminer les diagnostics différentiels (syndrome d’hyperventilation, dysfonction des cordes vocales). Trente pourcents des patients référés pour un asthme sévère n’ont pas d’asthme.
2. S’assurer de l’absence de facteurs modifiables pouvant contribuer au mauvais contrôle de l’asthme (comorbidité, observance, éducation thérapeutique...).
3. Optimiser la prise en charge autant que possible (en agissant sur les facteurs modifiables par exemple : posologie insuffisante ? traitement mal utilisé ? ...).
La progression des connaissances physiopathologiques a permis l’identification de phénotypes et d’endotypes de plus en plus précis de l’asthme sévère. Une fois le diagnostic d’asthme sévère posé, il convient de préciser ses caractéristiques phénotypiques. Il s’agit d’une étape primordiale pour orienter la prise en charge thérapeutique et peut-être, proposer la prescription d’une biothérapie.

QUELLES SONT LES PRINCIPALES COMORBIDITÉS À CHERCHER CHEZ UN ASTHMATIQUE SÉVÈRE ?
Rhinosinusite avec ou sans polypose
Rhinoconjonctivite allergique
Dysfonction des cordes vocales
Syndrome d’hyperventilation
RGO
DDB
ABPA
SAOS
Anxiété/dépression

COMMENT PHÉNOTYPER UN ASTHME SÉVÈRE ?
Dans un premier temps on peut phénotypes l’asthme sévère en diff érentiant les asthmes dont l’inflammation a des caractéristiques de type T2 (ou T2 high) de ceux n’en ayant pas (T2 low). 1. Le groupe T2 high, le plus fréquent et le mieux connu. Il se caractérise par une augmentation des IgE totales sériques, des éosinophiles sanguins et des voies aériennes et/ou de la Fraction Exhalée de monoxyde d’azote (FeNO). Étant des bio-moarqueurs très variables, il est conseillé de multiplier le dosage de l’éosinophilie et de la FeNO pour affirmer et ne pas ignorer un phénotype T2 high. 2. Le groupe T2 low, comprend des patients asthmatiques exprimant peu ou pas les caractéristiques précédentes. Il s’agit plutôt d’une inflammation neutrophilique moins corticosensible, dans un contexte de tabagisme, d’exposition à des polluants inhalés et/ou d’obésité.
« Les biothérapies ne peuvent être envisagées que chez des patients présentant un asthme sévère selon la définition ATS/ERS et restant non contrôlé malgré un traitement inhalé maximal bien conduit »

QU’ESTCE QU’UNE BIOTHÉRAPIE ?
Une biothérapie est une molécule produite à partir d’une cellule ou d’un organisme vivant. Il s’agit d’une protéine recombinante qui correspond à un anticorps monoclonal pour les biothérapies utilisées dans l’asthme sévère.
L’indication d’une biothérapie et son choix doivent être discutés de façon collégiale en Réunion de Concertation d’Asthme. Il s’agit de traitements innovants et coûteux ce qui implique des modalités de prescription et de suivi stricts.

À QUI PEUTON PROPOSER UNE BIOTHÉRAPIE ?

Les biothérapies ne peuvent être envisagées que chez des patients présentant un asthme sévère selon la définition ATS/ERS et restant non contrôlé malgré un traitement inhalé maximal bien conduit. Leur efficacité est surtout démontrée pour la réduction des exacerbations ou la réduction de la dose de corticothérapie orale au long cours moins évidente sur l’amélioration du contrôle des symptômes ou de la fonction. Compte-tenue des molécules actuellement disponibles, elles ne concernent que les patients asthmatiques T2 high.

QUELLES SONT LES BIOTHÉRAPIES DISPONIBLES EN FRANCE ?
Cinq biothérapies sont actuellement commercialisées en France :

ET CHEZ L’ENFANT ET LA FEMME ENCEINTE ?
L’omalizumab, le mépolizumab et le dupilumab peuvent être prescrits chez l’enfant à partir de l’âge de 6 ans. Le benralizumab n’est indiqué qu’à partir de 12 ans.
’omalizumab est autorisé chez la femme enceinte. Les données sont limitées concernant l’utilisation des autres biothérapies pendant la grossesse. Une biothérapie ne doit être utilisées que si le bénéfice attendu est supérieur au risque potentiel pour le fœtus, à discuter avec l’obstétricien.

QUI PEUT PRESCRIRE UNE BIOTHÉRAPIE POUR UN ASTHMATIQUE SÉVÈRE ?
Les 5 biothérapies sont soumises à une prescription initiale hospitalière.

QUELLE EST LA DURÉE DE TRAITEMENT ?
Les objectifs, les critères d’échec et la durée de traitement doivent être discutés avant de débuter le traitement.
Si les objectifs ne sont pas atteints, la biothérapie doit être arrêtée.

RÉFÉRENCES
1. 2022 GINA Main Report
2. www.globalasthmanetwork.org/Late Breaking Abstract Asthma prevalence and management in adults in France in 2018: ASTHMAPOP survey. ERS 2019
3. L’asthme sévère à l’ère des biothérapies. Laurent Guilleminault et Alain Didier. La presse médicale 2019.
4. VIDAL

 

 

 

 

Pr Alain DIDIER
CHU Toulouse
Pr Laurent GUILLEMINAULT
CHU Toulouse

Article paru dans la revue «La revue du jeune Pneumologue» / AJPO2 N°1

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Publié le 1672930586000