L'arthrose est une maladie articulaire dégénérative caractérisée par la dégradation progressive du cartilage articulaire, des modifications de l'os sous-chondral, et des modifications des tissus mous péri-articulaires. Elle est une cause majeure de douleur et de limitation d'activité chez les adultes, en particulier les personnes âgées.
Une articulation synoviale se compose principalement de quatre tissus :
• Le cartilage articulaire : Ce tissu particulier n'est ni vascularisé ni innervé et ne contient qu'un seul type de cellule, les chondrocytes, au sein d'une matrice extra-cellulaire.
- Matrice extracellulaire : Le cartilage articulaire est constitué principalement de collagène de type II et de protéoglycanes hautement hydrophiles (comme l'aggrécane). Dans l'arthrose, il y a une perte de protéoglycanes et une désorganisation des fibres de collagène, ce qui entraîne une diminution de l'élasticité et des capacités d'absorption des contraintes du cartilage.
- Chondrocytes : Les chondrocytes, cellules résidentes du cartilage, tentent de réparer les dommages mais finissent par contribuer à la dégradation en produisant des enzymes cataboliques, telles que les métalloprotéases matricielles (MMPs), des cytokines (IL-1β, TNF-α), prostaglandines et aggrecanases. Ces enzymes protéolytiques détruisent les fibres de collagène et les protéoglycanes.
• L'os sous-chondral : Cette plaque osseuse intra-articulaire soutient le cartilage et joue un rôle crucial dans le passage des nutriments de l'os vers le cartilage.
- Épaississement et sclérose : L'os sous-chondral s'épaissit et devient plus dense (sclérose), modifiant ainsi la transmission des charges mécaniques.
- Kystes et ostéophytes : Ce processus conduit à la formation de géodes, à la sclérose sous-chondrale et au développement d'ostéophytes (excroissances osseuses) autour des articulations affectées.
- Altérations vasculaires : Il y a une augmentation de la vascularisation de l'os sous-chondral, contribuant à l'inflammation et aux changements dégénératifs.
• La membrane synoviale : Ce tissu conjonctif lâche sécrète le liquide synovial, qui lubrifie l'articulation et est normalement présent en très petite quantité.
- Inflammation : Les débris cartilagineux attirent des cellules immunitaires, induisant une inflammation (synovite), ce qui contribue à la douleur et à la progression de l'arthrose.
- Effusion articulaire : La production excessive de liquide synovial peut entraîner un épanchement articulaire, augmentant la douleur et la raideur.
• La capsule articulaire : Elle entoure l'ensemble de l'articulation.
Lors de l'arthrose, divers stress (mécanique, inflammatoire, métabolique) provoquent des modifications de ces tissus.
L'arthrose n'est pas uniquement due à des contraintes mécaniques excessives sur les articulations ; il y a également une augmentation de la production de médiateurs inflammatoires, tels que les cytokines, qui provoquent une inflammation locale.
La douleur arthrosique est complexe car le cartilage n'est pas innervé. Ainsi, la physiopathologie de cette douleur implique l'os sous-chondral, la capsule articulaire (mise en tension lors des épanchements), la membrane synoviale, et des mécanismes complexes de sensibilisation centrale.
Tissus Mous Péri-Articulaires
Ligaments et tendons
Les ligaments et les tendons autour des articulations arthrosiques peuvent subir des modifications dégénératives, y compris la perte d'élasticité et la faiblesse structurelle.
Muscles
L'atrophie musculaire et la faiblesse autour de l'articulation touchée sont courantes, exacerbant l'instabilité articulaire et la douleur.
Biomécanique Articulaire
Altérations de la mécanique articulaire
Les modifications du cartilage, de l'os sous-chondral et des tissus mous altèrent la mécanique articulaire, entraînant une augmentation du stress sur les surfaces articulaires et accélérant la dégradation.
Rôle des charges mécaniques
Les charges mécaniques excessives ou anormales, résultant de facteurs comme l'obésité, les anomalies anatomiques, ou les traumatismes, jouent un rôle crucial dans l'initiation et la progression de l'arthrose.
Facteurs Moléculaires et Génétiques
Expression génique
Des études ont identifié des gènes associés à la susceptibilité à l'arthrose, incluant ceux impliqués dans la régulation de la matrice extracellulaire et l'inflammation.
Signaux moléculaires
Les voies de signalisation, telles que les voies Wnt/β-caténine et TGF-β, sont impliquées dans la régulation des processus anaboliques et cataboliques dans le cartilage et l'os sous-chondral.
Est-ce que le sport, par exemple la course à pied, favorise l'arthrose ? Est-ce que certaines activités physiques doivent être évitées en cas d'arthrose ?
La biomécanique de chaque articulation est singulière. Par exemple au niveau de la main, les doigts longs sont adaptés pour des prises de force alors que l'articulation métacarpophalangienne du pouce est adaptée pour la précision. Il est reconnu un effet délétère de la sur-utilisation de l'articulation en fonction de son rôle, de même qu'il est délétère de la sous-utiliser = équilibre à trouver.
Une méta-analyse réalisée par Alentorn-Geli E et son équipe en 2017 met en évidence une prévalence de 13.3 % d'arthrose de hanche et genoux chez les coureurs en compétition, et de 3,5 % chez les coureurs de loisirs, comparativement à 10.2 % chez les sujets contrôles. Cette étude illustre l'intérêt d'une charge modérée de course à pied.
Alors que faire en prévention de l'arthrose ? En cas de diagnostic posé d'une arthropathie dégénérative au niveau d'une articulation ?
L'activité physique a depuis longtemps fait ses preuves quant à l'amélioration de la qualité de vie, et de la santé cardiovasculaire, articulaire et musculaire. Il ne s'agit donc pas d'interdire totalement l'activité physique en présence d'arthrose. L'objectif sera d'éviter la surutilisation de l'articulation, et de conseiller une activité physique adaptée de loisir à des fins de santé. Les sports à risque de macro traumatismes comme les sports de combat, les sports de contact seront à éviter. Les sports à moindre contraintes articulaires tels que la natation ou le vélo peuvent être un bon compromis. Dans tous les cas, le contrôle de l'indice de masse corporelle et le renforcement musculaire sont importants à maintenir. De la même manière, une activité physique intense de compétition pourra être déconseillée en fonction du grade de l'arthrose. Au niveau du membre inférieur, l'arthrose de hanche et du genou pourra être évaluée à l'aide de l'indice de WOMAC. Cet indice permet à la fois d'avoir un suivi objectif, et de savoir à quel moment envoyer le patient rencontrer un chirurgien.
Guide de traitement et proposition de prise en charge
Éducation du patient avec mesures de protection articulaire
• Éviter les marches prolongées pendant les périodes les plus douloureuses.
• Promouvoir l'activité physique (marche, vélo, piscine) en dehors des poussées.
• Éviter les stations debout prolongées et le port de charges lourdes.
• Lutter contre le flessum par un programme d'auto-exercices.
Gestion du poids
Encourager la perte de poids en cas de surpoids ou d'obésité, consultation auprès d'un diététicien.
Utilisation d'une canne
Porter une canne du côté opposé à l'articulation affectée, surtout lors des poussées douloureuses.
Rééducation
• Rééducation douce, potentiellement en balnéothérapie, pour maintenir la mobilité articulaire, la trophicité musculaire, et prévenir la formation de flessum.
Cure thermale
• Recommander une cure thermale, particulièrement dans un contexte de polyarthrose, ou si les comorbidités limitent les prescriptions médicamenteuses ; cette approche peut avoir un effet antalgique et psychologique.
Traitement médicamenteux
• Antalgique simple de palier I (Paracétamol jusqu'à 3 g par jour) à la demande en fonction de la douleur.
• AINS per os en cure courte, en l'absence de contre-indication, à la posologie efficace la plus faible possible pour la durée la plus courte, en tenant compte des comorbidités (notamment maladies cardiovasculaires, antécédents d'ulcère gastroduodénal, insuffisance rénale, maladie hépatique).
• AINS en topiques locaux pour réduire la douleur et l'inflammation, lors des poussées aiguës.
• Infiltration intra-articulaire de corticoïdes, en cas d'échec du traitement médicamenteux bien conduit et en présence d'épanchement.
• Infiltrations intra-articulaires d'acide hyaluronique, malgré leur déremboursement par l'Assu
• Maintien de la mobilité articulaire et de la force musculaire par des exercices adaptés et réguliers de mobilité articulaire et de renforcement musculaire.
• En dehors des poussées douloureuses, pratiquer une activité physique régulière en infra-douloureux.
Les patients opérés d'une prothèse totale de genou ou de hanche devront respecter certaines règles, en fonction du matériel posé et des conseils délivrés par le chirurgien.
Les sports de pivot ou de contact sont déconseillés. Les activités physiques recommandées peuvent être le golf, la natation, la marche, le vélo sous certaines conditions, la danse sous certaines conditions, la randonnée, …
Focus sur les gestes infiltratifs au niveau du genou et de la hanche
Ils sont à réaliser sous écho-guidage, afin de ne pas léser le cartilage (quid du contact osseux lors d'une infiltration intra-articulaire de genou sous repérage clinique) et afin d'être au bon endroit (synoviales polylobées, etc.).
Trame/exemple de courrier :
Cher confrère,
J'ai reçu en consultation Mr X, âgé de 63 ans qui présente des gonalgies droites en contexte d'arthrose fémorotibiale médiale et latérale post-traumatique.
Antécédents, traitement médicaux, rééducatif, histoire de la maladie, WOMAC…
À l'examen clinique, on observe en position debout statique un léger genu varum bilatéral et une légère amyotrophie quadricipitale droite. Les empreintes au podoscope sont normales. La marche s'effectue avec une attaque télégramme dérobement déroulé du pas. Il est capable de marcher sur la pointe des pieds et sur les talons. L'équilibre unipodal est maintenu. Lors de la réalisation de fentes vers l'avant on observe un léger genu valgum dynamique bilatéral plus marqué à droite.
Sur la table d'examen, les amplitudes articulaires de hanche et de cheville sont complètes. La flexion du genou droit est douloureuse en flexion, avec une flexion maximale de 110°, contre 130° à gauche. L'extension est complète. Les plans sous-pelviens sont légèrement rétractés, avec des angles poplités de 40° de façon bilatérale et des distances talon-fesse de 20 cm.
Le genou droit présente un épanchement à deux croix. Il est stable dans le plan frontal et dans le plan sagittal. Il n'y a pas de douleur aux testing méniscaux, ni au testing fémoropatellaire.
Je réalise ce jour une infiltration avec 1 ampoule de Diprostène (lot, expirant le). Les informations concernant les bénéfices et risques de ce geste ont été expliqués au patient. En condition stérile et après désinfection en quatre temps, je procède à une infiltration intra-articulaire sous guidage échographique.
Les suites immédiates sont simples.
Au total, le patient a bénéficié d'une infiltration de corticoïdes dans un contexte de gonarthrose du genou droit avec épanchement intra-articulaire sous guidage échographique.
• Repos relatif durant une dizaine de jours.
• Le patient devra consulter à nouveau en cas de rougeur, hyperthermie, signes locaux ou généraux dans les suites du geste.
• Consultation de suivi dans six semaines.
Formule de politesse
Signature
Bibliographie
• Christensen R, et al. (2014). "Weight loss: the treatment of choice for knee osteoarthritis? A meta-analysis of randomised controlled trials." Annals of the Rheumatic Diseases.
• Hurley MV, et al. (2009). "The role of exercise in the management of osteoarthritis of the hip or knee." Current Rheumatology Reports.
• Foley A, et al. (2003). "Does hydrotherapy improve strength and physical function in patients with osteoarthritis—a randomized controlled trial comparing a gym based and a hydrotherapy based strengthening programme." Annals of the Rheumatic Diseases.
• Fransen M, et al. (2015). "Exercise for osteoarthritis of the knee: a Cochrane systematic review." British Journal of Sports Medicine (BJSM).
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Dr Julie COTTEL